1889. Un état du discours social

Chapitre 2. Corpus et plan de l'ouvrage

Table des matières

Jusqu'où montera le génie français en 1989 ?
Les nuages le diront.
(M. Pereida de Monterio, Brésil, Livre d’or de la Tour Eiffel)

Le présent ouvrage porte sur la totalité de ce qui s'est imprimé en français au cours d'une année, mil huit cent quatre-vingt neuf. Cette coupe synchronique ne constitue par elle‑même qu'un premier échantillonnage qui vaut mutatis mutandi pour les quelques années qui précèdent et qui suivent dans la « Fin de siècle », entre le krach de l'Union générale (1884) et les débuts de l'Affaire Dreyfus (1894). Tout au plus peut‑on justifier le choix de 1889 de façon circonstancielle : c'est l'année du centenaire de la Révolution française, – diversement commémorée à droite et à gauche –, c'est l'année de l'Exposition universelle et de la Tour Eiffel ; c'est aussi une conjoncture particulièrement riche et conflictuelle, tant dans l'ordre politique avec l'apogée de la crise boulangiste et avec l'instauration de la Deuxième internationale que dans les lettres et les arts où l'on voit une véritable explosion de formules esthétiques censées novatrices et la création d'innombrables « petites revues » dont quelques‑unes, La Revue blanche, Le Mercure de France dureront. Chez beaucoup d'historiens, chacun dans son secteur propre, les années 1888 ou 1889 ou 1890 sont choisies comme limites de périodisation, versant de changements qualitatifs, point d'origine de certaines « modernités » qui travaillent le XXe siècle.

Il faudra que nous nous expliquions sur les principes du travail en coupe synchronique et le potentiel heuristique que nous lui attribuons. Nous ne le ferons qu'après coup, au chapitre 48, avant le bilan et les conclusions. Pourquoi alors travailler sur les dernières années du XIXe siècle ? Un publiciste de 1889 en fournit en quelque sorte la réponse :

En un certain sens on peut dire que le XIXe siècle commence en 1789 et finit en 1889 et que l'Exposition de Paris le résume admirablement1.

Oui, le « XIXe siècle » finit à cette époque, quelque fétichisme qu'on ait pu attacher à la date de 1900. Nous sommes, en 1889, à l'orée de la « modernité », à ce moment où on voit émerger simultanément dans le journalisme, la politique, les lettres et les sciences, des modèles et des paradigmes qui s'affirmeront, où on voit opérer une série de ruptures et de crises qui forment transition vers le paysage intellectuel dit « moderne », des thèmes collectifs qui ne cesseront de venir hanter les deux premiers tiers du XXe siècle. La « vision crépusculaire du monde » dont l'analyse est au cœur de cet ouvrage, exprime bien une angoisse collective, « the sense of demise of an old society, coupled with an agonizing un‑certainty as to what the forms of the new society might prove to be» (Hughes, 1958, 11). C'est l'émergence des modernités que nous chercherons à saisir, dans la cacophonie et le conflit ; de ce point de vue le retour en arrière sur une année dont un siècle nous sépare doit être senti comme un De te fabula narratur. Avec toute son « inquiétante étrangeté », ce système désuet du discours social offre à la réflexion historique les avantages dialectiques de la familiarité et de la distanciation. C'est sous cette perspective que nous en ferons la synthèse en conclusion.

Dans l'année 1889, nous ne prenons pas seulement la production imprimée française, mais aussi la belge et la suisse, la « francophonie européenne » en quelque sorte qui permettra d'aborder certains effets de périphérie dans la même culture. Nous voulions à l'origine englober la coexistence distendue de toutes les aires de langue française, le Canada français, Haïti, l'Égypte et le Levant, la culture française des classes privilégiées dans les pays slaves et d'autres régions d'Europe. Cette étude d'un Imperium culturel et de ses « périphéries » vaudrait certes la peine d'être tentée. Il nous est apparu que l'analyse d'une aire d'hégémonie (qui fait que la presse de Montréal et de Port‑au‑Prince s'intéresse plus en janvier 1889 à l'élection partielle de Paris qu'aux affaires locales), analyse jamais faite, ouvre sur une problématique trop vaste pour s'intégrer à ce projet déjà ambitieux et qu'il fallait la laisser pour une autre fois.

