La lettre et la presse : poétique de l’intime et culture médiatique

« Monsieur le rédacteur,… » ou quand les lecteurs de La Vérité prennent la plume. Analyse d’une correspondance, 1887-1888

Table des matières

DOMINIQUE MARQUIS

Cet article s’intéresse à la correspondance reçue par Jules-Paul Tardivel, le directeur de l’hebdomadaire québécois ultramontain La Vérité, en 1887 et 1888. Durant ces deux années, plusieurs dizaines de lettres ont été répertoriées dans le journal : elles contiennent des marques d’encouragement à l’endroit du directeur et elles témoignent aussi des préoccupations des lecteurs. Les lettres non publiées provenant de lecteurs et de correspondants réguliers de Tardivel ont été retracées dans divers fonds d’archives. Ces individus discutent avec lui de différents sujets, mais les questions socioreligieuses et politiques dominent nettement cette correspondance1. Parce que la correspondance adressée à un journal ou à son directeur est toujours le résultat d’une prise de parole ou le témoignage de la volonté d’ajouter sa voix, plus ou moins discrète, aux débats publics, j’ai choisi d’analyser à la fois les lettres publiées dans La Vérité et la correspondance privée adressée à Tardivel. Quand le directeur d’un journal d’opinion choisit de publier une lettre qui lui a été adressée, il le fait parce qu’elle sert son propos, parce qu’elle peut alimenter son argumentation. D’un autre côté, la lettre non publiée est tout aussi importante parce qu’elle témoigne de cet environnement à partir duquel un rédacteur élabore sa pensée et son journal.

Cette riche correspondance est un observatoire privilégié pour examiner les relations du directeur du journal ultramontain avec ses lecteurs et avec des individus qui partagent généralement ses opinions, à une époque où les ultramontains canadiens-français doivent sinon renoncer, du moins nuancer leur projet d’édification d’une société catholique dans laquelle l’Église serait non seulement la gardienne de la foi, mais serait aussi la gardienne de l’orthodoxie religieuse des gouvernements. L’analyse de cette correspondance permet aussi de mesurer comment les ultracatholiques canadiens-français peuvent, par l’intermédiaire de ce journal, s’inscrire dans la sphère publique et participer aux débats qui animent cette société catholique du tournant du XXe siècle.

Après avoir brièvement présenté Jules-Paul Tardivel et le contexte socioreligieux dans lequel il publie son hebdomadaire, nous porterons notre regard sur ses principaux correspondants afin de délimiter les contours de son réseau. Qui sont ces individus qui prennent la plume pour écrire au directeur d’un journal ultramontain ? L’analyse de la correspondance de Tardivel peut-elle mettre à jour un réseau ultramontain qui graviterait autour de lui ? Par la suite, nous analyserons les lettres publiées dans La Vérité, lettres qui jouent différents rôles dans le journal. De quoi lui parle-t-on ? Peut-on y déceler une sensibilité religieuse propre à cette époque ou à une manière particulière de comprendre et de vivre le catholicisme ? Nous terminerons cette première incursion dans la correspondance de Tardivel par les lettres dites privées, celles qui n’ont pas été publiées, mais qui ont certainement contribué à alimenter la réflexion du directeur du journal.

Jules-Paul Tardivel, journaliste ultramontain

Jules-Paul Tardivel est né aux États-Unis en 1851, d’un père français et d’une mère américaine et, à la suite du décès de sa mère, il a été éduqué par une tante très religieuse et un oncle, curé de Mount Vernon en Ohio. Cette éducation l’a profondément marqué. En 1868, il entame son cours classique au Séminaire de Saint-Hyacinthe, alors considéré comme un bastion de l’ultramontanisme et du patriotisme canadien-français, où il a été fortement influencé par l’abbé Joseph-Sabin Raymond, lui-même très proche de Mgr Bourget, évêque de Montréal2.

En juillet 1881, il publie à Québec le premier numéro de l’hebdomadaire La Vérité, un journal indépendant des partis politiques et entièrement dévoué à la défense du catholicisme intégral et de la nation canadienne-française. Alors âgé de 30 ans, Tardivel a déjà une bonne expérience du journalisme; il a travaillé dans plusieurs journaux, dont sept ans au journal Le Canadien, défenseur du Parti conservateur. Au sein de cette équipe, il a expérimenté différentes facettes du métier : tribune parlementaire, critique littéraire et débats sur les questions religieuses3.

En bon ultramontain, Tardivel prône une soumission entière des fidèles et de l’État à l’Église et à l’autorité du pape. Toute forme de libéralisme est exécrable à ses yeux, que ce soit le libéralisme radical incarné par le républicanisme français ou le libéralisme catholique d’un Lamennais. Tardivel s’acharne à dénoncer tout ce qu’il considère, à tort ou à raison, comme une expression du libéralisme. D’abord proche du Parti conservateur, il s’en éloigne peu à peu parce qu’il ne le juge pas assez intransigeant à l’endroit des libéraux.

