Les journalistes : identités et modernités

Le « flou » comme clef de la fabulation. L’identité professionnelle du reporter et l’invention d’un héros romanesque (1870-1939)

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MÉLODIE SIMARD-HOUDE

« Joseph Rouletabille, reporter ». Gaston Leroux, Le mystère de la chambre jaune, L’Illustration, 19 octobre 1907.

Si ce n’est dans la légende de cette illustration, l’une des premières représentant Rouletabille, le lecteur retrouve peu d’indices sur le statut professionnel du reporter fictionnel bien connu : le métier n’est désigné autrement que, peut-être, dans l’attitude du jeune homme – qui semble scruter un sombre mystère à déchiffrer – ou encore ne résiderait – pour le lecteur averti de romans de détection anglais – que dans son complet en tweed, évoquant Sherlock Holmes. Une sorte d’enquêteur, devine-t-on, aux marques professionnelles peu spécifiques, et qui sera pourtant le principal actant d’une série promue à la longévité que l’on sait, à travers maintes aventures et adaptations, jusque dans le cinéma des années trente1. Cette illustration emblématise l’un des aspects du « flou » dont je tenterai de préciser les contours, en le recherchant à la croisée de trois filons : dans les reportages et les pratiques journalistiques mêmes ; dans les débats éthiques et les moyens de régulation encadrant le métier de reporter ; enfin, dans la fiction, qui a abondamment mis en scène le reporter comme héros romanesque tout au long de la Troisième République.

Comme l’a montré Denis Ruellan, l’identité professionnelle des journalistes se constitue aux XIXe et XXe siècles à partir d’un flou productif ; celui-ci touche à la fois au statut des journalistes, aux structures de contrôle et aux modes d’accès à leur métier, aux processus de formation et aux limites de compétence de la profession2. Il serait productif et, dès lors, bénéfique, car il assurerait, en dépit de la porosité des frontières du métier de journaliste, la cohésion d’un groupe social hétérogène et constituerait le fondement même de son professionnalisme. Partant de ce constat, je propose de considérer que ce flou, plus spécifiquement dans le cas du reporter, a été « productif » non seulement pour la formation d’une identité professionnelle, mais également comme moteur des figurations fictionnelles. Autrement dit, il a nourri cette identité également parce qu’il a été moteur de la transformation du reporter en héros de fiction, dont la plasticité actantielle (entendue comme la faculté de s’adapter à maintes situations narratives) et la sérialité sont remarquables. Il s’agit d’ajouter un « cran » à la réflexion initiée par Ruellan et de s’interroger spécifiquement sur le travail qu’opèrent les figurations fictionnelles à partir des pratiques des reporters et des représentations qu’ils produisent d’eux-mêmes. Ce faisant, ces figurations, modulées par l’iconographie qui les accompagne (à laquelle j’accorderai une large place), participent à la construction d’un imaginaire social au sein duquel coexistent des autoreprésentations professionnelles et des représentations exogènes circulant dans la culture médiatique, au gré des logiques sérielles et des adaptations.

Les marques ténues de la profession

Revenons à Rouletabille. Ses premières apparitions romanesques relèvent de l’une des deux grandes veines du roman du reportage, celle de l’enquête, qui naît dans les années 1890-1900. Rouletabille (du moins dans les premières aventures de la série) est un reporter que l’on pourrait dire « urbain » : en effet, Leroux transpose en fiction le type du reporter des faits divers, né en France en 1869, avec l’affaire Troppmann. Celui-ci enquête sur des crimes, certes, mais surtout parcourt la ville et la banlieue, son territoire. Le discours social des années 1870-1880 le considère plus largement comme un « chasseur de nouvelles » de toutes sortes, depuis les commissariats aux coulisses des théâtres parisiens et du Parlement. Il est associé d’abord à un espace urbain, habituel (par opposition aux lointains exotiques), dont il s’emploie à traquer l’envers ou les dessous.

De manière générale, la pratique de ce reporter « urbain » en fait – à l’instar de Rouletabille – un professionnel peu démarqué par des vêtements ou des objets spécifiques : un carnet de notes est son principal, souvent son unique attribut (abstraction faite, dans l’exemple suivant, de la charge satirique ajoutée par les compagnons du reporter et propre au registre de L’Assiette au beurre) :

Zyg, « Les reporters », L’Assiette au beurre, 15 janvier 1910, illustration de couverture.

Les représentations lui ajoutent parfois un monocle, voire une loupe – emblèmes de l’observateur ; parfois aussi un appareil photographique, outil appréciable de saisie du réel. Un même constat peut être réitéré dans l’entre-deux-guerres, où différents portraits de reporters (réels) publiés dans la presse ne les distinguent en rien de quidams, dans une version bourgeoise (habit, cravate) ou populaire (béret, paletot) :

Luc Durtain (au centre), reporter en Amérique pour Vu, n° 27, 19 septembre 1928, p. 615.

Léo Lania (à gauche) interviewant Albert Einstein, Vu, n° 287, 13 septembre 1933, p. 1441.

Harry Grey (à droite) s’apprêtant à visiter une prison (Détective, n° 472, 11 novembre 1937, p. 8).

Dans tous les cas, le reporter « à la ville » n’a pas une identité professionnelle incarnée et affichée dans des marques sensibles.