Sources bibliographiques

On trouvera à la fin de cet ouvrage le relevé des bibliographies, – au nombre d'une centaine –, qui en se recoupant ont permis de saisir la totalité de l'imprimé en 1889 et d'y tailler un échantillonnage substantiel. Il n'était pas question de faire figurer dans le présent ouvrage la liste des livres, journaux, revues, affiches, feuilles volantes qui forment le corpus sur lequel nous avons travaillé. Cette liste rallongerait de quelques centaines de pages un livre déjà fort épais ! Le lecteur voudra bien considérer par fiction que ce livre se prolonge en annexes avec le Journal général de l'imprimerie pour 1889 (c'est‑à‑dire la Bibliographie de la France) et la Bibliographie de Belgique, année 1889, complétés notamment par la source la plus commode et la plus fiable pour les livres, le Catalogue général de la Librairie française, tomes XII et XIII, de Lorenz et Jordell. Pour les périodiques, on trouverait beaucoup en additionnant l'Annuaire de la presse française, 1889 d'Henri Avenel et l'Annuaire des journaux, revues et publications périodiques parus à Paris jusqu'en novembre 1889 d'Henri Le Soudier. Au bout de ceci, il reste des lacunes que les volumes parus de la Bibliographie de la presse française par départements permettent de combler.

Échantillonnage des livres

La Bibliographie de la France accumule 14 849 entrées pour l'année 1889, mais les deux tiers de ces titres ne sont pas des « livres » dans la définition courante et pertinente de ce terme : il y a ici des feuilles volantes, des tirés‑à‑part, des rapports administratifs, de l'imprimé hors‑commerce. Le « Jordell/Lorenz » recense 5 260 livres (en accueillant de façon très erratique les ouvrages suisses, belges, canadiens, haïtiens). Ce chiffre qui comporte les rééditions de classiques ou d'auteurs récents (non pas les retirages), pêche par omission du côté du livre spécialisé (thèses, ouvrages de piété...) et de la petite édition provinciale. Il peut servir cependant d'ordre de grandeur acceptable pour le livre nouveau diffusé commercialement. Nous avons dépouillé 1 207 livres et brochures. Il s'agit donc d'un échantillonnage étendu puisqu'il représente 23 % du total des entrées du « Jordell/Lorenz ». Au départ, nous avons pris au hasard environ 750 titres et nous avons complété ce lot par tous les ouvrages omis ayant fait l'objet de deux comptes rendus ou plus dans les grandes revues politiques, littéraires, scientifiques, historiques, etc., de 1889‑902. L'échantillonnage corrige donc le principe du tout‑venant par un critère de notoriété et de reconnaissance à court terme3.

Quotidiens

Nous avons dépouillé systématiquement les grands quotidiens parisiens (dont les caractéristiques et les styles sont détaillés au chapitre 24) et nous avons caractérisé sommairement, par l'analyse de quelques dates‑clés, tous les autres journaux de Paris, au nombre de 157. Nous avons de même analysé l'Indépendance belge et une douzaine de feuilles régionales de Lille, Lyon et Marseille.

