Les journalistes : identités et modernités

Les critiques musicaux au XIXe siècle : approche prosopographique et statistique

Table des matières

EMMANUEL REIBEL

Il peut paraître douteux de s’attacher aux « critiques musicaux » du XIXe siècle comme à un type de journalistes identifiés comme tels. On sait bien qu’il n’en est rien : à cette époque, les critiques musicaux ne forment pas un ensemble nettement circonscrit, mais un agrégat de rédacteurs à l’origine et au parcours très diversifiés1.  Aussi désignera-t-on ici de façon très globale, sous l’expression de « critiques musicaux », l’ensemble des contributeurs journalistiques amenés à parler de musique dans l’espace médiatique, de façon exclusive ou non, régulièrement ou occasionnellement, dans la presse générale comme dans la presse spécialisée. En dépit du périmètre instable du groupe qu’ils forment, ces journalistes méritent de susciter une enquête prosopographique et statistique spécifique en raison de deux facteurs déterminants liés à l’histoire de la presse.

L’essor du feuilleton, en premier lieu, accorde à la musique une place nouvelle dans les grands quotidiens, qui s’intéressent aux principaux spectacles lyriques de la capitale (Opéra, Opéra-Comique, Théâtre-Italien, mais aussi théâtres secondaires). L’engouement pour les comptes rendus des spectacles de l’Opéra est lié à la place symbolique occupée par cette institution ; le genre lyrique ne constitue pas seulement le principal divertissement de la société bourgeoise, mais il possède des enjeux politiques et sociaux absolument déterminants : comme l’écrit Fétis, lorsque Meyerbeer livre un nouvel opéra, « le grand événement qui préoccupe, c’est la première représentation d’un ouvrage du maître, et pour s’y rendre, une assemblée nationale déserte son vote sur une question brûlante2 ». Un besoin nouveau se fait néanmoins ressentir : celui d’évoquer l’opéra non seulement comme sujet littéraire et spectacle théâtral, mais aussi comme œuvre vocale et instrumentale. Depuis le 7 décembre 1820, Castil-Blaze a inauguré une « chronique musicale » au sein du Journal des débats, bientôt imitée par les grands titres de la presse ; la question de la spécialisation du discours sur la musique constitue donc un enjeu nouveau, d’autant que le développement de la musique instrumentale et la naissance de grandes institutions de concerts contribue à élargir la matière du feuilleton.

En second lieu, la constitution progressive d’un groupe de « critiques musicaux » est stimulée par l’apparition et le développement d’une presse musicale spécialisée. Après la Revue musicale fondée par Fétis en 1827, la décennie 1830 voit la naissance de plusieurs titres qui s’implantent de façon durable : la Revue et gazette musicale, La France musicale et Le Ménestrel, sans compter une foule de journaux plus spécifiques, consacrés à des répertoires ou à des instruments particuliers. L’irruption de la musique dans l’espace médiatique entraîne de nombreux débats, liés notamment à des questions de légitimité (qui détient l’autorité du discours sur la musique ?), à des questions de modalité (le langage technique a-t-il sa place dans la presse ?), à des questions de finalité (quelles sont les missions de la critique musicale ?). Bon nombre de ces questions sont aiguisées par le fait que l’activité se développe dans un contexte anarchique : la prolifération des rédacteurs parlant de musique est à la fois un atout et un obstacle pour une activité qui va rapidement être attaquée au nom de la prétendue incompétence de ses rédacteurs.

Dans ces conditions, notre enquête vise à mieux comprendre qui sont les critiques musicaux du XIXe siècle : en effet, les grandes problématiques de la critique musicale s’articulent alors à la question de l’identité de ses rédacteurs.

Méthodologie

La méthodologie adoptée pour cette étude a tenté de retenir un échantillon représentatif de critiques car l’exhaustivité est utopique dans l’état actuel des recherches et les profils sont alors très divers3. Aussi a-t-on constitué un corpus en opérant une série de coupes synchroniques et diachroniques à travers le XIXe siècle. On s’est intéressé, d’une part, à l’ensemble des rédacteurs de deux journaux musicaux : la Revue et gazette musicale et La France musicale, sur la période 1830-1870 ; et, d’autre part, aux rédacteurs d’articles musicaux au sein d’un vaste ensemble de périodiques, au moment de neuf créations lyriques comprises entre 1822 et 1894 : on s’est appuyé, à cette fin, sur neuf dossiers de presse existants (tableau 1).