On peut y comparer le reporter aventurier (seconde grande veine de la fiction – le roman d’aventures géographiques –, qui trouve écho dans les pratiques de reportage au long cours, correspondances de guerre, reportages coloniaux) dont le terrain d’investigation est cette fois les lointains exotiques3. Ce second type est autrement fixé que le premier dans une identité iconographique forte, de l’Américain Henri Morton Stanley à Félix Dubois, en passant par des héros de fiction, comme le trio de reporters d’un roman d’aventures géographiques de Léo Dex.

Henri Morton Stanley (en avant), dans À travers le continent mystérieux, t. I, traduit de l’anglais par Henriette Moreau, Paris, Hachette, 1879, p. 409.

« Excursion photographique autour de Tombouctou ». Félix Dubois (à droite), Tombouctou la mystérieuse, Paris, Flammarion, 1897, p. 369.

« Ils cheminaient tous trois à côté l’un de l’autre. » Léo Dex, Trois reporters à Fachoda, dessin de E. Vavasseur, Paris, Ancienne librairie Furne, 1901, p. 212.

Cette fixation prégnante de l’iconographie du reporter dans les contrées exotiques se vérifie encore dans les années vingt et trente : Albert Londres, caricaturé dans les pages du Journal littéraire et Jean Perrigault chez les cannibales pour l’hebdomadaire Vu, ont un air de famille, qui sera aussi celui de Tintin au Congo.

Albert Londres par Grey, Le Journal littéraire, 8 novembre 1924, p. 14.

Vu, n° 207 (2 mars 1932), p. 262.

Bottes cavalières, casque colonial, parfois une arme ou une monture : l’attirail du reporter aventurier est facilement repérable, mais il n’est toutefois pas vraiment professionnel, puisqu’il recoupe celui de l’explorateur colonial. Le reporter n’agrège ainsi qu’un minimum d’attributs matériels – au contraire, par exemple, d’autres types qui sont aussi des personnages du roman d’aventures à l’aspect plus caractéristique : on peut penser au policier, ou au scout, qui tous deux portent un uniforme marquant nettement leur appartenance à un groupe.

Peut-être est-ce que l’uniforme du reporter est davantage un habit moral, tissé par les valeurs qu’il incarne et les qualités qu’il réclame. Le grand reporter, à partir du début du XXe siècle, on le sait, se substitue au chroniqueur au sommet de la hiérarchie des rédactions et devient le représentant prestigieux du journalisme moderne ; il incarne les grands idéaux de la presse, tels qu’ils ont été formulés à diverses reprises depuis Renaudot, en 1631, et qui sont à bien des égards ceux de la République : vérité, liberté, justice, éducation de l’opinion publique, méritocratie4. Dans un contexte de hiérarchisation des rédactions et de spécialisation des tâches, le grand reporter, dès les années 1900, incarne une forme de liberté, acquise par son prestige et son expérience, tout en déclinant les idéaux de la presse sur le mode de l’enquête : on peut citer pour s’en convaincre diverses figures de reporters « redresseurs de tort », menant des campagnes retentissantes et prenant la défense de condamnés innocents ou de groupes (ouvriers, femmes), dès avant Albert Londres, à commencer par Jacques Dhur, reporter au Journal au tournant du siècle, ou Séverine.

Les grandes séries romanesques du début du XXe siècle où le reporter est un personnage central – c’est-à-dire Les aventures extraordinaires de Rouletabille reporter (1908-1923) de Gaston Leroux, Fantômas (1911-1913) de Pierre Souvestre et Marcel Allain, un certain volume des Nouvelles aventures d’Arsène Lupin de Maurice Leblanc5, ou, un peu plus tard, la série méconnue des Malabar (1932-1939) de Charles Dornac et Jean Ricard6 – le posent comme le gardien de l’ordre social et de la démocratie, le pourfendeur du crime, devant la menace des surhommes inquiétants et mégalomanes que sont Frédéric Larsan, Fantômas, Arsène Lupin ou Mosca. Ennemi, mais aussi double inversé du surhomme, qui le fascine (à l’instar de Beautrelet, tenté de rejoindre Arsène Lupin dans les forces du mal7) et avec lequel il se trouve parfois confondu (tel Fandor et Fantômas8), avec lequel il partage, en outre, une célébrité médiatique, le reporter se présente cependant comme un héros éminemment ordinaire, apte à susciter l’identification du lecteur. Son habit moral – ce qui, dans le reportage, constituerait l’ethos du témoin – est à lui seul un programme, sublimé chez les reporters fictionnels par un faisceau de qualités récurrentes : intelligence, curiosité, capacité de déduction, acuité des sens, logique, mémoire, potentiel de sympathie, courage, athlétisme… Rouletabille, comme Isidore Beautrelet dans L’Aiguille creuse, est un prodige de l’enquête, un jeune homme quasi sans expérience, qui réussit un coup de maître grâce à son intuition et à ses qualités.

