Presse et scène au XIXe siècle

Les mises en scène sur papier-journal : espace interactionnel et publicité réciproque entre presse et monde théâtral (1828-1865)

Table des matières

SYLVIANE ROBARDEY-EPPSTEIN

Vers la fin des années 1820, commencent à paraître, dans des journaux et des revues, des indications plus ou moins détaillées concernant la mise en scène de pièces représentées sur les théâtres parisiens1. Marie-Antoinette Allevy fut sans doute la première à signaler dans sa thèse l’importance de ces notations pour l’historien du théâtre2. Plus tard, des travaux ont permis de mieux comprendre les conditions d’émergence de ce type de publications3. Il ne s’agira donc pas de revenir sur le contexte culturel et esthétique ayant favorisé l’éclosion du phénomène, pas plus qu’il ne sera question d’entreprendre ici l’analyse de ces documents.

Un constat s’impose néanmoins : les recherches sur les « notes de mise en scène » pour le XIXe siècle ont eu tendance à privilégier l’étude des livrets imprimés4 ; la réflexion autour de la notion de naissance de la mise en scène s’en est certes trouvée enrichie, mais l’on s’est presque exclusivement penché sur l’opéra et l’opéra-comique, en raison de l’intérêt particulier des musicologues pour de tels documents5. En outre, il est généralement reconnu que les mises en scène imprimées étaient destinées aux directeurs des théâtres de province, afin de leur faciliter la tâche pour monter les pièces sur le modèle des créations parisiennes6. On a donc surtout réfléchi jusqu’à maintenant en termes de pratique scénique et de transmission artistique, et ce presque uniquement au sujet du théâtre lyrique, le tout à partir de livrets édités par les hommes de théâtre.

C’est sous un autre angle qu’il faut ici aborder les choses : le support du journal soulève à lui seul, et en tant que tel, d’autres questions que celles de la stricte réalisation du spectacle ; il donne toute la dimension du rôle fondateur de la presse dans la mise en place d’une nouvelle façon d’envisager le fait théâtral et sa transcription, ce qui, par truchement, a assuré sa pérennisation, même si celle-ci, dans un premier temps, ne fut pas intentionnelle puisque les mises en scène sur papier-journal avait une vocation pratique d’exploitation immédiate du support. En tentant de mettre au jour les interactions et l’étroite communauté d’intérêts entre presse et monde du théâtre telles qu’elles transparaissent grâce aux mises en scène publiées dans les journaux au cours du XIXe siècle, l’on verra qu’au même titre que les livrets imprimés, ces notations s’imposent comme des témoignages significatifs pour la constitution d’une historiographie des spectacles et de l’art scénique.

Chronologie et typologie : traces et signes d’une évolution

Il semble que la première publication d’une mise en scène dans un journal puisse être datée du 8 octobre 18287. C’est l’éphémère Revue dramatique qui figure comme pionnière en la matière, pour la tragédie Olga, ou l’Orpheline moscovite de Jacques Ancelot (Théâtre-Français, 15 septembre 1828). Au détour de la recension de la pièce, une note de bas de page annonce la position de principe des rédacteurs : « [n]ous croyons être agréables à nos lecteurs, et particulièrement MM. les Directeurs de théâtre de province, en joignant à notre Revue la mise en scène des principales pièces8. » Les indications proposées se réduisent pourtant encore à la seule description détaillée des costumes et des accessoires, et, la Revue dramatique n’ayant connu que trois numéros, l’expérience s’arrêta net en décembre 18289. Toutefois il est permis de penser que cette initiative donna l’impulsion à une série de publications par les journaux. En effet, presque dans le même temps, L’Observateur des sciences fait paraître à la une un « avis important » pour annoncer qu’on trouvera aux Bureaux d’abonnement du journal « les Mises en scène très-détaillées de tous les ouvrages nouveaux10. » Parce qu’elles étaient proposées séparément et qu’elles n’ont pas fait l’objet d’un dépôt légal à la Bibliothèque nationale, ces feuilles semblent avoir été perdues. La disparition de tels suppléments rend donc d’autant plus précieuses les mises en scène imprimées directement dans les pages des revues. Ainsi, l’organe faisant suite à L’Observateur des sciences, le Gil Blas, signale en manchette et dès le premier numéro : « [c]e journal est le seul qui donne la mise en scène très-détaillée de toutes les pièces représentées à Paris11. » La place occupée par ces notations, en rez-de-chaussée et sur deux colonnes, leur assigne pour la première fois une visibilité et un statut particuliers. Chacun des éléments du spectacle se voit traité à l’aide de cinq rubriques : Personnages et acteurs, Accessoires (ici sont également consignés les meubles et leur emplacement sur scène), Costumes, Décors, Régie12. La masse textuelle nécessaire aux explications exige le plus souvent un étalement de la publication sur trois numéros. En conséquence, on trouve au bas des première et deuxième parties la formule « la suite au prochain numéro13 », phrase consacrée et associée depuis à la naissance du roman-feuilleton, mais qui fut donc, semble-t-il, d’abord utilisée pour la publication sérielle des mises en scène.

À travers les péritextes comme les notices, les notes de bas de pages ou encore les « avis importants » qui entourent ces publications, émergent certaines postures éditoriales permettant d’apprécier l’influence des souscripteurs et de la vie théâtrale sur les choix des rédacteurs, comme le prouvent des notes du type « [s]ur la demande de plusieurs de MM. les directeurs des départements nous nous empressons de donner la mise en scène de Jenny [opéra-comique de Saint-Georges et Carafa, Théâtre Ventadour]. Nous donnerons ensuite celle du Brigand napolitain [vaudeville de Dartois et de Leuven, Théâtre du Vaudeville], que nous avions commencée dans notre dernier numéro14. » On n’hésite pas à interrompre la publication d’une mise en scène en fonction des impératifs de l’actualité théâtrale qui gouvernent de la sorte la sélection et le rythme des parutions. Cela explique pourquoi les indications pour les comédies-vaudevilles sont majoritaires. Leur publication intensive reflète les goûts du public ainsi qu’une demande de la part des théâtres de province, qui croient en des succès reposant sur la réussite de mises en scène peu onéreuses pour les décors, mais complexes quant aux exigences de précision pour le jeu et les déplacements des acteurs15.