Date

Compositeur

Œuvre

Périodiques

1822

Carafa

Le Solitaire

17

1838

Berlioz

Benvenuto Cellini

27

1858

Halévy

La Magicienne

29

1863

Bizet

Les Pêcheurs de perles

17

1864

Gounod

Mireille

22

1867

Verdi

Don Carlos

39

1875

Bizet

Carmen

34

1881

Offenbach

Les Contes d'Hoffmann

35

1894

Massenet

Thaïs

32

Tableau 1. Dossiers de presse retenus pour constituer le corpus des critiques musicaux.

Cette méthode a permis de travailler sur un échantillon représentatif de 172 individus ; 73 d’entre eux étant recensés sur Medias19 au 8 juin 2015, il a fallu mener un travail biographique conséquent4. Différents items ont retenu notre attention : le type de formation reçue par ces critiques, leur compétence musicale éventuelle (formation spécifique, maîtrise d’un instrument), la destination de leurs articles (presse générale, presse spécialisée), le rythme de publication (occasionnel, soutenu), le principal type d’activité exercé par ces rédacteurs. D’autres seraient à prendre en compte dans une approche sociologique globale (âge, origine géographique, origine sociale) mais le cadre de ce travail ne permettait pas d’étudier un grand nombre de variables et notre perspective est fondamentalement moins socio-historique que socio-musicologique, centrée sur la pratique de la critique musicale.

Les informations restant totalement lacunaires pour 44 contributeurs, on a restreint à 128 individus l’échantillon destiné à l’étude statistique. Les résultats présentés ci-dessous sont donc à nuancer à la lumière de ces éléments. Le fait qu’un quart des critiques n’ait pas pu être pris en compte (pour l’essentiel, sans doute, des plumes non spécialisées et/ou éphémères) doit inciter à la prudence. D’autres éléments possèdent encore un impact sur les résultats : certes de moins en moins fréquents au cours du siècle, l’anonymat et la pseudonymie constituent des obstacles à toute étude statistique ; la méthode retenue conduit enfin à une surreprésentation de la seconde moitié du XIXe siècle (les résultats sont donc valables surtout à l’échelle du demi-siècle 1840-1890) et à une possible surreprésentation des critiques musicaux spécialisés – encore que les plumes de la Revue et gazette musicale ou de La France musicale collaborent également à la presse générale, comme on va le voir.

Destination des articles

Le tableau 2 montre la perméabilité importante des deux sphères que constituent la presse générale et la presse spécialisée. Il rend compte d’un phénomène déjà bien connu : de plus en plus de critiques écrivant dans des périodiques musicaux sont invités à rédiger le feuilleton d’un quotidien. Berlioz en est un bel exemple, lui qui écrit à la fois pour la Revue et gazette musicale et pour le Journal des débats, après avoir livré des participations plus ponctuelles au Corsaire, puis au Correspondant et à la Revue européenne. Parallèlement, la liste des contributeurs arborée par la Revue et gazette musicale ou par La France musicale inclut nombre d’hommes de lettres, comme Balzac ou Sand par exemple.

Tableau 2. Destination des articles des critiques musicaux

Rythme d’écriture et spécialisation

Si le tableau 3 met en lumière la fidélisation des plumes journalistiques, le tableau 4 apporte des renseignements quant au degré de spécialisation des critiques. On choisit de nommer « critiques spécialisés » ceux qui sont connus pour écrire exclusivement sur des sujets liés à la musique, et « critiques généralistes » les journalistes abordant la musique parmi d’autres sujets, au sein du feuilleton dramatique par exemple. Il est nécessaire de différencier les statistiques selon que l’on considère la presse générale ou la presse musicale : si l’on n’est guère surpris par la présence de 89% de critiques spécialisés dans la presse musicale, il est plus surprenant de voir que la presse générale accueille 44% de critiques spécialisés. Ce chiffre important est à relativiser compte tenu des réserves méthodologiques énoncées précédemment ; il représente une moyenne qui traduit une spécialisation croissante de l’activité. Si l’on avait effectué une statistique sur les deux premières décennies du siècle, 100% des journalistes parlant de musique dans la presse générale auraient été des « généralistes ». On rappellera que l’entrée en critique de Castil-Blaze, en 1820 dans le Journal des débats, avait entraîné de violentes polémiques car les feuilletonistes alors en place, littérateurs, n’avaient point voulu être dessaisis de leurs prérogatives : ils avaient voulu conserver leur autorité critique sur le genre de l’opéra, et avaient intenté un procès en légitimité à Castil-Blaze au titre que le technicien ou le savant ne saurait avoir l’apanage de l’autorité en matière de critique musicale. Si ces conflits de légitimité perdurèrent, ils furent accompagnés d’une recrudescence de journalistes compétents au sein des rédactions : l’irruption des critiques spécialisés permettait alors de contrer le procès en incompétence régulièrement intenté à la presse générale par les musiciens ou par les revues spécialisées.