Durant la deuxième moitié du XIXe siècle, sur la scène politique canadienne-française, un fossé s’est creusé entre les conservateurs et les libéraux alors que les valeurs se sont entrechoquées autour de différentes définitions de la nation où sauvegarde de la religion, de la langue et des traditions et promotion des idées plus progressistes ne font pas toujours bon ménage. Tardivel défend farouchement les valeurs traditionnelles et la nation canadienne-française catholique contre ce qu’il considère les volontés assimilatrices des Anglais – et des protestants4. Il sera même séduit par l’idée de l’indépendance du Canada français, idée qu’il traduira dans son roman d’anticipation Pour la patrie, publié en 1895.

L’intransigeance ultramontaine face au monde politique a néanmoins été freinée par des directives très claires de Rome : en 1877, la visite de Mgr Conroy, délégué apostolique, a permis d’atténuer plusieurs sources de tensions perceptibles au sein même de l’Église et de trancher un âpre débat : le libéralisme canadien n’est pas radical (ou ne l’est plus) et il ne constitue pas une menace pour l’Église catholique5. L’épiscopat canadien-français, plus particulièrement les évêques ultramontains Mgr Bourget et Mgr Laflèche de Trois-Rivières, est donc sommé de cesser toute forme d’ingérence indue en période électorale. Les ultramontains doivent respecter cette décision de Rome, mais ils en conservent une certaine amertume. Pour eux, les libéraux demeurent toujours suspects et ils les ont bien à l’œil.

Cette idéologie a laissé des marques profondes dans l’expression du sentiment religieux au Canada français6. Depuis les années 1840, les fidèles ont été invités à exprimer leur foi de plusieurs façons, que ce soit lors de grandioses processions de la Fête-Dieu, de pèlerinages ou de retraites ou par des signes permanents comme l’érection de croix de chemin. L’Église cherche toujours à mieux encadrer la population, surtout urbaine, et elle accroît ses interventions afin de s’assurer que les fidèles trouveront en son sein toutes les ressources nécessaires pour répondre à leurs besoins : les sociétés de tempérance, les confréries se multiplient7.

C’est dans ce contexte que Tardivel lance son journal. Grâce au soutien matériel et moral des jésuites, il réussit à livrer bataille jusqu’à son décès en 1905. Son fils Paul prendra alors la relève jusqu’en 1923. Grand admirateur de Louis Veuillot, Tardivel s’inspire abondamment du journal français L’Univers. Les deux hommes ont d’ailleurs plusieurs points en commun : tous deux sont d’origine modeste, ils sont les seuls maîtres de leur journal et pratiquement les seuls rédacteurs. Ils n’hésitent pas à critiquer les évêques et à apostropher directement les curés. Très combatifs, ils s’attaquent à tous les catholiques trop libéraux à leur goût et ils dénoncent les disciples de Montalembert, Dupanloup ou Lacordaire. Ils font preuve d’un grand rigorisme moral, ils détestent les romans, le théâtre et les comédiens et ils ne font aucune concession sur leurs principes8.

Le journal de Tardivel est sobre, même austère, à l’image des journaux d’opinion de son siècle. Le paysage médiatique dans lequel s’inscrit ce journal est pourtant de plus en plus varié. En effet, des journaux quotidiens apparaissent sur le marché et offrent aux lecteurs, de plus en plus nombreux, un contenu très varié. Ils recrutent ainsi de nouveaux lecteurs, mais ils prêtent aussi le flanc aux bien-pensants qui y trouvent encore plus de matière à critiquer. Tardivel ne se prive pas pour juger les autres journaux, quels qu’ils soient. Il porte un jugement sur leurs valeurs morales, sur leur goût trop prononcé du scandale, sur leurs choix politiques. Peu de journaux trouvent grâce à ses yeux, libéraux comme conservateurs; même certaines publications ouvertement catholiques, comme Le Courrier du Canada, font l’objet de ses critiques. Il scrute à la loupe ce qu’il estime être des écarts de conduite, autant dans les articles et les éditoriaux que dans les publicités. Il en reproduit fréquemment de longs extraits afin de les commenter et de répondre à leurs arguments.

La lettre comme indice d’appartenance à un réseau

Tardivel ouvre aussi ses pages à ses lecteurs et publie régulièrement leurs lettres, pratiquement une par numéro en 1887 et 18889. Les auteurs de cette correspondance sont difficiles à identifier, ces textes étant souvent signés d’un pseudonyme ou d’initiales. Cette préséance de l’anonymat fait qu’il serait hasardeux à partir de ces seuls textes publiés dans le journal de déterminer l’existence ou non d’un réseau ultramontain auquel appartiendrait Tardivel. Ils indiquent certes la volonté de certains lecteurs d’occuper une partie de l’espace public, mais ils ne permettent pas de mesurer l’ampleur d’un quelconque réseau ultramontain.