Périodiques

Nous avons eu en mains 487 périodiques (français, belges, suisses) de toutes natures dont la typologie se trouve décrite au chapitre 26. Ici la comparaison avec les chiffres totaux est incertaine et peu significative parce que la catégorie même est hétérogène (elle va de la Revue des Deux Mondes à la feuille de station balnéaire) et du fait que les périodiques ne cessent de naître et de mourir, de tomber en léthargie puis de reparaître, de changer de titre. Disons qu'à partir de l'Annuaire d'Avenel, complété par la section des « Nouveaux périodiques » du Journal de la Librairie et par d'autres sources, on peut évaluer à 5 500 titres, – durables ou éphémères –, la somme des publications françaises, du quotidien au semestriel, qui entrent en 1889 dans la catégorie des « périodiques ». Nous avons analysé systématiquement toutes les « revues politiques et littéraires » (les revues de grande information bourgeoise), tous les « illustrés » de diffusion nationale, toute la presse satirique parisienne, tous les « magasins » et « revues de famille » et nous avons cherché à échantillonner toutes les autres catégories, – de la cote boursière à la feuille de potaches, du bulletin syndical à la revuette pornographique –, par un bricolage consciencieux qui nous paraît au bout du compte n'avoir laissé dans l'ombre aucun type de support imprimé. Nous avons prêté un intérêt particulier aux « petites revues » de l'avant‑garde littéraire et à toutes les publications bien établies des différentes disciplines scientifiques et tendances philosophiques.

Autres imprimés

Nous avons étudié les feuilles de musique, – « poèmes » des musiques de salon et chansons de café‑concert –, une centaine. (Nous avons terminé récemment une monographie sur Le Café‑concert, en collaboration avec D. Geoffrion, monographie qui est un à‑côté de la présente recherche). Nous avons cherché enfin à débusquer l'imprimé sous ses formes les plus obscures et les plus éphémères : l'affiche commerciale et administrative (voir chapitre 27), l'image d'Épinal, la feuille de dévotion, le catalogue de grands magasins, la feuille volante de propagande politique... Il n'était pas question ici d'appuyer l'échantillonnage, constitué au hasard des découvertes, sur un quelconque relevé systématique. Travaillant à l'aveuglette, nous avons fait confiance à la multiplicité des trouvailles.

Au fond, une recherche comme celle dont nous entreprenons la synthèse, appelait une « boulimie » raisonnée face à une masse énorme d'imprimés : il était nécessaire d'en assimiler une part importante au risque de se laisser engloutir par son infinie diversité. De cette boulimie, témoignent la taille de l'échantillonnage et des recherches étalées, au milieu d'autres activités, sur plus de sept ans.

Ouvrages disparus

On ne peut mesurer exactement le taux de survie matérielle des livres d'il y a un siècle. Un livre introuvable à Paris peut se rencontrer dans quelque bibliothèque lointaine, publique ou privée. Il m'est arrivé de ne localiser qu'aux États‑Unis certains périodiques disparus des grandes bibliothèques françaises, ou jamais conservés. Pour ce qui est du taux d'accessibilité des livres à la suite d'efforts systématiques tant en France qu'à l'extérieur, je l'évalue à 98 %, –autrement dit 2 % des livres attestés et recensés demeurent introuvables. Pour les périodiques, la situation est plus inquiétante. Après élimination des périodiques « fantômes » – ceux cités par les bibliographes mais ayant en fait cessé de paraître –, il reste que 10 à 15 % des revues et journaux bien attestés sont indisponibles, soit pour n'avoir été conservés dans aucune grande bibliothèque, soit pour se trouver dans une seule, mais dans un état de délabrement tel qu'il n'est plus possible de les communiquer. Il n'est pas certain qu'ils redeviendront jamais disponibles : l'on peut méditer sur cette évanescence progressive de l'imprimé qui rend le travail d'histoire locale, d'histoire des secteurs professionnels, d'histoire des mouvements ouvriers aussi, de plus en plus problématique.

Plan de l'ouvrage, publications antérieures

La présente tentative d'appréhender globalement le discours social de l'année mil huit cent quatre‑vingt neuf a été précédée par la publication de trois études monographiques sur le sujet. La première, Ce que l'on dit des Juifs en 1889 (Paris : Presses de l'Université de Vincennes, 1989) s'efforce de parcourir en synchronie non seulement les factums d'antisémites doctrinaires, mais la dissémination d'énoncés sur les « Juifs », les « israélites », dans la topologie du discours social. Certains éléments de ces analyses sont résumés ici, notamment au chapitre 18, « Fin de siècle et décadence » et au chapitre 33 qui porte sur la propagande boulangiste. Cependant nous n'avons pas essayé de reprendre l'analyse de cette dispersion interdiscursive et nous renvoyons à l'ouvrage en question.