Tableau 3. Rythme d’écriture : critiques réguliers ou occasionnels

Tableau 4. Spécialisation des critiques musicaux dans la presse générale (à gauche) et dans la presse musicale (à droite)

Compétence

L’approche prosopographique peut tenter de mesurer la compétence musicale des journalistes : il s’agit alors de repérer, dans les notices biographiques, la présence témoignant d’une pratique professionnelle ou amateur de la musique. Les statistiques fournies par le tableau 5 sont flatteuses, mais il faut isoler le cas des critiques écrivant dans la presse générale pour voir dans le tableau 6 que 37% des rédacteurs de chroniques musicales possèdent une compétence avérée. Ce chiffre représente sur toute la période une moyenne honorable, si l’on prend en compte le fait qu’au début du XIXe siècle, il était extrêmement faible. Il témoigne de progrès incontestables, liés aux efforts menés par la presse pour gagner en crédibilité dans ses feuilletons musicaux. Il ne faut pas négliger les revendications des compositeurs eux-mêmes, à l’instar de Franz Liszt qui écrivait dans la presse dès 1835 : « Il serait nécessaire que nul ne pût s’arroger le droit de professer et d’exercer publiquement les fonctions de critique sans avoir passé un examen préparatoire et obtenu un diplôme5. » De fait, dès le cœur des années 1830, la spécialisation de la critique est peu à peu perçue comme « une des conditions essentielles de sa force, de son utilité et, partant, de son influence sur les progrès de l’art et sur le goût du public et des littérateurs, dont cette opinion froisse les intérêts6 ». S’intéresser à la compétence musicale des critiques nécessite néanmoins d’approfondir le type de formation qu’ils ont suivi.

Tableau 5. Compétence musicale avérée des critiques musicaux

Tableau 6. Compétence musicale avérée des critiques dans la presse générale.

Formation

Ils sont nombreux à avoir fréquenté des établissements aussi prestigieux que les lycées Charlemagne, Bonaparte, Louis-le-Grand, le collège Bourbon ou la récente École des Chartes7. Certains ont mené des études de médecine mais la Faculté de droit reste la plus prisée. Tous ne poursuivent pas une carrière juridique comme Pierre Hippolyte Barbedette, à la fois juge au tribunal civil de la Rochelle et collaborateur au Ménestrel ; Castil-Blaze a néanmoins soutenu sa thèse d’avocat, et si Gustave Héquet n’a jamais plaidé, il est tout de même admis au barreau de la capitale après avoir fréquenté l’École de droit de Paris, à l’instar d’Édouard Monnais ou d’Albert Soubies. Mais beaucoup n’achèvent pas leurs études et préfèrent se tourner vers une carrière littéraire, théâtrale, musicale ou journalistique.

À côté de la médecine ou du droit, un autre type de formation est spécifiquement musical. Certains ont été élèves de l’École Choron (Scudo), d’autres du Conservatoire. Berlioz, Botte, Blanchard, Bourges, Comettant, Kastner, Panofka et Soubies, pour ne citer qu’eux, y ont fréquenté les classes d’harmonie, de contrepoint et de composition. D’autres ont suivi les classes d’instruments du Conservatoire. Il est frappant de voir que plusieurs de ces hommes ont mené de front études d’avocat et études musicales, ou qu’ils ont, plus souvent, abandonné le droit pour le Conservatoire8. Mais le tableau 7 ne doit pas masquer une autre réalité : beaucoup accèdent à la critique musicale sans formation préalable. À l’image de Lucien de Rubempré, les frères Escudier, Armand Gouzien ou Auguste Lireux viennent tenter leur chance à Paris. C’est dans la critique musicale qu’ils trouvent un véritable eldorado. L’enquête statistique sur la formation des critiques se révèle donc moins instructive que celle concernant leur activité professionnelle dominante.