C'est dans la correspondance privée de Tardivel que les indices d’un tel réseau sont les plus intéressants. Ces lettres non destinées à la publication sont toutes signées et leur lieu de provenance est aussi bien identifié. Le 26 février 1887, Tardivel lance dans son journal une campagne de souscription en vue de la publication d’un premier volume de Mélanges, un recueil d’articles choisis, tirés des premières années de publication du journal10. Durant toute l’année 1887, il reçoit plusieurs dizaines de lettres dans lesquelles les lecteurs glissent un ou deux dollars pour le recueil d’articles et en profitent pour encourager le directeur de La Vérité à poursuivre son travail ou pour émettre quelques commentaires sur la situation politique et religieuse de la province.

Ces lettres nous permettent d’en savoir un peu plus sur le lectorat de Tardivel. Les correspondants proviennent des quatre coins du Québec, mais plus particulièrement de la ville de Québec, lieu de publication de La Vérité, et de sa région limitrophe. Par contre, aucune lettre en provenance de Montréal n’a été retracée. Pourtant c'est à Montréal que Mgr Bourget, considéré comme le chef de file des ultramontains canadiens-français, a exercé son apostolat, mais la ville possède aussi son journal ultramontain. L’Étendard de François-Xavier-Anselme Trudel y étant publié depuis 1883, les ultracatholiques montréalais n’ont donc pas à se tourner vers l’hebdomadaire québécois pour fourbir leurs armes11. Tardivel a néanmoins quelques fidèles lecteurs en Ontario, dans l’Ouest canadien et aux États-Unis, généralement des membres de communautés religieuses établies dans ces régions. Sans surprise, les lettres indiquent que les lecteurs de La Vérité, du moins ceux qui souscrivent aux Mélanges, sont des hommes, appartenant au clergé, régulier ou séculier, généralement des curés, mais aussi des laïcs, souvent membres des professions libérales comme en témoignent les titres accolés aux signatures.

Ces courtes notes sont toutefois le résultat d’une démarche singulière : répondre à un appel de souscription et envoyer une somme d’argent en vue de recevoir un recueil d’articles indique certes que les signataires partagent les opinions de Tardivel, mais ce geste ne les place pas nécessairement au cœur d’un réseau ultramontain. Afin de mieux comprendre si Tardivel participe à un tel réseau, il faut examiner l’ensemble de la correspondance et chercher les relations régulières qu’il entretient.

Dans ces relations, un nom se démarque particulièrement, celui du père Joseph Grenier, un jésuite, à n’en pas douter le mentor de Tardivel12. Au fil des années, ils ont établi une correspondance quasi journalière dans laquelle ils discutent des différents enjeux qui concernent l’Église et plus particulièrement la Société de Jésus au Canada. Si on en croit ces échanges, Grenier aurait tenu la plume de Tardivel sur bien des sujets, notamment sur l’épineux dossier du règlement des biens des jésuites c'est-à-dire de la compensation accordée par le gouvernement à la Société de Jésus pour ses pertes encourues au moment de son renvoi du Canada13. C'est manifestement grâce au soutien et à l’influence du père Grenier auprès des jésuites que Tardivel a pu maintenir la publication de son journal durant toutes ces années.

Tardivel correspond aussi régulièrement avec Georges Bourgeois, un médecin de Trois-Rivières. Amis intimes ? Il est difficile de l’affirmer, le vouvoiement étant de mise entre les deux hommes, mais ils sont néanmoins assez proches pour s’enquérir de leur santé et de celle de leurs épouses et partager des nouvelles très personnelles sur leur famille14. Outre ces banalités domestiques, leurs échanges épistolaires concernent surtout des questions politiques et religieuses. De plus, Bourgeois a tissé des liens assez étroits avec Mgr Laflèche et il devient en quelque sorte l’antenne de Tardivel à l’évêché de Trois-Rivières.

Le directeur de La Vérité entretient aussi une correspondance assidue avec plusieurs individus qui ont participé de près ou de loin à la diffusion des idées ultramontaines dont l’abbé Luc Désilets du diocèse de Trois-Rivières, un ultramontain très combatif qui fait partie d’un cercle gravitant autour de Mgr Laflèche15, et son frère, Gédéon Désilets, propriétaire et rédacteur en chef du Journal des Trois-Rivières, un journal qui diffuse aussi les idées ultramontaines. Édouard Desjardins16, Philippe Landry, homme politique et membre du Cercle catholique de Québec tout comme Tardivel17, et l’avocat Gustave Lamothe18 font aussi partie de ce groupe d’individus qui écrivent régulièrement à Tardivel. À ces noms, il est important d’ajouter ceux de Mgr Louis-François Laflèche et de Mgr Thomas Duhamel, évêque du diocèse d’Ottawa, tous les deux reconnus pour leur ardeur à défendre la cause ultramontaine.