Le lecteur est invité à se projeter dans la silhouette d’un héros aux qualités méritocratiques (puisqu’elles ne relèvent pas d’un avantage socio-économique mais de traits de caractère personnels). À l’instar d’autres héros de la modernité médiatique, comme les sportifs et les aviateurs, auxquels on les associe, voire avec lesquels on les fusionne souvent – pensons au Rouletabille aviateur que propose Steve Szekely au cinéma –, les reporters fictionnels offrent un modèle d’héroïsme acquis par la force de qualités individuelles peu spécifiques à une profession. Cette représentation, dont la signification n’a peut-être pas été assez explicitée jusqu’à présent, rejoint de manière très cohérente l’idée, véhiculée tant par les premiers manuels de journalisme que par les souvenirs de reporters, jusqu’au lendemain de la Seconde Guerre mondiale à tout le moins, que l’on deviendrait reporter moins par l’acquisition d’une formation technique spécifique qu’en développant une culture générale, des qualités préalables, en expérimentant sur le terrain.

La fiction, précisément, fait sa moisson de cette idée. Le faisceau de traits du reporter fictionnel y agit comme une huile favorable à la mécanique narrative du roman d’enquête, où l’identification du lecteur au héros et l’entrée dans le processus cognitif de l’enquête sont partie intégrante du plaisir de lecture. La logique fictionnelle, ou encore la fonction actantielle du reporter comme personnage, coïncide avec le mythe professionnel d’un apprentissage sur le terrain. Le caractère professionnel des personnages de reporters est dès lors très peu affirmé, au profit d’une logique d’amateurisme, cependant exempte de toute dimension péjorative. Tout un chacun possède des facultés de réflexion et peut appliquer une méthode enquêtrice, arborer un carnet de notes, relever un indice. « Être reporter », du point de vue de la fiction de la veine enquêtrice, est une condition professionnelle singulièrement minimaliste ; c’est d’abord une attitude ou un « vouloir », que l’on peut résumer au verbe « enquêter ».

Un être mobile : escroqueries, emprunts d’identité et déguisements

Premier ressort important des fictions, le caractère ténu des marques professionnelles du reporter pointe vers une autre déclinaison du « flou ». Ouverte, la profession l’est aussi parce que son accès est peu régulé et sa pratique, peu codifiée. La question de l’instauration de la carte de presse, notamment, ne sera réglée qu’en 1936 avec l’établissement d’une Commission. Et encore, la Commission relèvera davantage du mythe professionnel que d’une fermeture effective des frontières, comme le remarquent Ruellan et Delporte. Si son ambition est d’être « un instrument destiné à opérer un tri entre les vrais et les faux professionnels, et, pourquoi pas, entre les journalistes vertueux et les journalistes indignes, qu’il convient de chasser de la profession9 », la Commission n’a pas le pouvoir de refuser véritablement une carte pour des raisons éthiques10. Ce sont des critères quantitatifs qui établissent le statut de journaliste (dont l’écriture de presse doit être l’« “occupation principale, régulière et rétribuée”11 »), tel que défini par la loi de 1935. Ainsi, dans l’ensemble, la profession de journaliste (avec elle, celle de reporter) demeure ouverte pendant la période de la Troisième République. Si les reporters peuvent adhérer à des associations ou au Syndicat national des journalistes, aucune adhésion n’est obligatoire et aucun insigne légal ne les identifie, sinon le « coupe-file », géré par la Préfecture de police et non par les associations et le syndicat12.

Il semble que les reporters et journalistes aient été bien conscients eux-mêmes de la porosité des frontières professionnelles, et ce, très tôt, comme l’indique la proposition de Gaston Vassy – chef des reporters au Figaro et grand défenseur du reportage – de mettre en place une forme de carte de presse avant la lettre, dès 1874 :

Le nombre d’individus qui se présentent dans les théâtres et autres endroits en prenant la qualité de reporters du Figaro augmentant chaque jour, nous avons dû prendre des mesures pour couper court à cela. Voici ce que nous avons trouvé :
Nous avons fait faire de petits portefeuilles en cuir de Russie, portant à l’extérieur une F croisée avec une plume. À l’intérieur, d’un côté, se trouve une carte, avec les indications suivantes :

Gaston Vassy, « Informations. La journée », Le Figaro, 15 janvier 1874.

Ces cartes porteront la signature légalisée de M. de Villemessant et le timbre du journal.
De l’autre côté du portefeuille sera la photographie du reporter à qui sera donnée cette sorte de carte d’identité, dont nous serons très avare.

Inventant une carte de presse nominative, Vassy dénonce dans cet entrefilet l’utilisation frauduleuse du titre de reporter et des avantages qui en découlent. L’incident souligne la facilité avec laquelle tout un chacun peut se faire passer pour un reporter et fait écho à d’autres usurpations semblables relevées par Vassy au cours des mois précédents. Ainsi, le 22 décembre 1873, le chef des reporters portait plainte au parquet contre un individu, Henri Goepp, qui « s’en allait dans les cafés du quartier latin, empruntant de l’argent çà et là, en se disant faussement reporter du Figaro ».