Suite aux premières tentatives éphémères de La Revue dramatique et du Gil Blas, le Journal des Comédiens, plus tard rebaptisé Gazette des Théâtres, s’impose comme une référence décisive et incontournable. Dans les jours qui suivent la première et avant même que les pièces ne soient imprimées, le journal propose, dans un Feuilleton distribué gratuitement tous les jeudis aux abonnés, des mises en scène complètes avec indication de la durée de la représentation, parmi lesquelles on trouve celles de pièces devenues mythiques (par exemple Hernani16ou Antony)17. Ces indications sont d’autant plus originales qu’elles proviennent en droite ligne des « metteurs en scène » (autrement dit, des régisseurs ou des directeurs des théâtres) qui confiaient aux rédacteurs du Journal leurs notes de régie18. Lorsque ces dernières ont été perdues, les mises en scène du Journal des Comédiens restent comme des traces fiables et uniques des conditions scéniques pour la création des pièces19. La revue appuie en outre sa crédibilité en se targuant d’avoir soumis les notations aux auteurs pour vérification et approbation20.

Le Journal des Comédiens fait aussi figure d’instigateur de nouvelles pratiques de publication du texte dramatique, invitant les auteurs à consigner dans leurs pièces imprimées le numérotage pour la position des acteurs en scène, ainsi que les passades et changements de position. Le zèle est même poussé très loin : « […] comme ces Messieurs ne pourraient se charger eux-mêmes d’un tel travail, nous nous sommes engagés envers eux à le faire faire sur leurs manuscrits par un de nos rédacteurs. […] Nous devons cependant prévenir nos abonnés que s’il se présentait des difficultés à ce numérotage dans la brochure, nous le leur donnerons à part21. » Ainsi, c’est probablement sous l’impulsion de la presse théâtrale que l’on commence à voir apparaître en notes de bas de pages, et de façon plus systématique, ce procédé de repérage des positions dans les éditions des pièces, notamment celles du « Magasin théâtral22 ».

D’ailleurs, lorsque la Revue du Théâtre lancera ses mises en scène en 1834, elle se verra vite obligée de s’aligner sur la pratique des brochures : « [n]ous avons, à tort, indiqué jusqu’ici les indications prises à la droite du spectateur ; c’est à la droite de l’acteur […] que nous parlerons désormais ; comme les mises en scène sont spéciales pour les artistes, il est juste que nous avisions à toutes les facilités qui peuvent leur être données dans nos indications23. » Cette note témoigne d’un glissement dans la politique éditoriale de la revue : d’abord envisagées pour rencontrer le point de vue du lecteur-spectateur, les mises en scène se tournent désormais vers celui des artisans du spectacle. Ce parti pris de présentation de l’espace ludique rencontre ainsi les choix des éditeurs des textes, qui précisent souvent en note que le premier personnage inscrit « tient toujours la gauche du spectateur24. »

Le privilège accordé au travail scénique prend une nouvelle tournure l’année suivante, lorsque paraît un avis spécial où la Revue du Théâtre déclare vouloir « concilier les intérêts de la double classe de [ses] lecteurs25. » Il est décidé de publier les mises en scène séparément, parce qu’elles « […] sont la chose du monde la plus utile pour les directeurs et artistes, et la plus inutile pour ne pas dire fastidieuse pour les gens du monde26. » Et les rédacteurs d’ajouter : « [n]ous atteindrons ainsi deux buts, nous épargnerons aux gens du monde le désagrément d’avoir dans un recueil fait pour eux, des parties étrangères, et nous trouverons le moyen d’être plus tôt et plus complètement utiles aux artistes27. » Or, si durant quelques semaines des mises en scène sont effectivement publiées en supplément (comme par exemple celle du Chatterton de Vigny28), très vite on les retrouve à nouveau imprimées dans les pages de la revue. Ce retour à la première manière pourrait avoir des raisons pratiques ou économiques, mais on découvre au détour d’une note d’autres motivations possibles, comme peut-être le désir d’influencer davantage la programmation des théâtres de province. À l’occasion de la publication de la mise en scène du vaudeville Clémentine29, les éditeurs ajoutent en effet la remarque suivante : « [c]ette petite pièce […] exige peu de frais […]. Nous sommes étonnés de ne pas la voir jouer en province ; c’est pour engager les directeurs à la monter que nous en donnons la mise en scène30. » Les autres revues adoptent la même tendance incitative. Le phénomène d’interaction paraît donc évident. Si les directeurs des théâtres abonnés aux revues réclament les mises en scène qu’ils envisagent d’entreprendre, il arrive qu’à leur tour les revues suggèrent des pièces moins attendues. La vie théâtrale, sous tous ses aspects, guide les choix éditoriaux et les changements de dernière minute ; par exemple, on décide de repousser la parution de la mise en scène d’Une famille au temps de Luther, tragédie de Casimir Delavigne (Théâtre-Français, 12 avril 1836), au profit de celle d’un vaudeville de Bayard et Dumanoir, « parce que le départ d’Achard et de Mlle Déjazet pour la province la rend indispensable aux directeurs des théâtres31. »

Au-delà des préoccupations d’actualité qui règlent la sélection des pièces dont la mise en scène connaît les honneurs de la publication, les modalités de parution posent problème, car les rédacteurs semblent être tiraillés entre la volonté de fournir des descriptions complètes dans les meilleurs délais, et les contraintes dues à un espace typographique limité, difficilement conciliables avec des données textuelles abondantes. Tout comme le Gil Blas l’avait fait quelques années plus tôt, la Revue du Théâtre opte bientôt pour une publication sérielle : « […] à chaque pièce […], nous consacrerons trois articles. Le premier, l’analyse et le jugement de l’ouvre [sic]. Le deuxième, régie et direction, donnera l’explication des décorations et la position en scène. Le troisième, acteurs, contiendra le détail des costumes et les réflexions, quand il y aura lieu, sur chaque rôle32. » C’est ainsi que la première partie se veut critique littéraire et dramatique, pour les lecteurs ; les articles ultérieurs concernent en revanche le travail de la transposition scénique et du jeu33.