L’analyse de la correspondance de Tardivel, même à un stade préliminaire, permet donc d’affirmer que le rédacteur de La Vérité fait partie d’un réseau qui se déploie dans plusieurs directions. Ces lettres soulignent que ces individus n’ont pas déposé les armes et que, en dépit de l’évolution de la situation politico-religieuse au Québec et de l’intervention très claire de Rome, la sauvegarde de la foi catholique et la protection des intérêts de l’Église nécessitent une vigilance de tous les instants.

Des lettres d’encouragement ou la valeur d’une mission

Les lecteurs de La Vérité, ceux qui tout en réglant leurs frais d’abonnement ou en ajoutant leurs deniers à la campagne de souscription écrivent quelques lignes au directeur du journal, approuvent la façon de faire de Tardivel et participent même à sa croisade contre les mauvais journaux. Plusieurs missives, qu’elles aient été publiées dans le journal ou qu’elles aient été conservées par Tardivel, vantent les mérites de l’hebdomadaire et dénoncent les autres publications. Rien d’étonnant à cela, il est normal qu’un abonné d’un journal de combat approuve les choix de son rédacteur. Par contre, le ton et le vocabulaire utilisés témoignent d’un sentiment d’urgence et prennent Dieu à témoin de l’importance de la mission. Les lecteurs demandent aussi la protection divine pour assurer à Tardivel de pouvoir livrer son combat jusqu’au bout. En janvier 1887, La Vérité publie plusieurs courts messages qui expriment ces sentiments : « Courage, santé et persévérance ! Que Dieu vous soutienne jusqu’au bout19 ! » Cette autre note : « Veuillez aussi accepter mes sincères félicitations pour votre attitude énergique et pour votre conduite irréprochable en face de vos innombrables ennemis. La religion et la patrie vous en seront toujours reconnaissantes20. » Puis encore : « Continuez à défendre courageusement les bons principes et à tonner contre le dieu parti21. » Tardivel reçoit ainsi non seulement des encouragements de la part de ses lecteurs, mais leur approbation renforce aussi sa conviction du bien-fondé de sa mission.

La plupart des missives reçues par Tardivel sont assez laconiques et expriment en quelques mots seulement des remerciements et des félicitations. Certaines, plus intéressantes, sont plus bavardes : l’œuvre de Tardivel est indispensable, il doit à tout prix la poursuivre parce que l’époque est incertaine22. Quelques correspondants sentent une menace peser sur l’Église et sur la foi catholique. Cette menace prend différents visages, mais les plus fréquemment mentionnés sont les francs-maçons et l’indifférence religieuse. Ces lecteurs semblent partis en guerre, ou du moins ils sont convaincus que le directeur de La Vérité livre un combat, les mots « combat » et « croisade » apparaissant fréquemment. La chose n’étant pas aisée, on invite aussi Tardivel à faire preuve de courage, de détermination dans sa mission. On l’assure toujours de la bienveillance de Dieu à son endroit. Ces textes n’offrent cependant qu’un petit aperçu de la nature des relations entretenues par Tardivel et ses lecteurs/correspondants. Ils montrent que ceux qui prennent la plume sont satisfaits, qu’ils ont confiance en ce directeur, qu’ils partagent ses idées. Le journal prend ainsi une autre dimension, il n’est plus l’œuvre d’un seul homme. Cette participation des lecteurs en fait le résultat d’une œuvre collective.

La lettre au journal, arme de combat doctrinal

D’autres lettres publiées dans le journal, plus longues et qui portent sur des sujets précis, apportent un éclairage différent sur leur contribution à la rédaction du journal. Nous soulignons de nouveau qu’il est parfois difficile d’établir avec certitude qui sont les auteurs de ces envois. La seule présence de ces textes dans le journal témoigne néanmoins de l’importance qu’on accorde à la parole d’un tiers. Elle ajoute une certaine crédibilité au journal qui devient ainsi un véhicule efficace d’idées partagées par plusieurs.

Ainsi que le veut la pratique inhérente à la presse d’opinion, les lettres publiées dans le journal sont souvent des répliques à des articles lus dans un autre journal. Elles ne servent généralement pas à encenser ledit article, mais à exprimer des réserves, le plus souvent à en démolir l’argumentation pièce par pièce. Dans La Vérité, ces débats sont souvent d’ordre moral ou théologique : ils permettent de définir un bon catholique et la nature des relations qui doivent être établies avec l’Église. Il est certain que dans un journal ultramontain, la qualité des liens entre l’Église et les fidèles est sans équivoque : l’Église de Rome détient la vérité et les fidèles doivent s’y conformer. Ce qui est intéressant ici est d’évaluer comment s’exprime ce conformisme. Un facteur est aussi manifeste dans cette correspondance : qui attaque un catholique attaque tous les catholiques et il est impératif de se porter à leur défense.