La seconde étude, Le cru et le faisandé (Bruxelles : Labor, 1986, coll. « Archives du futur ») étudie les codes des thématisations du sexuel non seulement dans la littérature (de l'Almanach des cocottes aux œuvres « novatrices » de Zola, Rachilde, Camille Lemonnier, etc.) mais aussi dans le journalisme, la doxa d'actualité et dans les sciences, la médecine en premier lieu. Il s'agissait de montrer encore la diffraction de thématisations à la fois complémentaires et incompossibles, la logique de la « distinction » qui opère et la spécialisation légitimante des différents champs discursifs. Seules quelques données de ce livre sont reprises ici, au chapitre 19 (« Les détraquements du moi ») et au chapitre 37 qui traite de l'évolution du roman. On peut compléter ces données par les remarques sur les formes infra‑canoniques de la presse boulevardière (chapitre 26) et de la gaudriole « populaire » (chapitres 44 et 45).

Le troisième ouvrage, paru en 1989 dans la collection « Les Médias et l'Événement » de la Documentation française (Paris), est formé d'un portefeuille de facsimilés de journaux accompagné d'une étude sur Le Centenaire de la Révolution. On en trouvera une version condensée au chapitre 32.

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Le présent ouvrage avec ses cinquante chapitres qui portent les uns sur des champs, des genres, des publics, les autres sur des migrations d'énoncés, les autres encore sur de grandes dominances gnoséologiques et thématiques ne cherche pourtant pas à parcourir exhaustivement tous les secteurs discursifs. Il enserre le discours social de 1889 dans un réseau dense de recoupements, mais il a fallu cependant sacrifier bien des aspects et des secteurs.

L'ouvrage est suffisamment épais, dira‑t‑on, et pourtant on a dû renoncer à y intégrer l'étude des discours du droit, de l'historiographie (mais on verra le chapitre 32), l'analyse systématique de la médecine, de l'anthropologie, des sciences morales, de la naissante sociologie et de leurs discours. Nous avons presque entièrement éliminé le discours des beaux‑arts, la critique picturale notamment qui mériterait une analyse spéciale.

On a abordé la littérature en laissant de côté la production dramatique tout entière (laquelle alimente cependant les chapitres centraux sur la vision du monde hégémonique) et l'étude de certains genres en pleine expansion comme le récit de voyage et la littérature exotique (voir cependant au chapitre 14). On a restreint l'étude du secteur des discours politiques – lesquels sont mis à contribution de façon diffuse dans tout l'ouvrage – à deux grands ensembles idéologiques : l'anticléricalisme des républicains et la propagande boulangiste. On a enfin laissé dans l'ombre bien des secteurs savants, où coexistent de la science, de l'idéologie scientiste et les effets « ventriloques » de la doxa parlant dans le texte scientifique, pour ne traiter des sciences qu'en deux chapitres.

Compte non tenu des insuffisances et incompétences de l'auteur, c'est l'abondance même des données, l'étendue nécessaire des analyses qui nous ont dissuadé de chercher à combler toutes les cases, à suivre toutes les concrétions de discours. L'ouvrage actuel, par la multiplication d'analyses complémentaires, donne bien une image organique de l'état du discours social de 1889 sous les différents points de vue dont nous avons fait mention dans l'Introduction.