À partir de 1836, le Moniteur des Théâtres semble se poser en concurrent sérieux car il publie, en une seule fois, des « Notes pour la mise en scène » des ouvrages dont il propose la recension, suivant deux rubriques : « Décorations, ameublement, accessoires », pour chaque acte, et « Personnages, emplois, caractères, costumes », pour chaque personnage34. Une comparaison entre les mises en scène qui paraissent presque aux mêmes dates dans différents organes permet du reste de vérifier l’exactitude et la concordance des données, mais aussi de constater l’élasticité des précisions. Par exemple, pour La Duchesse de la Vaubalière, drame de Balisson de Rougemont (Porte Saint-Martin, 25 juin 1836), la Revue du Théâtre mentionne pour l’acte II « [u]n salon ouvert au fond sur un parc à droite et à gauche35 », tandis que le Moniteur et la Gazette des Théâtres proposent « un riche salon carré, plafonné, orné de colonnes, de dorures et de peintures […], ouvrant sur un parterre orné d’orangers36. » Même chose pour l’ameublement : une simple « table » dans la Revue du Théâtre, est décrite ailleurs comme une « table carrée, couverte d’un tapis vert broché d’or. Sur la table écritoire, plumes, sonnette37. »

On entre donc dans l’ère d’une restitution minutieuse des moindres détails matériels. Mais un coup d’œil sur les indications scéniques des brochures rend tangibles certains écarts. Tandis que la Revue du Théâtre semble dans un premier temps s’aligner sur le texte didascalique parfois lacunaire, les autres périodiques proposent une foule de renseignements supplémentaires, un enrichissement global, capables de mieux guider le décorateur-scénographe mais aussi l’espace mental du lecteur38. En revanche, souvent l’on ne se préoccupe plus du numérotage pour les positions des acteurs, contrairement à ce que la Revue du Théâtre continue de faire systématiquement. Cette dernière semble donc avoir joué un rôle majeur pour la prise de conscience et le respect de ce que l’on appelle aujourd’hui la proxémique. Toutefois, s’imposait aux yeux d’autres rédacteurs la nécessité de ne pas s’y assujettir, comme le laisse entendre une notice de la Gazette des Théâtres qui signale un changement de paradigme quant à la manière d’appréhender l’ordonnancement des positions des acteurs en scène, attestant un début de démarquage par rapport aux traditions:

[l]es auteurs ayant actuellement le soin d’indiquer dans leurs ouvrages imprimés et au commencement de toutes les scènes, les positions de chaque personnage, il serait inutile de joindre ce travail à nos notes. D’ailleurs, aujourd’hui, ces positions ne sont point aussi strictement observées qu’autrefois, et il serait presque puéril de les indiquer comme règles dont on ne saurait s’écarter. Les acteurs de Paris s’y conforment peu, et le plus souvent dans l’intérêt de l’art et de la vérité39.

Tous les journaux s’accordent néanmoins pour donner des conseils sur le jeu. La Revue du Théâtre, notamment, fournit certaines notes qui laissent entrevoir un souci de guider la posture des comédiens. Un exemple suffira : « [n]ous ne saurions trop recommander aux actrices de la province qui joueront ce rôle l’air de résignation qui doit donner à la douleur de Caroline une teinte de calme et de douceur40. » La Revue du Théâtre se distinguera surtout de toutes les autres en proposant des planches en couleur, notamment pour les costumes41. Elle contribue enfin à la reconnaissance d’une fonction nouvelle, non pas, comme on pourrait le croire dans ce contexte, celle de metteur en scène, mais celle de « metteur en page », autrement dit le transcripteur de la mise en scène. En effet, alors que les notations étaient jusque-là publiées de façon anonyme, la revue officialise cette fonction : à partir de 1836 (à l’occasion du Kean de Dumas), toutes les mises en scène sont signées J. Goizet42, qui semble avoir été dépêché par la revue pour assister aux représentations et en prendre note43. Goizet peut de fait apparaître comme le devancier d’une profession devenue indispensable à l’art scénique moderne, celle d’assistant chargé de la notation de la mise en scène. Cette fonction fut donc en quelque sorte initiée par les journaux.

L’exemple le plus établi de l’autorité et de la reconnaissance du transcripteur de la mise en scène reste celui de Louis Palianti. Le célèbre régisseur de l’Opéra-Comique donne aux mises en scène imprimées une ampleur et une précision encore jamais vues, grâce notamment à l’incorporation des schémas pour la plantation du décor à chaque acte (ce qu’à l’époque on nomme le « plan géométral »), grâce aussi à des renseignements techniques pour le bon fonctionnement des trucages, ou encore à une série de conseils pour le jeu des acteurs. Inutile de s’attarder ici sur ce qui deviendra la Collection des mises en scène d’opéras et d’opéras-comiques, bien connue et largement étudiée44, dont Palianti fit publier onze volumes contenant environ 200 mises en scène. L’idée de constituer une collection sous forme de recueils apparaît certes décisive pour l’histoire des relevés scéniques et leur préservation, mais il ne faudrait pas perdre de vue qu’une part assez importante de ces mises en scène fut publiée au préalable en fascicules dans la Revue et Gazette des Théâtres, organe qui est le résultat de la fusion en 1838 de la Gazette des Théâtres et de la Revue du Théâtre. Dans un premier temps, cette nouvelle revue poursuit la tradition en publiant des mises en scène transcrites par Joseph Goizet. Et c’est seulement à partir de 1839 que seront publiées en supplément celles de Palianti45, parmi lesquelles figurent aussi des drames et des comédies, ce que le titre du recueil pourrait faire oublier. C’est donc la presse qui servit de support et de tremplin à l’élaboration du projet de Palianti. À noter également que l’introduction des plans géométraux, qui montrent la scène de face, oblige, sauf exceptions que Palianti prend soin d’indiquer, à revenir à une prise en compte des données du point de vue du spectateur.