Ainsi, en janvier 1888, un très long texte signé « Un curé du diocèse de Québec » et adressée à « Monsieur le rédacteur de La Vérité » utilise le prétexte d’une notice nécrologique de l’abbé M. Auclair publiée dans Le Courrier du Canada peu de temps auparavant23. Une phrase du Courrier semble avoir été l’élément déclencheur de cette réflexion. On y dit que l’abbé Auclair aurait subi « quelque temps l’influence de certaines idées, mais il sut montrer plus tard […] combien il était attaché au principe d’autorité24. » S’ensuit une longue dissertation sur ce que l’on doit comprendre du principe d’autorité et … du droit à la dissidence. Le « Curé du diocèse de Québec » défend l’idée que le dogme de l’infaillibilité papale n’ayant pas été attribué aux évêques, « lorsqu’une personne, compétente et éclairée, juge, après mûr examen, en se conformant aux conseils de la prudence et aux données de la science théologique, que son supérieur ecclésiastique se trompe sur un point important, elle ne peut alors en conscience adopter sa manière de voir, elle doit même en pareil cas lui résister sur ce point quoi qu’avec la plus grande déférence25. » Cette discussion s’étire sur plusieurs numéros, la dernière intervention, le 10 mars, étant une réponse au journal La Minerve qui s’est manifestement invité dans le débat et qui a accusé La Vérité d’avoir encouragé un « schisme26 ».

On pourrait s’étonner que cette discussion se déroule dans les pages du journal La Vérité alors que la notice nécrologique a été publiée dans le Courrier du Canada. Le « Curé du diocèse de Québec » a certainement cherché un lieu où on le laisserait s’exprimer sur un tel sujet, le journal de Tardivel étant tout désigné pour accueillir ces débats. Le contenu de cette réplique est aussi tout à fait éclairant parce que, sous prétexte de corriger un passage d’une notice nécrologique, le curé de Québec déploie tout un arsenal d’idées et exprime des valeurs tout à fait ultramontaines. Ceux qui se sont éloignés de l’Église de Rome sont des hérétiques, mais, pour rester fidèle à cette Église, il est permis à un prêtre ou à un laïc de « répudier les idées de son évêque27 » si celui-ci est dans l’erreur et enseigne le libéralisme. Cette phrase au sujet du journal L’Avenir de Lamennais va dans le même sens : « Les feuilles de L’Avenir ont été les langes au milieu desquelles est né et s’est développé le cruel et débile enfant qui a nom le libéralisme catholique28. » Dans tous ces échanges, l’allusion à Mgr Taschereau, archevêque de Québec qui ne partage pas ces idées ultramontaines est à peine voilée. Au fur et à mesure que l’argumentation du « Curé de diocèse de Québec » se développe, le ton devient de plus en plus acrimonieux. Il s’agit ici très clairement d’une charge contre Mgr Taschereau, presque d’un règlement de compte, auxquels s’ajoute une profession de foi ultramontaine.

Une brève analyse permet de classer le vocabulaire utilisé dans cet exposé en deux catégories bien distinctes : d’une part on emploie toujours un vocabulaire péjoratif voire négatif quand on aborde le libéralisme catholique. Les « faux principes », « l’aveuglement », les « funestes erreurs », les « insanités modernes » et « l’absurdité » constituent l’essentiel du lexique antilibéral déployé ici. D’autre part, les principes ultramontains sont décrits avec des mots qui évoquent des sentiments beaucoup plus nobles : « incontestable vérité », « justice », « écrin d’éloges », « amour ardent ». Le ton est donné; outre les nombreux arguments doctrinaux, ce que ces lettres laissent transparaître sont des sentiments de mépris voire une profonde aversion à l’endroit de ceux qui ne partagent pas les idées ultramontaines et, à l’opposé, la plénitude du juste est promise à ceux qui appartiennent à cette communauté d’idées. Cette série de lettres du « Curé du diocèse de Québec » est manifestement un prolongement du contenu éditorial et du combat de La Vérité, sa présence dans le journal n’est pas fortuite.

Dans le corpus étudié, les échanges publiés dans le journal abordent presque tous des sujets religieux. On écrit au directeur de La Vérité pour discuter de points de théologie dont le cœur est constitué des débats entre libéralisme catholique et ultramontanisme. Des questions plus temporelles sont aussi soulevées : X.X. questionne la gestion des registres civils par les fabriques paroissiales et demande si l’État peut exercer une quelconque autorité sur le clergé. La réponse est « non » et X.X. s’indigne du fait que ce règlement exige des membres du clergé de remplir des obligations civiles sans être rémunérés29. L’idéologie ultramontaine s’exprime ici; l’Église ne doit accepter sous aucun prétexte d’obéir à des injonctions de l’État, mais en même temps si les curés étaient adéquatement rétribués, le geste deviendrait moins outrageant.