Tableau 7. Formation des critiques musicaux.

Carrière

Le tableau 8 rend compte d’une belle diversité. La première sphère des critiques, la plus large, est celle des « hommes de lettres ». Romanciers, poètes, hommes de théâtre, vaudevillistes : la presse est pour eux un moyen de faire rapidement carrière à une époque où la frontière entre littérature et journalisme n’est pas clairement établie. Aucun d’eux n’est spécialisé dans la critique musicale, mais tous rédigent des feuilletons « dramatiques » au sens large. À L’Artiste, au Charivari, au National et au Siècle, Hippolyte Lucas prend en charge également des critiques de théâtre et des revues bibliographiques. À la Gazette de France, à La Quotidienne puis à L’Union, Merle est perçu comme « l’un des doyens de la presse française et du feuilleton dramatique9 ». Gustave Planche se charge à la fois de revues de salons, de critique littéraire et de critique musicale dans divers journaux, tandis que Delécluze est aussi célèbre comme critique d’art (au Lycée français, au Moniteur universel puis aux Débats) que comme critique musical, spécialisé pendant quarante ans dans les revues du Théâtre-Italien pour les Débats.

Tableau 8. Activité professionnelle dominante des critiques musicaux.

Certains sont occasionnellement librettistes : c’est le cas d’Hippolyte Lucas, Théodore Anne et Édouard Monnais. D’autres exercent des fonctions à la tête des théâtres lyriques parisiens. On songe à Louis Véron, Léon Pillet, directeurs de l’Opéra et hommes de presse, mais encore à Auguste Lireux qui vient de La Patrie lorsqu’il devient directeur de l’Odéon en 1845, et à beaucoup d’autres encore. Cette activité se déployant à la frontière ou à la confluence entre presse et opéra est très fréquente : elle obéit à différentes stratégies professionnelles (la presse comme marchepied vers une carrière théâtrale) ou médiatiques (la presse mise au service du rayonnement d’une institution théâtrale, par exemple) qui ne sont pas sans poser des problèmes de conflits d’intérêt10.

Une deuxième sphère est constituée des hommes appartenant au milieu musical. Quelques-uns sont des intellectuels de la musique, à l’instar de Fétis. Certains sont à la fois compositeurs et professeurs au Conservatoire de Paris. On peut citer là les noms prestigieux d’Adolphe Adam, qui y enseigne la composition, de François Benoist, professeur d’orgue et d’improvisation ou d’Antoine Elwart, compositeur et professeur d’harmonie. Pour ces hommes qui jouissent d’une situation professionnelle stable, la critique est un complément d’activité qui leur offre une tribune médiatique intéressante. Il en va tout autrement des critiques compositeurs dont la situation est plus précaire. Berlioz en est l’exemple le plus célèbre, mais il est loin d’être le seul à devoir « feuilletoniser pour vivre ». On songe à Théodore Labarre, auteur d’opéras, de ballets, de romances et de quelque deux cents œuvres instrumentales, mais aussi à Henri Panofka, Léon Kreutzer, ou Victorin de Joncières, auteurs d’un corpus d’œuvres très abondant. La critique est un gagne-pain précieux lorsqu’il est difficile de se faire jouer, une ressource plus indispensable encore pour qui n’a pas la muse féconde. Beaucoup se lancent enfin dans la critique après avoir renoncé à la composition. Fétis note qu’il « n’est pas rare de voir les artistes se réfugier dans la presse, à défaut de succès dans leur art11 ». C’est le cas de Scudo, qui avait acquis une grande notoriété grâce à ses romances mais qui, très critiqué, s’est replié dans la « littérature musicale », selon l’expression consacrée. Joseph Mainzer, Henri Blanchard ou Maurice Bourges ont connu le même parcours.

Le dernier groupe appartient à la sphère politique et journalistique. Certains débutent dans l’administration provinciale (Amédée Achard) ou dans la diplomatie internationale (Henri Blaze de Bury), d’autres occupent des postes importants au ministère de l’Intérieur (Jean-Toussaint Merle, Édouard Monnais, Armand Gouzien). On trouve parmi les critiques musicaux certains fondateurs de journaux de renom : Louis Desnoyers fonde ainsi en 1832 Le Charivari et concourt en 1836 à l’établissement du Siècle, dont il dirige la partie littéraire ; c’est le même homme qui remplace Fétis au National pour le feuilleton musical, et qui assure ensuite la critique musicale du Siècle. Charles Desolme, lui, fonde en 1853 Le Courrier de l’Industrie et l’année suivante L’Europe artiste, dont il est le directeur et à laquelle il collabore activement en tant que critique. On peut aussi évoquer Gustave Chadeuil, feuilletoniste musical au Siècle après la mort de son beau-père Desnoyers, fondateur du XIXe siècle et directeur d’un journal financier.