Durant presque vingt ans, Palianti ne semble pas avoir rencontré de concurrents dans la presse, ce qui explique sans doute pourquoi les historiens du théâtre ont jusqu’ici négligé les mises en scène sur papier-journal postérieures aux premières séries du régisseur de l’Opéra-Comique. Pourtant l’initiative d’un Album théâtral par Alexandre May, sous forme de petits fascicules en supplément de l’hebdomadaire La Presse théâtrale entre 1855 et 1857, mérite d’être remarquée46. À notre connaissance, elle n’a jamais fait l’objet d’études particulières, malgré sa richesse47. Au moment du lancement, la position de principe du journal en présente tout l’intérêt :

[…] M. Alexandre May, qui a dirigé plusieurs scènes de premier ordre en province et à l’étranger, a pensé que ce serait rendre un service à l’art […], que de s’instituer en quelque sorte spectateur-sténographe parisien de toutes les nouveautés lyriques et dramatiques qui, par leur valeur ou leur importance scénique, seraient appelées à obtenir des succès sur les scènes de province et de l’étranger : Indications et plans de décors, pose des meubles, jeux de scène, traditions, description des costumes, notes d’accessoires, conseils et observations sur la mise en scène, tout cela, fidèlement recueilli et autographié par lui, sera adressé dans le mois de la première représentation à Paris, à tout abonné du journal La Presse théâtrale, qui, au prix de son abonnement annuel, ajoutera celui de vingt francs48.

Est alors soulignée l’économie réalisée par rapport au prix des mises en scène fournies par les administrations théâtrales. Si le directeur de la scène à la Comédie-Française se montra coopératif, permettant à May de voir les pièces plusieurs fois pour lui garantir une transcription rigoureuse, quelques administrateurs parisiens exprimèrent immédiatement des résistances : ils prétendaient au monopole de la publication des mises en scène des pièces montées sur leurs théâtres. C’est pourquoi May eut à se montrer rassurant dès la deuxième livraison : « […] lorsque ni l’auteur, ni le metteur en scène, ne feront imprimer [l]es indications, nous croirons être dans notre droit en les fournissant aux abonnés […]. Nous ne publierons donc que des mises en scènes inédites49. » Cette querelle par journal interposé témoigne d’une prise de conscience des droits du créateur du spectacle, à tout le moins de son éditeur, et aide à mieux saisir l’évolution et les enjeux de la propriété artistique et intellectuelle en matière de mise en scène50.

Le travail minutieux d’Alexandre May se présente aujourd’hui comme une contribution majeure, dans la mesure où il propose des pièces dont les mises en scène ne parurent jamais sous forme de livret, notamment des drames joués à la Gaîté et à l’Ambigu-Comique. May justifie par ailleurs le choix d’une publication par autographie, moins onéreuse, et qui laisse plus de liberté au scripteur pour exposer « l’épaisseur de signes51 » de la mise en scène. Contrairement à Palianti, qui opte pour le plan géométral, May croque en finesse les décors pour chaque acte ou tableau en même temps qu’il offre une description parlante des moindres aspects du mouvement scénique et du jeu. Son travail semble avoir été apprécié : le directeur de La Correspondance théâtrale, Deyla, lui fit parvenir une lettre dont un extrait est éloquent : « [v]otre mise en scène de Péril en la demeure [comédie d’Octave Feuillet, Théâtre-Français, 19 avril 1855] est si parfaitement faite et expliquée d’une manière si claire, que le régisseur le plus inepte pourra monter cet ouvrage ; en un mot, c’est peut-être la première que je vois rédigée avec simplicité depuis trente-et-un ans que je suis au théâtre52. » Est-ce à dire que May avait égalé, sinon surpassé Palianti, et que son tort face à la postérité fut peut-être de privilégier la saisie de pièces jouées sur les boulevards53 ?...

En 1864 et 1865, Le Manteau d’Arlequin, dirigé par Lucien Huard, lance un projet semblable à celui d’Alexandre May tout en renonçant à l’autographie, offrant une lecture plus nette et un décryptage plus aisé. Le numéro spécimen expose en outre une stratégie éditoriale assez judicieuse :

Notre numéro de chaque semaine contiendra, indépendamment des huit pages de mises en scène quatre grandes pages dont la moitié sera consacrée à nos correspondants de province.

Nous avons adopté, pour les mises en scène, le format grand in-octavo, parce que nous l’avons trouvé le plus gracieux, et en même temps le plus commode.

Cette partie du journal sera paginée comme un livre, c’est-à-dire que le no 2 commencera à la page 9, ce qui nous dispensera de mettre chaque fois : la suite au prochain numéro — lorsque […] nous ne pourrions faire entrer une pièce entière dans nos colonnes.

De cette manière, il suffira de détacher cette feuille, de la plier en quatre à chaque numéro, pour avoir, à la fin de l’année, la matière d’un magnifique volume de plus de 400 pages, qui n’aura presque rien coûté, et qui sera pour les artistes un vade-mecum très-précieux.

Nous joindrons gratuitement à l’envoi du dernier numéro de l’année d’abonnement, une table des matières, et deux feuilles de titres et couverture qui permettront de le faire relier54.

Au fil du siècle, et sur l’exemple de Palianti, les mises en scène sur papier-journal deviennent donc des recueils en devenir, de futurs volumes de bibliothèque, au demeurant assez rares, mais plus pratiques à consulter que les pages éparses de revues oubliées.

Un foyer synergétique

Au-delà de leur intérêt quant à leurs modalités éditoriales et leur présentation formelle, les notations de mises en scène publiées dans les journaux apparaissent dès le début comme le point névralgique d’un système d’interactions entre presse, monde du théâtre et monde de l’édition théâtrale, qui se complètent et se font une publicité réciproque.