Dans les chapitres finaux qui traitent des « Dissidences, marges groupusculaires et contre‑discours », on aurait pu multiplier l'analyse de ces résistances et innovations périphériques ; décrire par exemple les ésotérismes, spiritismes, théosophies qui s'offrent comme des visions du monde alternatives. Dans cet ordre de phénomène, le lecteur relèvera en tout cas deux absences absolument « impardonnables » : celle du ou des socialismes et celle du mouvement d'émancipation des femmes (le mot de « féminisme » n'est guère attesté). Malgré le grand nombre des travaux sur l'histoire du mouvement ouvrier et sur l'« introduction » en France du marxisme et des autres doctrines socialistes, la propagande socialiste courante, porteuse d'un contre‑discours total et palladium censé rendre invulnérable à l'idéologie bourgeoise, n'a pas encore été étudiée dans sa logique propre. À réfléchir sur les socialismes et les féminismes, sur leur émergence et leur affirmation au XIXe siècle, on a fini par se convaincre que l'histoire de la propagande socialiste pose des problèmes majeurs dont beaucoup ne sont simplement pas abordés ni, semble‑t‑il, soupçonnés. De sorte que l'auteur a résolu, partant de 1889 et remontant dans le temps, à travailler à une « Histoire du discours socialiste commun » depuis 1848. Le discours féministe et ses avatars sera rattaché à cette « généalogie » de la propagande socialiste. Au bout du compte, plutôt que de formuler des analyses provisoires, on a préféré laisser une vaste lacune que la publication en cours d'une autre étude vient combler4.

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L'ouvrage s'ouvre sur un exposé de problématique générale (chapitre 1) dont les différents aspects vont être repris dans le corps des analyses5. Après des chapitres consacrés à la mise en place des données et à une description bibliométrique de la « chose imprimée » et de sa diffusion, nous prendrons d'abord le point de vue « topographique », celui qui aborde le discours social comme une division du travail discursif (chapitre 5 et 6). C'est en dialectique avec ces mécanismes de dissimilation que des faits d'unification transdiscursive peuvent s'observer : institution de la langue légitime (chapitre 7) et action sous‑jacente d'une certaine gnoséologie dominante que nous appelons le « romanesque général » (chapitre 8)6. Une série de chapitres décrivent ensuite une axiomatique pragmatique qui institue un sujet et ses valeurs, face aux fétiches de la Patrie, de la Race et de la Civilisation (chapitres 9‑14). L'hégémonie comme thématique récurrente et herméneutique de la conjoncture, engendre une vision du monde, crépusculaire et angoissée, autour d'un nucleus paradigmatique, le modèle de la déterritorialisation (chapitres 15‑20). La doxa identifie deux grandes menaces qui déstabilisent les valeurs et l'ordre naturel des choses, le « Péril social » et la « Fin d'un sexe » (chapitres 21‑22). Les chapitres qui suivent prolongent l'analyse globale en travaillant par secteurs ou regroupements institutionnels de complexes discursifs complémentaires. De nombreux chapitres étudient la « publicistique », la production de l'opinion et de l'actualité par la presse principalement (chapitres 23‑32). Un chapitre montre notamment la production en France du récit du drame de Meyerling (30 janvier 1889), événement sensationnel s'il en fut jamais7. On aborde ensuite les divers champs spécialisés, sans chercher à en produire une description exhaustive. Le marché des idéologies politiques, en symbiose partielle avec la publicistique, sera restreint à une analyse de l'anticléricalisme et de l'idéologie boulangiste (chapitre 33, 34)8. Le champ littéraire et son « évolution » sont caractérisés en trois chapitres qu'on eût pu, il est vrai accompagner de plusieurs autres (chapitres 35‑37)9. De même les champs philosophique et scientifique sont étudiés du point de vue de leur apport essentiel à la conjoncture et, dans la science, de la fonction fantasmatique de légitimation qu'elle apporte à la migration de certains idéologèmes (chapitres 38‑40)10. Deux chapitres sont consacrés aux dissidences et contre-discours (chapitres 41‑42)11. Dans les chapitres finaux nous abordons la production infracanonique, destinée aux publics rejetés en dehors de la légitimité : le peuple, les femmes, les enfants (chapitres 43‑47)12.

On trouvera à l'annexe « A » une chronologie de l'année 1889 à laquelle il sera commode de se reporter à l'occasion.

Notes

1  Revue de morale progressive, p. 90.

2  On pourra se référer spécialement à une compilation bibliographique éclectique : la Revue des livres nouveaux avec sa synthèse annuelle, Les livres en 1889.