Or, le motif du « faux reporter », fourbe et factice représentant de la profession, connaît peu après un certain succès dans le roman-feuilleton, où le reporter fait son entrée comme personnage secondaire. Dans Le Médecin du faubourg, un roman d’Edmond Lepelletier publié dans Le Petit Parisien, en 1881-1882, le principal protagoniste, Armand Vidal, se déguise en reporter afin de soutirer des informations qui lui permettront de capter illégalement un héritage. Pour ce faire, il se borne à « [tirer] un carnet de sa poche » et à poser quelques questions... De même, dans Le Mort volant de Jules Hoche, roman-feuilleton publié dans Le Temps en 1912, le détective Plançon se déguise en reporter du journal La Dépêche : il se munit d’un monocle, d’une perruque et d’une fausse moustache. L’identité de reporter constitue un subterfuge facile à la produire : est reporter celui qui possède les attributs du personnage – carnet, crayon, monocle – et l’attitude inquisitrice qui lui est propre. La récurrence de cette représentation témoigne de l’ambivalence alors associée à la figure du reporter, personnage peu respectable, potentiellement suspect. Elle pose le reporter en caméléon social, dont l’apparence et les compétences peuvent être facilement simulées par un amateur.

L’idée n’est toutefois pas absolument péjorative ; elle assurera même par la suite la malléabilité du personnage fictionnel. Si tout un chacun peut se déguiser en reporter, la proposition inverse se vérifie, et se révèle fertile pour la fiction romanesque : de ce point de vue, le « reporter » est une identité actantielle minimale, dont la polyvalence se vérifie dans maintes situations narratives et se trouve thématisée par le motif récurrent du déguisement ou de l’emprunt d’identité. Double du surhomme, on l’a dit, le reporter possède, tout comme lui, une faculté de déguisement sans égale et emprunte tour à tour les masques les plus divers. Dans le seul roman Les amours d’un prince, de la série Fantômas, le reporter Fandor adopte deux identités d’emprunt, celles du poète Olivier et de Jacques Bernard, si bien que même son comparse, le policier Juve, dérouté, le prend pour Fantômas en personne avant d’être détrompé13 ; il se déguise également en « apache déguenillé » – Juve le juge alors « presque méconnaissable14 ». De même, dans Belphégor d’Arthur Bernède, le reporter Jacques Bellegarde doit se déguiser afin d’échapper aux poursuites des policiers. Aidé par le détective Chantecoq qui possède « au suprême degré l’art de se camoufler15 » et un vaste lot de déguisements, « des vêtements et des uniformes de toutes sortes16 », il se cache derrière la moustache, les postiches et le teint bistré d’un conservateur de musée italien. La palme du reporter déguisé, chaudement disputée, pourrait revenir au reporter Phocle, personnage secondaire, amusant et un peu antérieur du roman d’aventures géographiques Du Tchad au Dahomey en ballon, de Léo Dex : ancien artiste de cirque, Phocle met à profit ses connaissances clownesques en se déguisant à l’aide d’une peau de crocodile, défroque du temps de son ancien métier, afin de délivrer ses amis prisonniers des indigènes Kanouri :

Trouvez-vous pas que je suis bien entré dans mon personnage de saurien, que je me suis bien souvenu de mon ancien métier d’homme-serpent ? [demande Phocle à ses amis délivrés]. […] Certes je n’aurais jamais cru m’en tirer aussi bien ; savez-vous que l’on étouffait dans cette peau ?  Voilà une peau à laquelle nous devons, n’est-il pas vrai ? une éternelle reconnaissance […]17.

Le reporter est littéralement entré dans une seconde « peau ». Le motif, évocateur, invite à tracer maintenant l’itinéraire inverse : des faits divers de Gaston Vassy aux fictions, repassons des fictions aux reportages. Car les déguisements de Phocle, de Jacques Bellegarde et de Fandor, qui servent si bien les péripéties, poursuites et retournements du roman d’aventures, renvoient non seulement aux fraudes relevées par les défenseurs du reportage tels Vassy, mais aussi à une topique importante du reportage de la Troisième République : ils évoquent la pratique du reportage d’identification et ses mises en scène spectaculaires. Présent en France à partir des années 1880, ce type de reportage peut être défini comme l’intégration, sous le couvert de l’incognito, d’un milieu social donné (par exemple des ouvriers, des chiffonniers, des asiles de nuit ou des prisons), afin de l’observer sous son « vrai jour » et d’en exhumer une « vérité sociale » autrement inaccessible. Le reportage d’identification appelle un déguisement à plusieurs niveaux : le reporter modifie son apparence physique tel Georges Lefèvre qui s’immerge parmi les « gueux » de Paris en 1929 ; il emprunte de plus un comportement, un lexique, souvent un faux nom.

« Deux aspects de Georges Le Fèvre ». Annonce pour le reportage « “Je suis un gueux” », Le Journal, 6 juin 1929.

L’immersion identitaire, à vocation sociologique chez ses initiateurs de la fin du xixe siècle, peut glisser vers la fictionnalisation, comme chez Maryse Choisy, qui enquête, à la fin des années vingt, dans les maisons closes parisiennes puis s’introduit chez les moines du mont Athos, en Grèce18.