Il a pu certes arriver, dans les premiers temps, que les revues mettent en avant la supériorité de leurs indications sur celles des brochures. Dans le Gil Blas, cette note l’illustre bien : « [a]u commencement de la ronde, Sara entre par la gauche (la brochure ne l’annonce pas, c’est à tort)55. » Mais très vite, éditeurs de pièces et éditeurs de journaux ont compris tout l’intérêt qu’il pouvait y avoir à collaborer, chacun semblant trouver un moyen de s’épargner un travail typographique fastidieux. Le journal peut renvoyer à la brochure, par exemple avec cette formule récurrente : « [l]e petit nombre de personnages nous dispense d’indiquer les principales positions, assez détaillées sur la brochure », ou bien encore lorsque le magasin des accessoires est envahissant : « [l]es accessoires tels que lettres, portraits, bourses, sont en grand nombre et la brochure seule peut les indiquer. Nous dirons seulement ici, qu’au premier tableau, le punch se sert dans une grande jatte de fayence [sic] anglaise blanche et bleue56. » Inversement, les brochures des pièces imprimées renvoient, pour la « mise en scène exacte », à la revue qui l’a publiée. Ce simple constat de complémentarité suggère qu’une étude historique sérieuse de la mise en espace du texte de théâtre ne saurait faire l’économie d’une prise en compte des mises en scène sur papier-journal, lorsqu’elles existent57.

Les ressources iconographiques sont quant à elles l’objet de références régulières de la part des journaux. Il n’est pas rare de trouver, dans les textes des mises en scène, des renvois précis à d’autres périodiques ayant publié les dessins du décor ou des costumes. À cet égard, la Revue et Gazette des Théâtres a pour habitude de faire une publicité sans retenue au journal L’Illustration. L’on retrouve parfois, après les descriptions des plantations de décor pour un acte, ce type d’insertion : « Le Journal L’Illustration du 8 nov. 1845, no 141, volume vi, p. 148, donne un dessin exact de cette décoration58. »

Enfin, ce sont tous les professionnels du théâtre qui bénéficient d’une publicité clandestine par l’intermédiaire des paratextes des mises en scène imprimées, qui leur fournissent une clientèle et contribuent à assurer leur renommée. Sans doute n’a-t-on pas assez réfléchi à ces petites notes au bas des pages des mises en scène et à leur impact sur le fonctionnement interne d’une industrie en train de se mettre en place, par un phénomène d’interdépendance de ses différents acteurs : créateurs de costumes, compositeurs, décorateurs, machinistes et truquistes, mais encore graveurs, éditeurs de partitions ou de textes, tous ont leur part de publicité grâce aux mises en scène sur papier-journal, entre les lignes desquelles on recommande aux intéressés de s’adresser directement aux spécialistes de telle ou telle partie du spectacle. Les agences théâtrales, qui fournissent de nombreux supports, y trouvent elles aussi leur compte. Pour l’acte II des Mousquetaires de Dumas en 1845, par exemple, la mise en scène publiée dans la Revue et Gazette des Théâtres signale qu’« il existe une maquette de cette décoration. Elle se trouve chez MM. les correspondants dramatiques au prix de six francs59. » Il est patent que tout un univers professionnel, au sein duquel les préoccupations matérielles et artistiques sont en train d’évoluer, s’épanouit par notations scéniques interposées. Le rôle de la presse s’est avéré déterminant dans ce processus, au point que des hommes de théâtre ont apporté leur expertise aux revues, qui servaient souvent d’intermédiaires pour transmettre les matériaux et documents utiles aux théâtres de province :

[…] pour parer à l’insuffisance des moyens qu’offrent quelquefois les notes et dessins de mise en scène pour les pièces à grand spectacle, nous avons accueilli avec empressement l’adjonction à notre entreprise d’une personne employée depuis son enfance dans les théâtres de Paris, qui se chargera d’établir et d’expédier à MM. les Directeurs de spectacles, à des prix modérés, et sur la demande qu’ils en feront au bureau du Journal, les dessins des décorations, accessoires praticables, et les croquis exacts de chaque costume.

Les petits modèles, confectionnés en bois, de toutes les transformations, gloires, chars, surprises, en un mot, de toutes espèces de machines servant dans les pièces à spectacle, moyen beaucoup plus sûr pour établir les devis de dépenses que tous les plans dessinés60.

En matière d’exécution théâtrale, les revues, dont l’objectif déclaré est de rendre service à l’Art, non seulement collaborent directement avec les hommes de théâtre, mais encore, elles oublient souvent de se concurrencer pour signaler les ressources existant ailleurs que dans leurs pages et susceptibles de contribuer à une meilleure compréhension du travail scénique.

En tablant sur la publication des mises en scène, les journaux s’adressent certes aux théâtres de province, mais ils visent indirectement un lectorat potentiel varié : spectateurs désireux de retrouver noir sur blanc la mémoire de la représentation, absentéistes prenant connaissance après-coup du spectacle qu’ils ont manqué, amateurs curieux de secrets de fabrication dévoilés, ou encore lecteurs susceptibles d’être tentés d’aller voir jouer les pièces. Ainsi ces publications peuvent-elles alimenter un système d’interactions entre monde du théâtre et monde de la presse, puisque les spectateurs sont aussi des lecteurs, acheteurs de revues, et que les lecteurs sont invités à aller prendre place au théâtre pour y découvrir visuellement ce que le journal propose à leur imagination. Mais ces interactions doivent également être observées du point de vue des intérêts de la presse à fidéliser son double lectorat, et du point de vue de ses ambitions à jouer un rôle d’acteur et de propagateur d’une culture théâtrale émergente, non plus celle d’un théâtre textocentriste, mais celle d’un théâtre où l’ordonnancement scénique et l’écriture du spectacle deviennent des éléments primordiaux.

Les mises en scène sur papier-journal apparaissent ainsi comme l’espace privilégié d’une synergie où presse et scène trouvent à s’alimenter mutuellement tout en irriguant les fantasmes créés par un art en plein essor. Elles témoignent d’une nouvelle donne dans l’histoire du théâtre, de ses professionnels et de son public, et, peut-être avant tout, dans l’histoire de ses supports écrits. Quelques-uns de ces témoignages restent dans les pages des périodiques comme les rares traces à partir desquelles l’historien du théâtre peut rêver de capter les bribes du passé pour suivre le fil de l’éphémère.