Un autre sujet provoque des discussions importantes pendant la période. Tardivel se querelle avec le père oblat Ferdinand Grenier et le père Célestin Augier, provincial de la communauté des oblats, au sujet d’un de leur confrère, le père Charles-Alfred-Marie Paradis. Ce dernier, prêtre colonisateur dans le Témiscaminque, a été impliqué dans des relations tendues entre les colons et une compagnie forestière au sujet de droits de coupe et de concessions de terres. La situation dégénère et un procès est intenté au père Paradis. Après avoir déclaré que le gouvernement Ross avait cherché à le soudoyer, il se dit « victime de pressions politiques ». À la demande de ses supérieurs, il doit s’exiler aux États-Unis et il quittera finalement la communauté oblate30.

Tardivel prend immédiatement la défense du père Paradis. La querelle avec les oblats est vive et Tardivel choisit de la livrer dans l’espace public. Il publie le courrier du père Grenier et il lui répond. L’oblat réplique à son tour en soulignant les infâmes manœuvres du directeur. Le ton est cinglant : 

Vous êtes donc déterminé à descendre jusqu’au dernier degré l’échelle de toutes les vilainies ? Après avoir publié en me désignant un entretien privé que j’avais eu avec vous, dans l’illusion où j’étais alors que vous étiez ce que vous paraissiez être, voilà que maintenant vous reproduisez une correspondance qui n’était pas destinée à la publicité ! Il n’y a donc rien de sacré pour vous ? Vous avez donc oublié les règles de la bienséance la plus primitive ? Je vous entends rire de ma naïve bonne foi. En effet, quand on a été capable de violer le secret professionnel on est capable de toutes les bassesses. M’est avis, cher monsieur, que vous ne suivez pas beaucoup les conseils de vos aviseurs spirituels. Votre manière d’agir finira, je l’espère, par ouvrir bientôt les yeux de ceux qui, de bonne foi, vous prenaient pour un champion sincère, honnête et dévoué des intérêts religieux31.

Ces vigoureux échanges démontrent que Tardivel ne fait pas toujours l’unanimité parmi les gens d’Église. Il n’hésite cependant pas à publier les critiques qu’on lui adresse, cette stratégie lui permettrant de répondre à ses objecteurs de manière encore plus ferme.

Les lettres publiées dans le journal jouent donc plusieurs rôles : les remerciements et les encouragements deviennent l’occasion de montrer que l’œuvre entreprise n’est pas vaine, que le combat livré par La Vérité est souhaité par plusieurs. Les missives plus étoffées constituent, quant à elles, une part importante du contenu du journal. Ces correspondants, souvent anonymes, participent de manière très concrète à l’élaboration de La Vérité. L’hebdomadaire devient une sorte de forum qui permet l’expression de l’idéologie ultramontaine, idéologie qui a peut-être vu son espace de diffusion rétrécir depuis les années 1880.

La correspondance privée, un lieu de discussion entre pairs

L’espace privé présente un autre type d’échanges, dans lesquels la politique est davantage à l’honneur. Le Premier ministre Honoré Mercier alors au pouvoir au Québec fait l’objet de plusieurs lettres : on scrute ses actions, on critique ses moindres faits et gestes. Par exemple, le 15 novembre 1887, E. Noël dénonce des nominations « maçonniques » faites par Mercier dans la région de Sherbrooke. Pour lui, en persistant dans ses choix, Mercier démontre qu’il ne mérite pas le titre de gouvernement « national ». Noël en informe Tardivel parce qu’il saura « dire et faire dans les circonstances32. » Il a raison. Ce texte trouve un écho très rapide dans le journal : dès le numéro suivant, Tardivel publie l’information. Sans divulguer le nom de son « correspondant » ou de son « ami », il reprend presque mot pour mot le libellé de la lettre de Noël en y ajoutant toutefois sa touche personnelle33.

Certaines lettres contiennent parfois des réprimandes à l’endroit de Tardivel. Ainsi, toujours concernant l’affaire Paradis, le père Célestin Augier, provincial des oblats, lui écrit deux fois pour démentir des informations le concernant parues dans le journal et lui demander de mettre fin au débat. Il termine en le semonçant: « Au reste, il n’appartient pas à un journal de juger un prêtre et un religieux même provincial de son ordre et de lui tracer la ligne de conduite qu’il doit tenir pour remplir son devoir. Sa conscience, sa règle et ses supérieurs ecclésiastiques et religieux lui suffisent amplement34. » À sa demande, la première lettre du père Augier est partiellement publiée en une du 21 janvier 1888, mais le débat n’est pas clos pour autant, Tardivel s’en servant pour poursuivre la discussion et exiger un procès juste et équitable pour le père Paradis35. Ici aussi la correspondance reçue par Tardivel trouve un écho dans le journal, mais cette fois-ci, ce n’est pas celui attendu par l’auteur de la lettre.