À travers ses jeux de masque, le reportage d’identification pose le reporter en acteur doué, en individu facilement adaptable, prompt à toutes les métamorphoses ; il peut soutenir un rôle, quitte à simuler et à mentir, et fait preuve d’une faculté de travestissement spectaculaire. Même si elle est relativement peu fréquente, la pratique de l’immersion identitaire semble avoir frappé d’un sceau indélébile l’imaginaire de la profession, en incarnant l’idée d’un reporter comme être mobile, de nature insaisissable. Il faut remarquer, cependant, que c’est moins la pratique du reportage d’identification comme telle que les fictions évoquées précédemment ont transposée, que cette idée d’une mobilité du reporter, cristallisée dans la faculté de déguisement du personnage comme dans son opposition au surhomme, être également mobile et insaisissable. Ainsi, ce que la fiction révèle du reporter comme figure de l’imaginaire social réside moins à la « surface » des textes, dans les méandres et les détails de l’intrigue, qu’à un niveau que l’on pourrait dire structurel, c’est-à-dire, d’une part, dans les traits qui fondent l’identité actancielle récurrente du personnage, telle qu’elle se décline dans une production sérielle et, d’autre part, dans la structure narrative du roman, qui situe le reporter dans une axiologie révélatrice (le reporter affrontant le surhomme dans une lutte perpétuellement inachevée) et se trouve largement surdéterminée par des logiques génériques et architextuelles, elles-mêmes liées au support ou à l’ensemble éditorial (journal, fascicule, collection) auquel appartient l’œuvre19.

On remarquera au passage que la pratique du reportage d’identification ne génère qu’un très faible – sinon aucun – questionnement éthique au cours de cette longue période, du moins chez les reporters concernés. Le Syndicat national des journalistes se dote pourtant, en 1918, d’une « charte des devoirs professionnels », où se lit l’article suivant : « Un journaliste digne de ce nom […] s’interdit d’invoquer un titre ou une qualité imaginaires pour surprendre la bonne foi de quiconque en vue d’obtenir une information. » Cependant, la charte n’a pas de valeur légale et le Syndicat n’a aucun moyen de l’imposer. Dès lors, une certaine fracture s’observe entre le code moral dont s’est doté la profession et la réticence, liée à la crainte d’entamer la liberté de presse, à encadrer légalement la pratique des journalistes. Celle-ci demeure très largement libre et autorégulée par une conception interne et assez souple de l’éthique professionnelle. Cette autre marque – déontologique, celle-là – du « flou » professionnel, gage de liberté, sert ainsi l’invention romanesque.

Plasticité et polyvalence d’un héros d’aventures

Il arrive aussi que le reporter change d’apparence sans pratiquer pour autant le reportage d’identification, parce que son travail l’amène à expérimenter des moyens de transport, des conditions de vie inhabituelles ou exotiques : ce sont Ludovic Naudeau « en mineur », Paul Bringuier en aviateur pour connaître l’Aéropostale, Albert Londres « en costume du pays » chez les pêcheurs de perles, ou Jean Barois, à La Mecque, revêtu d’une ample robe arabe.

« Ludovic Naudeau en mineur », Le Journal, 30 novembre 1901.

« L’atterrissage au cap Juby », Paul Bringuier (à droite), Le Journal, 25 mai 1929.

« Albert Londres, en costume du pays » (à droite), Le Petit Parisien, 19 octobre 1930.

Jean Barois à La Mecque, Paris-Soir, 16 avril 1936.

La tenue évoque chaque fois les conditions exceptionnelles de l’immersion corporelle qui caractérise l’expérience du reporter. Elle participe à la construction de sa posture médiatique, mais marque aussi la diversité et le caractère peu spécifique de son identité iconographique : la profession du reporter serait d’embrasser toutes les professions, toutes les identités, au gré des enquêtes et des aventures, dans un processus sympathique qui engage son corps.

La fiction s’est amusée à jouer de cette dualité du reporter, tantôt quidam ordinaire de la ville, tantôt revêtu d’un costume inattendu, correspondant au milieu qu’il « investit » au sens étymologique, c’est-à-dire non seulement qu’il pénètre, mais dont il revêt l’apparence. La sérialité de certaines fictions, comme en un condensé de la sérialité des portraits de reporters retrouvés dans les pages de la presse, invite à décliner ce jeu de rôle à l’infini. Celui-ci est peut-être rendu plus prégnant encore par les médiums visuels, à l’instar de la bande dessinée, dont Les aventures de Tintin fournissent le meilleur exemple. Les premiers albums, publiés dans les années trente, thématisent chaque fois l’emprunt d’un nouveau « costume » par Tintin, tour à tour Soviet en Russie (après que son costume à carreaux a été déchiqueté dans un attentat), cow-boy en Amérique (à l’issue d’un bref arrêt dans une boutique de vêtements où il se munit d’une ceinture de cartouches à la dernière mode !) ou Chinois dans Le Lotus bleu (afin de se rendre à un rendez-vous mystérieux). Et il sera encore, plus tard, muni d’un foulard arabe « au pays de l’or noir », camouflé sous l’uniforme d’un commandant de l’armée chinoise, puis astronaute, plongeur en scaphandre…