(Université d’Uppsala)

Annexes

Image1

Notes pour la mise en scène de La Maréchal Brune, ou la Terreur de 1815, drame historique en quatre tableaux de Dupeuty et Fontan (Porte Saint-Martin, 22 janvier 1831), parues dans le Journal des Comédiens, le 20 février 1831.

Image2

Planche signée Alfred Albert pour les costumes de Don Juan de Marana, ou la Chute d’un ange, mystère en cinq actes et sept tableaux d’Alexandre Dumas père (Porte Saint-Martin, 30 avril 1836), publiée dans la Revue du Théâtre (1836, t. 9).

Image3

Extrait de la mise en scène de La Grâce de Dieu, ou la Nouvelle Fanchon, drame en cinq actes d’Adolphe Dennery et Gustave Lemoine (Théâtre de la Gaîté, 16 janvier 1841), transcrite par Louis Palianti et publiée en supplément de la Revue et Gazette des Théâtres, 11 mars 1841.

Image4

Extrait de la mise en scène de La Question d’argent, comédie en cinq actes d’Alexandre Dumas fils (Théâtre du Gymnase, 31 janvier 1857), transcrite par Alexandre May (Imprimerie lithographique Lanoüe), et parue en supplément de l’Album théâtral, 2e année, 1er mars 1857, no 18.

Image5

Extrait de la mise en scène des Pauvres de Paris, drame en sept actes d’Édouard Brisebarre et Eugène Nyon (Ambigu-Comique, 5 septembre 1855), transcrite par Alexandre May et parue en supplément de La Presse théâtrale, 2e année, 3e livraison, 28 septembre 1856.

Image6

Extrait de la mise en scène des Pauvres de Paris, drame en sept actes d’Édouard Brisebarre et Eugène Nyon (Ambigu-Comique, 5 septembre 1855), transcrite par Alexandre May et parue en supplément de La Presse théâtrale, 2e année, 3e livraison, 28 septembre 1856.

Image7

Extrait de la mise en scène de Rocambole, drame en cinq actes et huit tableaux d’Anicet-Bourgeois, Ponson du Terrail & Blum (Théâtre de l’Ambigu-Comique, 26 août 1864), publiée dans Le Manteau d’Arlequin, éd. Charles-Lucien Huard, 1864.

Notes

1  Il ne faut pas les confondre avec les livrets scéniques publiés de façon indépendante par certains hommes de théâtre, comme par exemple Albertin, Solomé, Duverger, Palianti, etc.

2  Voir Marie-Antoinette Allevy, La Mise en scène en France dans la première moitié du dix-neuvième siècle, Paris, Droz, 1938, p. 220-226. L’auteur propose une liste précieuse et imposante de mises en scène publiées dans les journaux durant cette période ; cette liste est cependant loin d’être exhaustive car elle ne tient pas compte de certaines revues pourtant décisives. Sauf indication contraire, les travaux cités sont publiés à Paris.

3  À commencer par l’article phare de Gösta M. Bergman, « Les agences théâtrales et l’impression des mises en scène aux environs de 1800 », Revue d’Histoire du Théâtre, 1956, p. 228-240. Voir aussi l’enquête de Arne Langer, Der Regisseur und die Aufzeichnungspraxis der Opernregie im 19. Jahrhundert, Frankfurt/M., Peter Lang, 1997.

4  Souvent, ces études vont de pair avec celles de documents manuscrits. Voir en particulier les articles de Marvin Carlson « Hernani’s Revolt from the Tradition of French Stage Composition », Theatre Survey, vol. 13, 1972, p. 1-27, et « French Stage Composition from Hugo to Zola », Educational Theatre Journal, vol. 3, no 4, 1971, p. 363-378.

5  Voir les nombreux travaux pionniers de Robert H. Cohen, comme par exemple Cent ans de mise en scène lyrique en France (avec Marie-Odile Gigou), New York, Pendragon Press, 1986. Voir également Arnold Jacobshagen, « Staging at the Opéra-Comique in Nineteenth-Century Paris : Auber’s Fra Diavolo and the "livrets de mise-en-scène" », Cambridge Opera Journal, vol. 13, no 3, 2001, p. 239-260, ou encore « Analyzing Mise-en-Scène. Halévy’s La Juive at the Salle Le Peletier », Annegret Fauser & Mark Everist (dir.), Music, Theater and Cultural Transfer: Paris, 1830-1914, Chicago, The University of Chicago Press, 2009, p. 176-194. Nous renvoyons à ces travaux pour d’autres références bibliographiques sur l’opéra et l’opéra-comique, trop nombreuses pour être mentionnées ici.

6  Voir à ce sujet Olivier Bara « Les livrets de mise en scène, commis voyageurs de l’opéra-comique en province », Actes du Colloque Un siècle de spectacles à Rouen (1776-1876), dir. Florence Naugrette, publication en ligne sur le site du CÉRÉdI de l’Université de Rouen en 2008 (www.ceredi.labos.univ-rouen.fr/public/).

7  D’où le bornage temporel de cet article, ce qui n’invalide pas pour autant une possibilité de publications antérieures à 1828 ou postérieures à 1865 dans des revues non encore étudiées. Il conviendrait d’ailleurs de mener une enquête sur les balbutiements du phénomène au XVIIIe siècle. En effet, Gösta M. Bergman signale que, dès 1786, la revue Costumes et annales des grands théâtres de Paris, dirigée par Levacher de Charnois, et qui assurait la correspondance avec les théâtres de province, prodigua des conseils de mise en scène dans un but pédagogique et esthétique : gravures, dessins de costumes et d’accessoires, positions des acteurs, analyses de rôles, etc. Voir Regihistoriska studier. Skrifter utgivna av Föreningen Drottningholmsteaterns Vänner, no IX, Norstedt & Söner, Stockholm, 1952, p. 51.

8  La Revue dramatique, politique et littéraire, octobre 1828, p. 10.

9  Cette revue publia également la mise en scène de Walstein, tragédie de Pierre Liadières.

10  L’Observateur des sciences, de la littérature, des Arts […], 12 octobre 1828, no 137. Lorsque nous ne donnons pas la page d’un périodique, il s’agit de la une.