3  Nous avons retenu en outre: a) quelques livres parus dans les dernières semaines de 1888 dont le retentissement est tel qu'il est impossible de travailler sur la coupe synchronique sans les intégrer. Exemples : La fin d'un monde d'Edouard Drumont et le « bestseller » de Georges Ohnet, Le Docteur Rameau; b) quelques livres parus en 1890 qui se présentent comme une chronique ou un journal de l'année 1889. Exemple : La dernière bataille du même Drumont; c) des ouvrages prépubliés en revue en 1889, même si la publication en volume est de l'année suivante, ex: La bête humaine de Zola qui paraît en feuilleton dans La Vie populaire.

4 Je viens de publier en effet une étude qui comble en partie cette lacune : Topographie du socialisme français, 1889‑1890 (Montréal : Discours social, 1989,  212 p.)

5 On complètera la réflexion théorique de ce chapitre par notre « Introduction », en collaboration avec Régine Robin, au numéro « Social Discourse » de la revue Sociocriticism, 6 : 1988. La question de l'interdiscursivité a été abordée par l'auteur de cet ouvrage dans de nombreux articles antérieurs, notamment : « Inter‑textualité/interdiscursivité/discours social », Texte, 2 : 1983, p. 101‑112.

6  Voir le numéro « Rhétorique et littérature » dirigé par Michel Meyer, Langue française, 79 : 1988.

7  Ce chapitre reprend une étude parue dans : J. Latraverse et W. Moser, dir. Vienne au tournant du siècle, (Montréal : Hurtubise, 1988).

8  La question du boulangisme est abordée de façon différente dans une étude publiée par nous, « Idéologie républicaine, idéologie boulangiste et hégémonie doxique en 1889 », dans : Alain Goldschläger, dir. La structure du discours politique (London : U. of Western Ontario, sous presse).

9  L'auteur a publié divers articles sur le champ littéraire, qui complètent ce qu'on peut trouver dans les chapitres 35 à 37.
- « Littérature et discours social », in Eva Kushner, dir. Renouvellements dans la théorie de l'histoire littéraire (Ottawa : Société royale, 1984). p. 111‑119.
- « Le champ littéraire et le discours social en 1889 », in Albert Halsall, éd. Text and Ideology. (Ottawa : TADAC, 1986). p. 33‑54.
- « On est toujours le disciple de quelqu'un, ou Le mystère du pousse-au-crime », Littérature, n° 49 : février 1983. p. 50‑62 (sur Paul Bourget).
- « Ceci tuera cela ou La chose imprimée contre le livre », Romantisme‑XIXe siècle, juin 1984. p. 83‑104.
- « L'inscription du discours social dans le texte littéraire », en collaboration avec Régine Robin, Sociocriticism, II: 1985. p. 53-82.

10  Voir chapitre 40, « La lutte pour la vie ». Ce chapitre est une version remaniée d'une étude publiée dans G. Di Stefano (éd.), La Locution (Montréal : Ceres, 1986), p. 171‑190.

On trouvera une étude de l'auteur en collaboration avec N. Khouri qui prolonge les chapitres sur les disciplines scientifiques en traitant de l'anthropologie préhistorique : « Savoir et autorité : le discours de l'anthropologie préhistorique », Littérature, n° 50 : mai 1983. p. 104‑118.

11  Une autre forme de marginalité est étudiée dans : « Les fous littéraires », Études littéraires, 19/2: 1986. p. 135‑141.

12  Le chapitre 46 résume notamment une longue étude publiée antérieurement : « Des romans pour les femmes », Études littéraires, 3 :1983. p. 317‑350.

Pour citer ce document

, « Chapitre 2. Corpus et plan de l'ouvrage », 1889. Un état du discours social, ouvrage de Marc Angenot Médias 19 [En ligne], Mise à jour le : , URL: https://www.medias19.org/publications/1889-un-etat-du-discours-social/chapitre-2-corpus-et-plan-de-louvrage