Thématisée par ces jeux de rôle et déguisements, la plasticité du héros reporter est toutefois aussi, plus profondément, une polyvalence structurelle, en regard des types de personnages récurrents du roman d’aventures. Comme les traits du reporter enquêteur servent admirablement le mécanisme narratif du roman d’enquête, de même le reporter aventurier se révèle un personnage redoutablement « efficace » pour le roman d’aventures. Matthieu Letourneux distingue dans ce genre romanesque trois types principaux d’aventuriers, qui en synthétisent les enjeux : « l’aventurier par goût (dont l’archétype est le chasseur), l’aventurier par devoir (par exemple l’explorateur) et le spectateur du monde (incarné par le savant)20. » Le reporter « décrit le monde, comme le savant, mais est aussi un homme d’action proche du chasseur », précise Letourneux avant d’évoquer les personnages d’Armand Lavarède chez Paul d’Ivoi ou de Claudius Bombarnac chez Jules Verne. On retrouve chez le reporter aventurier le « goût du sport, du jeu et de l’aventure » que Letourneux attribue au chasseur, mais également le caractère de témoin et d’observateur du savant, qui permet dans le roman destiné à la jeunesse de transmettre un discours pédagogique. Mais le reporter aventurier mobilise en outre les traits du troisième type d’aventurier, l’aventurier par devoir ou l’explorateur. À l’image du militaire, du diplomate ou de l’ingénieur (incarnations d’explorateurs), le reporter n’est pas entièrement libre (ce qu’est le chasseur) : il relève d’une entité qui le surplombe, son journal. Et s’il n’est pas enrôlé, il sert les intérêts de son pays, caractéristique de l’explorateur. Ainsi, il synthétise de façon frappante des traits associés aux trois principaux types de héros du roman d’aventures géographiques et peut incarner, de ce fait, les dimensions idéologiques et pédagogiques de ces récits, se faisant le vecteur de discours pédagogique, scientifique, patriotique, tout en participant comme actant important à l’exploration aventureuse. La place du personnage de reporter dans cette typologie est remarquable par son ambivalence, comme le montrent bien les premiers héros reporters aventuriers : Samuel Fergusson, dans Cinq semaines en ballon, de Jules Verne, est principalement un homme de science, mais il a aussi été le correspondant « le plus actif et le plus intéressant du Daily Telegraph21 » et possède le titre de « docteur » en plus d’explorer l’Afrique du haut de son ballon. Gédéon Spilett, dans L’Île mystérieuse, est quant à lui un « chasseur passionné22 », qui possède également « quelque pratique de médecine courante23 », en plus d’être correspondant de guerre.

Il semble que cette polyvalence narrative prenne racine, enfin, dans une dernière forme de « flou » professionnel, c’est-à-dire dans une hybridité réelle des pratiques, chez maints reporters, tout au cours de la Troisième République, signe d’une professionnalisation non complétée, ou plutôt d’une profession définie par son ouverture même, au sens où l’entend Ruellan, qui laisse place à l’amateurisme et à divers cumuls de rôles. Il en va ainsi d’une figure que l’on peut dire tutélaire tant son aura imprègne durablement les discours des représentants de la profession, celle du reporter-aventurier américain Henri Morton Stanley, du New York Herald, qui a retrouvé en 1871 le docteur Livingstone au cœur de l’Afrique. Stanley jumelle en effet fonction de médiatisation et d’exploration, se faisant le reporter de son propre voyage africain. Étonnamment, la figure du reporter aventurier et explorateur, d’abord associée aux voyages de découverte du continent africain et à la conquête coloniale de la deuxième moitié du xixe siècle, trouve un second souffle dans l’entre-deux-guerres avec le développement des sports et des moyens de transport (automobile et aviation), à travers exploits sportifs, raids et épreuves de longue distance. Il s’agit moins désormais de mettre pied en terra incognita que de fracasser des records ; l’exploit de vitesse ou de durée du voyage, ou encore son degré de danger, s’est substitué à la découverte d’une destination.

C’est dans cette optique que le reporter Edmond Tranin effectue pour le Petit Parisien une traversée automobile de l’Afrique, à l’hiver 1925, de Dakar à Djibouti :

Annonce pour le reportage d’Edmond Tranin, Le Petit Parisien, 9 juin 1925.

Le reportage, à vocation publicitaire, est financé par la compagnie automobile Rolland-Pilain, dont les explorateurs utilisent la « 10 CV » de série. Au-delà de cette vocation promotionnelle, qui sert les intérêts du journal, on peut dégager une posture mixte : Tranin est tout à la fois reporter, scientifique, explorateur et sportif, non sans rappeler vaguement les héros verniens. Cette posture s’instaure avant même le début de la publication du reportage : Tranin est décrit à son retour de voyage, par un de ses confrères, « [b]ronzé comme un vrai “broussard”, un peu amaigri, l’œil étonnamment vif24 ». Quelques jours avant le début de la publication du récit dans le Petit Parisien, Tranin donne une conférence devant la Société de géographie, qui témoigne de l’apport scientifique du raid. Enfin, la première livraison du reportage reconduit cette posture hybride, en faisant référence au voyage comme à une « expédition », une « mission » et une « prouesse » sportive aux buts multiples : selon ce discours, en plus d’avoir démontré son courage et son énergie, Tranin a servi le progrès technique et l’industrie automobile française et tracé un nouvel itinéraire terrestre entre deux possessions coloniales, glorifiant au passage l’empire colonial français.

Le cas de Tranin n’est peut-être pas la norme, mais il n’est pas non plus exceptionnel. À côté des reporters devenus explorateurs le temps d’un raid, des figures médiatiques de sportifs trouvent place dans les pages des quotidiens de l’entre-deux-guerres et se font inversement reporters d’occasion, en publiant les récits autobiographiques de leurs exploits et / ou en envoyant des dépêches au cours de leur voyage, comme l’explorateur norvégien Roald Amundsen, l’aviateur Henri Lemaître ou les navigateurs célèbres pour leurs traversées solitaires de l’Atlantique, Marin Marie et Alain Gerbault25.