11  Gil Blas, 10 janvier 1829, no 150.

12  Cette rubrique concerne les déplacements et les gestes des acteurs, indiqués en fonction des répliques qui les précèdent ou qui les accompagnent.

13  Celle-ci est comme on sait attribuée à Louis Véron dans sa Revue de Paris, pour la publication des romans-feuilletons, mais le journal ne commença à paraître que quelques mois après le Gil Blas.

14  Gil Blas, 10 octobre 1829, no 204, p. 4.

15  Une notice de La Presse théâtrale du 17 juin 1855 (p. 2) peut servir d’exemple éloquent à cet égard : « [l]a deuxième livraison […] contiendra l[a] mis[e] en scène de : […] L’Hiver d’un homme marié, charmant vaudeville nouveau par MM. F. Brisebarre et Nyon [Théâtre du Vaudeville], qu’aucun théâtre de province ne pourra se dispenser de monter. La mise en scène fidèle de cet ouvrage très-compliqué nous a paru la condition sine qua non d’un grand succès ».

16  À notre connaissance, ce document-témoin de la création d’Hernani, paru avant l’édition originale, n’a jamais été étudié par les spécialistes. Nous nous proposons de l’analyser prochainement.

17  Au bout de quelques années, le Journal des Comédiens dut renoncer pour des raisons économiques à une publication par suppléments, et incorpora ses mises en scène à la suite des recensions des pièces, en notes volumineuses présentant une typographie minuscule.

18  Comme l’attestent certaines mentions explicatives : pour Hernani, par exemple, il est spécifié que les notes sont fournies par Albertin, directeur de la scène au Théâtre-Français (voir le Feuilleton du Journal des Comédiens, 28 février 1830, no 11).

19  Par exemple, pour la pièce à grand spectacle Henri V et ses compagnons, par Romieu et Alphonse Royer (Théâtre des Nouveautés, 27 février 1830), c’est le régisseur-général du Théâtre des Nouveautés, Armand, qui fournit ses notes (voir ibid., 4 mars 1830, no 12).

20  Voir la notice du 23 juin 1831, no 305, p. 8.

21  Journal des Comédiens, 17 déc. 1829.

22  Les éditeurs des textes précisent souvent que « les changements de position dans le courant des scènes sont indiqués par des notes au bas des pages ».

23  Revue du Théâtre, 1834, t. 1, p. 207 (mise en scène de Judith et Holopherne, épisode de la première guerre d’Espagne, vaudeville de Théaulon, Overnay et Nezel, Théâtre du Palais Royal, 25 août 1834). La Revue avait au préalable annoncé : « […] nous indiquerons, dans les scènes principales […], les entrées et les sorties, avec la position de chaque acteur, marquée par un chiffre explicatif, en y joignant des dessins » (Revue du Théâtre, 1834, t. 1, p. 63-64).

24  Cette mention figure sous la liste des personnages ou en note de bas de page à la première scène de maintes pièces publiées. Parfois, il est question de « la droite de l’acteur ».

25  Revue du Théâtre, 1835, t. 3, p. 319.

26  Ibid.

27  Ibid.

28  Publiée en supplément du no 78 (1835, t. 1), ainsi que dans la Gazette des Théâtres du 8 mars 1835.

29  Comédie-vaudeville de Jacques Ancelot et Jules Cordier, Théâtre du Palais Royal, 7 décembre 1836.

30  Revue du Théâtre, 1836, t. 8, p. 143.

31  Ibid., p. 327.

32  Revue du Théâtre, 1834, t. 2, p. 190.

33  Les catégories choisies trahissent certains tâtonnements ; le fait par exemple que l’on traite séparément les costumes et les décors prouve que l’on ne réfléchit pas encore à une approche sémiotique d’ensemble, et que l’on privilégie l’aspect pratique, le travail ciblé sur chaque élément particulier du spectacle et des rôles.

34  Le journal garde le système d’indications prises de la droite du spectateur, contrairement à la majorité des autres revues. Un autre organe, L’Agent dramatique, paru quelques mois en 1835, avait également tenté de proposer des mises en scène en une seule fois, et, ce qui était judicieux, sur une seule page. Voir la mise en scène d’Angelo, tyran de Padoue de Victor Hugo, parue le 11 juin 1835, et reproduite telle quelle avec mention de la source dans la Revue du Théâtre (1835, t. 3, p. 285).

35  Revue du Théâtre, 1836, t. 9, p. 287.

36  Moniteur des Théâtres, 15 juillet 1836, p. 220.

37  Ibid. La Gazette écrit ici « brodé d’or ».

38  Pourtant, on trouve parfois des mises en scène présentées à l’identique dans la Revue du Théâtre et dans la Gazette des Théâtres. Il est parfois difficile de déterminer l’antériorité de l’une ou de l’autre, ce qui explique peut-être pourquoi la Revue du Théâtre lèvera l’anonymat de ses mises en scène à partir de la publication des notes pour le Kean de Dumas (voir infra).

39  Gazette des Théâtres, 3 avril 1834, no 595.

40  Pour La Lectrice, ou une folie de jeune homme, vaudeville de Jean-François Bayard (Gymnase, 16 septembre 1834), Revue du Théâtre, 1834, t. 1, p. 303.

41  Voir l’annonce « Gravures et mises en scène de la Revue du Théâtre »,1835, t. 3, p. 319, où il est signalé que « les personnages des principales pièces seront faits d’après nature et par des artistes en renom [comme] MM. Henri Monnier et Jacques Arago ». L’aquafortiste Alfred Albert, qui deviendra dessinateur de costumes pour l’Opéra en 1856, participa aussi au projet. Ces planches en couleur ne se retrouvent pas dans tous les exemplaires des bibliothèques. C’est dans les numéros reliés conservés à la Bibliothèque de la S.A.C.D. que nous avons pu les contempler. Qu’il nous soit permis de remercier ici Florence Roth pour son chaleureux accueil qui a facilité nos recherches.