Dans cette correspondance privée, les enjeux sont nombreux, mais le maintien des acquis de l’Église catholique surtout en matière d’éducation, le patriotisme canadien-français et la crainte de la franc-maçonnerie semblent au cœur des préoccupations. Alors que dans le journal, les lettres témoignent d’une vive animosité envers les adversaires de la pensée ultramontaine, aucune trace de cette acrimonie n’a été décelée dans les échanges privés. Le ton est sérieux – on ne badine pas avec ces questions-là – et il est patent qu’on se parle entre « nous », entre pairs. On relate des faits, on transmet des informations, souvent sous le couvert du secret36. En somme, ce réseau épistolier sert avant tout à fournir à Tardivel des arguments, des renseignements spécifiques qui pourront l’aider à développer sa pensée, pensée qui sera exprimée par la suite dans le journal.

Les correspondants invitent même de manière très franche Tardivel à en utiliser le contenu, l’objectif étant toujours de servir la cause. Le père Joseph Grenier est particulièrement précis dans ses indications, comme le montre cet exemple concernant la question des biens des jésuites : « Vous pourriez donc à propos des paroles de Mercier, sans enfreindre la défense dire, par exemple, que de telles paroles ont besoin d’explication ou plutôt de correction, et que M. Mercier, il faut l’espérer, ne tardera pas à le voir et à le reconnaître publiquement, s’il ne veut pas mettre le public mal à l’aise37. »

À l’instar des lettres publiées dans le journal, cette correspondance témoigne de cette volonté de travailler pour la gloire de Dieu et de l’Église, de cette urgence de poursuivre une mission essentielle. Aucun doute n’est possible, nous sommes bien en présence d’un réseau ultramontain qui s’alimente à une source unique : Rome. Même si les sujets sont plus politiques, les préoccupations n’en demeurent pas moins morales et la sensibilité toute religieuse. Ces lettres sentent-elles un peu la sacristie ? On pourrait le dire, mais elles sentent aussi l’antre où on complote, cette odeur flotte notamment dans les nombreux échanges avec le docteur Georges Bourgeois et avec le père Joseph Grenier. On croirait entendre les chuchotements.

En conclusion, cette analyse d’un premier bloc de ce volumineux corpus permet deux constats : tout d’abord nous sommes en présence d’un réseau auquel Tardivel est parfaitement intégré. Même en cette fin du XIXe siècle, alors qu’ils ont essuyé un important revers quand Rome les a sommés de cesser leur ingérence politique, les ultramontains du Québec sont toujours actifs, ils discutent, ils sont aux aguets et Tardivel serait une sorte de courroie de transmission entre sphères privée et publique, entre les discussions en lieux clos et les débats publics dans le journal.

Autre constat : la différence de ton entre les lettres publiées dans le journal et celles qui sont demeurées privées est significative. Combatifs et acrimonieux dans le premier cas, pausés et réfléchis dans le second, ces textes montrent que les relations que Tardivel entretient avec ses lecteurs sont multiformes. Un journal d’idées et de combat soulève les passions, mais derrière ces passions, il faut aussi de la raison. Journal de combat, La Vérité serait davantage le lieu où s’expriment les passions, échos de discussions raisonnées entre individus qui partagent la même foi, les mêmes valeurs et les mêmes inquiétudes.

(Université du Québec à Montréal)

Notes

1  La correspondance reçue par Jules-Paul Tardivel est répartie dans plusieurs fonds d’archives. Pour les fins de cet article, seules les lettres conservées dans le fonds Immaculée Conception des Archives des Jésuites au Canada (BO-170) ont été analysées. Une étude exhaustive de toute la correspondance de Tardivel est en cours.

2  Pierre Savard, « Jules-Paul Tardivel », Dictionnaire biographique du Canada en ligne, [http://www.biographi.ca] (consulté, mai 2010).

3  Ibid.

4  La pensée nationaliste de Jules-Paul Tardivel a été analysée par Réal Bélanger, « Le nationalisme ultramontain. Le cas de Jules-Paul Tardivel » dans Les ultramontains canadiens-français, sous la dir. de Nive Voisine et Jean Hamelin, Montréal, Boréal express, 1985, p. 267-304.

5  Nive Voisine, « Rome et le Canada : la mission de Mgr Conroy », Revue d’histoire de l’Amérique française, vol. 33, no 4, 1980, p. 499-519.

6  Nive Voisine, « L’ultramontanisme canadien-français au XIXe siècle » dans Les ultramontains canadiens-français, sous la dir. de Nive Voisine et Jean Hamelin, Montréal, Boréal express, 1985, p. 73-74.

7  Voir René Hardy, Contrôle social et mutation de la culture religieuse, 1830-1930, Montréal, Boréal, 1999 et Lucia Ferretti, Entre voisins. La société paroissiale en milieu urbain : Saint-Pierre-Apôtre de Montréal, 1848-1930, Montréal, Boréal, 1992.

8  Pierre Savard, Jules-Paul Tardivel, la France et les États-Unis, 1851-1905, Québec, Les presses de l’Université Laval, 1967, p. 85.