Câblogramme d’Alain Gerbault, Le Petit Parisien, 12 avril 1925, une.

La manière dont ces récits et dépêches sont présentés dans le corps du journal ne peut qu’instaurer une certaine confusion entre ces reporters amateurs et les reporters professionnels, potentiellement accrue par de véritables reconversions de carrière, à l’instar de celle de la tenniswoman Suzanne Lenglen qui collabore aux pages sportives de Paris-Soir au terme de sa première carrière. Ces pratiques témoignent de l’ouverture pérenne de la presse aux amateurs, un fait qui agace, voire inquiète les journalistes professionnels depuis la fin du XIXe siècle et contre lequel lutte le Syndicat des journalistes dans l’entre-deux-guerres26. La définition du « Statut du journaliste » par la loi de 1935 aura précisément parmi ses objectifs de fermer la profession aux amateurs pour qui elle ne constitue par la principale source de revenus. N’empêche que la présence des amateurs et, inversement, la persistance, parmi les reporters professionnels, de pratiques sportives et d’exploration, ont contribué à faire perdurer dans la première moitié du XXe siècle l’image du reporter-aventurier et ont nourri l’identité professionnelle en préservant son « aura » mythique, notamment par le relais de la fiction. L’ouverture de la profession aura permis une diversité des pratiques du reportage qui, à son tour, a pu nourrir la polyvalence actantielle du reporter comme personnage.

En somme, la conception d’un métier qui s’apprendrait par l’expérience et nécessiterait des qualités peu spécifiques, la faiblesse de son encadrement déontologique et la quasi absence d’attributs professionnels sont autant d’éléments qui ont constitué un état des choses infiniment producteur du côté de la fiction. Celle-ci a complété la transformation du reporter en héros au gré d’une coïncidence productive entre, d’une part, un véritable flou professionnel et, d’autre part, les logiques génériques et architextuelles des fictions du reporter, c’est-à-dire des romans d’enquête et d’aventures. Ainsi, on l’a vu, reportages et fictions sont rarement en complète rupture. La spécificité des figurations fictionnelles résiderait dans cette faculté de cristalliser les représentations en les remodelant au gré des logiques et des impératifs narratifs, actantiels et sériels du roman d’aventures. Elles figent la figure du reporter dans certains traits et scénarios et lui accordent une grande visibilité, à travers des produits culturels largement diffusés. Mais cette sérialité et cette fixation fictionnelles s’arriment, il est bon de le rappeler, à une sérialité première qui, dans la presse elle-même, fait défiler pour le lecteur les enquêtes, les signatures, les portraits de reporters, non sans qu’une forme de codification n’intervienne, tant dans le format du reportage que dans ses scénographies, prolongées par l’iconographie. Dans l’entre-deux-guerres, le rythme soutenu de publication d’un reportage que l’on peut dire « feuilletonesque », car il adopte la découpe et la régularité du roman-feuilleton, les reportages se succédant les uns aux autres selon une mécanique finement ajustée, appuie cette mise en série des reportages, des imaginaires et des postures de reporters qui les composent. Au final, ces séries de reporters sont peut-être autant « fabulatrices » (ou productrices d’histoires, de scénarios divers…) que fixatrices, puisqu’elles se traduisent par des représentations stéréotypées et récurrentes, mais aussi, à l’intérieur de celles-ci, par la grande malléabilité narrative que l’on a vue à l’œuvre.

Élaborée à mi-chemin entre la production de chacun (l’enquête individuelle d’un reporter donné) et l’horizon plus vaste de la culture médiatique, « l’identité professionnelle » des reporters cesse en partie de leur appartenir, parce qu’elle s’inscrit, plus largement, dans un imaginaire social. Ce circuit d’invention, en popularisant le reporter comme héros populaire et en participant à tisser le mythe professionnel, a sans doute eu en retour un effet – certes, difficile à mesurer – sur la manière dont les reporters eux-mêmes ont conçu leur identité. On peut en voir un symptôme lorsque les reporters, dans leurs Mémoires, renvoient à leurs doubles fictionnels, comme pour signaler au lecteur l’arrière-plan imaginaire sur le fond duquel ils évoluent. C’est Henri Béraud racontant son premier reportage et se demandant « comment Rouletabille et Passe-Partout réagiraient à [sa] place27 ».

(CRSH Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne)

Bibliographie

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Notes

1  Ainsi, les huit feuilletons publiés par Gaston Leroux seront prolongés par au moins six adaptations cinématographiques dans l’entre-deux-guerres : d’Henri Fescourt, Rouletabille chez les Bohémiens, France, Société des Cinéromans, 1922 [roman-ciné de Gaston Leroux publié dans Le Matin, 4 octobre-14 décembre 1922] ; de Marcel L’Herbier, Le Mystère de la chambre jaune, France, Films Osso, 1930, 108 min. [scénario adapté du roman de Gaston Leroux par Marcel L’Herbier], et Le Parfum de la dame en noir, France, Films Osso, 1931, 109 min. [scénario adapté du roman de Gaston Leroux par Marcel L’Herbier] ; de Steve Szekely, Rouletabille aviateur, France, Films Osso, 1932, 82 min. [scénario adapté des romans de Gaston Leroux par Pierre-Gilles Veber] ; et de Maurice Tourneur, Le Mystère de la chambre jaune, France, Films Éclair, 1913 [scénario adapté du roman de Gaston Leroux par Maurice Tourneur], et Le Parfum de la dame en noir, France, Films Éclair, 1914 [scénario adapté du roman de Gaston Leroux par Maurice Tourneur].