42  Il s’agit de Joseph Goizet, qui publiera le Dictionnaire universel du théâtre.

43  Contrairement à ce qui se passait au Journal des Comédiens où les régisseurs fournissaient leurs notes (voir supra). La Gazette des Théâtres publie mot pour mot la mise en scène de Goizet pour Kean, sans toutefois mentionner sa source.

44  Voir Christian H. Wolff, « Die Regiebücher des Louis Palianti für die Pariser Oper 1830-1870 », Maske und Kothurn, no 26, heft 1-2, 1980, p. 74-84, ainsi que H. Robert Cohen, « La conservation de la tradition scénique sur la scène lyrique en France au XIXe siècle : Les livrets de mise en scène et la Bibliothèque de l’Association de la Régie Théâtrale », Revue de Musicologie, t. 64e, no 2, 1978, p. 253-267. Isabelle Moindrot a proposé une mise au point sur cette collection : « Après la première, les reprises. Réflexions sur la mise en scène lyrique en France au xixe siècle », Mara Fazia & Pierre Frantz (dir.), La Fabrique du théâtre. Avant la mise en scène (1650-1880), Paris, Desjonquères, Collection « L’Esprit des lettres », 2010, p. 408-424.

45  La communauté des spécialistes admet 1837 comme date du début de cette collection ; néanmoins, nous croyons qu’il pourrait s’agir d’une habitude qui s’est perpétuée suite à une adhésion hâtive aux propos de Palianti à qui la mémoire semble faire défaut lorsqu’il mentionne cette date dans un avis de 1862 (cet avis est cité par Arne Langer, op. cit., p. 221). En effet, la mise en scène du Brasseur de Preston (opéra-comique de Brunswick, de Leuven et Adam, 1838), dont le fascicule, signé Palianti, paraît fin janvier 1839 (à Paris, au Bureau de la Revue et Gazette des Théâtres), prouve que la collection fut bien lancée l’année 1839 : « Un ouvrage, donnant la mise en scène exacte des pièces représentées sur les théâtres de Paris, manque entièrement dans les régies des théâtres des départements et de l’étranger. Ce Recueil, nous voulons le publier. La mise en scène du Brasseur de Preston le commence. Chaque année, ces mises en scène, au nombre de vingt-cinq ou trente, […] formeront un volume in-8o de 250 pages à peu près, qui se vendra au bureau du journal […] et chez MM. les correspondants dramatiques » (quatrième de couverture).

46  À partir de fin 1856, May optera pour un grand format à la taille du journal, lequel d’ailleurs prend le titre Album théâtral.

47  May a ensuite poursuivi ses publications sous le titre de collection « Mises en scène des meilleures pièces nouvelles jouées sur tous les théâtres de Paris », vendues à La Librairie des auteurs, 1866 et 1867, parmi lesquelles on trouve des pièces de Victorien Sardou et d’Anicet-Bourgeois & Paul Féval.

48  La Presse théâtrale, 29 avril 1855.

49  Ibid., 3 juin 1855.

50  Voir sur cette question Roxane Martin, « L’apparition des termes ‘mise en scène’ et ‘metteur en scène’ dans le vocabulaire dramatique français », La Fabrique du théâtre. Avant la mise en scène (1650-1880), op. cit., p. 19-31, ainsi que « La ‘naissance’ de la mise en scène et sa théorisation », Roxane Martin & Marina Nordera (dir.), Les Arts de la scène à l’épreuve de l’Histoire. Les objets et les méthodes de l’historiographie des spectacles produits sur la scène française (1635-1906), Paris, H. Champion, Collection « Colloques, Congrès et Conférences », 2011, p. 155-172.

51  Célèbre formule de Roland Barthes pour parler de « théâtralité ».

52  La Presse théâtrale, 3 juin 1855, p. 2.

53  Parallèlement à son entreprise dans l’Album théâtral, May proposait des indications sur brochures annotées pour les pièces dont la mise en scène ne paraissait pas dans le journal. Celles-ci ne semblent pas avoir été conservées ; seul le hasard qui attend un chercheur chanceux, au détour d’une brocante ou dans la réserve d’une bibliothèque municipale, permettra peut-être un jour de mettre la main sur une de ces brochures annotées.

54  Le Manteau d’Arlequin : recueil de mises en scène, 1864, p. 4.

55  15 fév. 1829, no 157, p. 4, pour la mise en scène de Rochester, drame de Benjamin Antier et Théodore Nezel (Porte Saint-Martin, 17 janvier 1829).

56  Pour la mise en scène du Couvent de Tonnington, ou la Pensionnaire, drame de Anicet-Bourgeois et Victor Ducange (Théâtre de la Gaîté, 12 mai 1830), Feuilleton du Journal des Comédiens, 23 mai 1830, no 23.

57  Il faudrait dans un avenir aussi proche que possible pouvoir en proposer une liste complète avec références exactes, dans un catalogue muni d’une possibilité de recherche indexée.

58  Revue et Gazette des Théâtres, 30 octobre 1845, p. 125 (pour la mise en scène des Mousquetaires, drame d’Alexandre Dumas et Auguste Maquet, Théâtre de l’Ambigu-Comique, 27 octobre 1845, Acte II). Une telle note nous incite à penser que les gravures publiées dans les journaux ou même dans les brochures peuvent dans de nombreux cas être considérées comme un reflet fidèle du décor tel qu’il apparaissait sur scène lors des créations.

59  Ibid., p. 135.

60  Journal des Comédiens, 17 décembre 1829.

Pour citer ce document

Sylviane Robardey-Eppstein, « Les mises en scène sur papier-journal : espace interactionnel et publicité réciproque entre presse et monde théâtral (1828-1865) », Presse et scène au XIXe siècle, sous la direction de Olivier Bara et Marie-Ève Thérenty Médias 19 [En ligne], Mise à jour le : , URL: https://www.medias19.org/publications/presse-et-scene-au-xixe-siecle/les-mises-en-scene-sur-papier-journal-espace-interactionnel-et-publicite-reciproque-entre-presse-et-monde-theatral-1828-1865