9  Le journal La Vérité compte alors 8 pages, dont deux sont presque entièrement consacrées à la publicité.

10  « Mélanges », La Vérité, 26 février 1887, p. 2-3. Chaque volume de 400 pages contiendra la « substance » de La Vérité. Trois volumes des « Mélanges » seront éventuellement publiés.

11  L’Étendard a cessé sa publication en 1893. Il serait intéressant de vérifier si, après cette date, le lectorat fidèle à Trudel se tournera vers Tardivel.

12  Pierre Savard, op.cit., p. 40.

13  Voir à ce sujet Philippe Sylvain et Nive Voisine, Histoire du catholicisme québécois, vol. II, Réveil et consolidation, 1840-1898, Montréal, Boréal, 1991, p. 392.

14  Archives de la Société de Jésus, province du Canada français (ASJCF), BO-170-2, 1, Fonds Immaculée Conception, « Lettre de Georges Bourgeois à Jules-Paul Tardivel », 18 novembre 1887.

15  L’abbé Désilets aurait exercé une grande influence auprès de Mgr Laflèche et aurait incité ce dernier à prendre position dans le conflit opposant les diocèses de Montréal et de Québec au sujet de la création d’une université catholique à Montréal. Nive Voisine, « Luc Désilets », Dictionnaire biographique en ligne [http://www.biographi.ca] (consulté en octobre 2010).

16  Médecin et professeur, un pionnier de l’ophtalmologie au Québec, il aura maille à partir avec l’Université Laval et il a participé à la fondation de L’Étendard de Montréal. Denis Goulet, « Louis-Édouard Desjardins », Dictionnaire biographique en ligne [http://www.biographi.ca] (consulté en octobre 2010).

17  Michèle Brassard et Jean Hamelin, « Philippe Landry », Dictionnaire biographique en ligne [http://www.biographi.ca] (consulté en octobre 2010).

18  Gustave Lamothe est avocat et associé de François-Xavier-Anselme Trudel. Il sera bâtonnier du barreau du Québec et juge à la cour d’appel du Québec. Pierre Savard, op.cit., p. 103-104.

19  La Vérité, 15 janvier 1887, p. 6.

20  La Vérité, 22 janvier 1887, p. 1.

21  Ibid.

22  « Lettres de nos abonnés », La Vérité, 14 avril 1888, p. 4.

23  « Correspondance », La Vérité, 21 janvier 1888, p. 4.

24  Cité dans Ibid.

25  « Correspondance », La Vérité, 18 février 1888, p. 4.

26  « Cette vieille païenne », La Vérité, 10 mars 1888, p. 4. Le « Curé du diocèse de Québec » reprend le collier le 5 mai 1888 alors que G.P.C., l’auteur de la fameuse notice, a publié son texte sous forme de brochure et qu’il n’en a pas profité pour « réparer les fautes multiples qu’il avait accumulées dans une seule phrase dont nous lui avions pourtant démontré surabondamment l’inopportunité et l’injustice. »

27  Ibid.

28  « Correspondance », La Vérité, 18 février 1888, p. 4.

29  « Quelques vérités », La Vérité, 21 juillet 1888, p. 1.

30  Voir Robert Rumilly, Histoire de la province de Québec, tome 5, Riel, Montréal, Éditions Bernard Valiquette, 1941, p. 253-255 et 287-290.

31  « Trois lettres du R.P. Grenier o.m.i. », La Vérité, 24 mars 1888, p. 6.

32  ASJCF, Fonds Immaculée Conception, BO-170-2,6, Lettre de E. Noël à Jules-Paul Tardivel, 15 novembre 1887.

33  « Plaintes », La Vérité, 19 novembre 1887, p. 2.

34  ASJCF, Fonds Immaculée Conception, BO-170-2, 6. Lettres du père Augier o.m.i. à Jules-Paul Tardivel, 15 janvier 1888, 19 janvier 1888.

35  « M. Ross vs le Père Paradis », La Vérité, 21 janvier 1888, p. 1.

36  La mention « Confidentielle » a souvent été ajoutée par les auteurs.

37  ASJCF, Fonds Immaculée Conception, BO-173-B, Lettre de Joseph Grenier s.j. à Jules-Paul Tardivel, 13 avril 1888.

Pour citer ce document

Dominique Marquis, « « Monsieur le rédacteur,… » ou quand les lecteurs de La Vérité prennent la plume. Analyse d’une correspondance, 1887-1888», La lettre et la presse : poétique de l’intime et culture médiatique, sous la direction de Guillaume Pinson Médias 19 [En ligne], Mise à jour le : , URL: https://www.medias19.org/publications/la-lettre-et-la-presse-poetique-de-lintime-et-culture-mediatique/monsieur-le-redacteur-ou-quand-les-lecteurs-de-la-verite-prennent-la-plume-analyse-dune-correspondance-1887-1888