2  Denis Ruellan, Le Professionnalisme du flou, Grenoble, Presses universitaires de Grenoble (Communication, médias et sociétés), 2007 [1993], p. 84.

3  Pour plus de précisions sur ces deux grandes veines fictionnelles, voire Guillaume Pinson, « Le journaliste est un héros », dans L’Imaginaire médiatique. Histoire et fiction du journal au XIXe siècle, Paris, Classiques Garnier (Études romantiques et dix-neuviémistes), 2012, p. 185 et suivantes.

4  Christian Delporte, Les journalistes en France. 1880-1950. Naissance et construction d’une profession, Paris, Seuil (xxe siècle), 1999, p. 126-127 et 169.

5  Il s’agit de L’Aiguille creuse (1908-1909).

6  Qui compte sept titres publiés en feuilleton dans Le Matin : Malabar, 18 octobre 1932-21 janvier 1933 ; Malabar... L’oiseau de sang, 13 octobre 1933-19 janvier 1934 ; Malabar... Prince rouge, 1er novembre 1934-3 février 1935 ; Malabar... La lumière vivante, 24 novembre 1935-4 mars 1936 ; Malabar... On a volé un roi !, fin 1936-début 1937 ; Malabar... Les mangeurs de forêts, 31 octobre 1937-13 février 1938 ; Malabar... Les hommes de la nuit, à partir du 18 janvier 1939.

7  À la toute fin de L’Aiguille creuse.

8  Voir notamment le volume Les amours d’un prince.

9  Christian Delporte, Les journalistes en France, op. cit., p. 293.

10 Ibid., p. 301.

11 Ibid., p. 290.

12 Ibid., p. 260.

13  Pierre Souvestre et Marcel Allain, Les amours d’un prince, dans Fantômas, t. I, Paris, Robert Laffont (Bouquins), 1987, p. 465.

14 Ibid., p. 490.

15  Arthur Bernède, Belphégor. Grand roman-ciné inédit d’aventures modernes, dans Le Petit Parisien, 7 février 1927.

16  Ibid., 24 février 1927.

17  Léo Dex [pseudonyme d’Édouard Deburaux], Du Tchad au Dahomey en ballon. Voyage aérien au long cours, Paris, Hachette (Bibliothèque des écoles et des familles), 1903, p. 113.

18  Maryse Choisy, Un mois chez les filles, Paris, Éditions Montaigne (Gai savoir), 1928 ; Un mois chez les hommes. Reportage, Paris, Éditions de France (Le livre d’aujourd’hui), 1929.

19  Cette réflexion emprunte à Matthieu Letourneux (entretien par Nicolas Gaille et Mélodie Simard-Houde), « La culture “populaire” dans ses contextes. Pour une poétique et une esthétique de la sérialité », Chameaux [en ligne], dossier « Culture pop’ », n° 8 (automne 2014). URL : revuechameaux.org

20  Matthieu Letourneux, Le Roman d’aventures (1870-1930), Presses universitaires de Limoges (Médiatextes), 2010, p. 97.

21  Jules Verne, Cinq semaines en ballon, Paris, Gallimard (Folio junior), 1980 [1863], p. 14.

22  Jules Verne, L’Île mystérieuse, Paris, Le livre de poche, 2002 [1876], p. 234.

23  Ibid., p. 634.

24  Le Petit Parisien, 12 avril 1925.

25  Voir ainsi, parmi d’autres récits : Roald Amundsen, Le Pôle en aéroplane, Le Petit Parisien, 11 avril-27 juin 1920 ; Henri Lemaître, De Paris à Paris via Dakar et Tombouctou, Le Petit Parisien, 5-20 avril 1920 ; Alain Gerbault, La Croisière d’Alain Gerbault, dans Le Petit Parisien, 4-28 avril 1920 ; Marin Marie, De New York au Havre seul sur un canot à moteur, Paris-Soir, 4-20 août 1936.

26  Christian Delporte, Les journalistes en France, op. cit., p. 84-85, 201, 252, 256-259.

27  Henri Béraud, Les derniers beaux jours, Paris, Plon, 1953, p. 19.

Pour citer ce document

Mélodie Simard-Houde, « Le « flou » comme clef de la fabulation. L’identité professionnelle du reporter et l’invention d’un héros romanesque (1870-1939) », Les journalistes : identités et modernités, actes du premier congrès Médias 19 (Paris, 8-12 juin 2015). Sous la direction de Guillaume Pinson et Marie-Ève Thérenty Médias 19 [En ligne], Mise à jour le : , URL: https://www.medias19.org/publications/les-journalistes-identites-et-modernites/le-flou-comme-clef-de-la-fabulation-lidentite-professionnelle-du-reporter-et-linvention-dun-heros-romanesque-1870-1939