Certains critiques musicaux ont finalement consacré leur vie au journalisme, sans multiplier les fonctions extérieures : tel est le cas de Benoît Jouvin, critique musical, littéraire et dramatique fidèle au Figaro, mais aussi d’Alexis Azevedo, d’Arthur Pougin, de Joseph d’Ortigue... Ces « critiques journalistes » sont essentiellement des hommes de la nouvelle génération, écrivant sous le Second Empire et la Troisième République : à cette époque, le journalisme n’est plus forcément un tremplin vers d’autres carrières, il devient peu à peu une profession reconnue.

L’enquête devra à l’avenir être affinée et corrigée, seul l’établissement d’une base de données relationnelle permettant à terme d’établir une cartographie scientifique fiable de ce domaine foisonnant. Dans l’état actuel des connaissances, elle n’est pourtant pas sans intérêt : elle montre que par-delà une diversité d’origines et de carrières, qui fait de cette activité un point de départ, un point de passage ou un point d’arrivée, parallèlement ou non à une ou plusieurs autres activités professionnelles, le feuilleton est au fil du siècle toujours davantage confié à des personnalités issues de la sphère musicale. La figure du « dilettante » qui était la norme au début du siècle laisse place peu à peu au « critique de métier ». L’activité peut devenir, si ce n’est toujours une vocation, du moins, comme le constate Gounod en 1875, une profession12. Lorsqu’au début du XXe siècle, l’École des Hautes Études Sociales dispensera des cours de critique musicale13, l’activité, pourvue d’une formation spécifique, aura effectivement acquis le statut de véritable profession14.

(Université Paris Ouest Nanterre / Institut universitaire de France)

Notes

1  Voir E. Reibel, L’Écriture de la critique musicale au temps de Berlioz, Paris, Champion, 2005. Le présent article reprend quelques développements du chapitre 4 de ce livre, en les augmentant d’une étude statistique.

2  F.-J. Fétis, RGM, 22 avril 1849.

3  Un dictionnaire des critiques musicaux, à paraître chez Vrin, permettra d’affiner considérablement cette première étude.

4  J’ai aussi exploité une annexe non publiée de ma thèse de doctorat qui présentait à l’époque un petit dictionnaire des principaux critiques musicaux.

5  Liszt, « De la situation des artistes, et de leur condition dans la société », 5e art., GM, 1835, p. 291.

6  H. Prévost, « La nécessité de la spécialité de la critique musicale », Revue du Théâtre, 9e vol., 3e année, 1836-1837, cité par M.-H. Coudroy, op. cit., p. 212.

7  Respectivement : Adolphe Jullien, Édouard Thierry ; Jules Clarétie ; Albert Soubies, Jules Janin ; Henri Blaze de Bury, Charles Desolme, Édouard Fétis, Gustave Planche, Louis Vitet ; Hippolyte Rolle.

8  Voir Castil-Blaze, Joseph d’Ortigue, Gustave Héquet, ou encore Albert Soubies.

9  RGM, 7 mars 1852, p. 79.

10  Voir notre article « Carrières entre presse et opéra au XIXe siècle : du mélange des genres au conflit d’intérêt », à paraître sur medias19.org.

11  F.-J. Fétis, cité par FM, 30 octobre 1864, p. 345.

12  RGM, 24 octobre 1875, p. 340.

13  Voir E. Reibel, « Théoriser la critique musicale : Hellouin et l’École des Hautes Études Sociales », à paraître dans le collectif sur la critique musicale au XXe siècle dirigé par Timothée Picard.

14  Voir F. Hellouin, Essai de critique de la critique musicale, p. 138 sq.

Pour citer ce document

Emmanuel Reibel, « Les critiques musicaux au XIXe siècle : approche prosopographique et statistique », Les journalistes : identités et modernités, actes du premier congrès Médias 19 (Paris, 8-12 juin 2015). Sous la direction de Guillaume Pinson et Marie-Ève Thérenty Médias 19 [En ligne], Mise à jour le : , URL: https://www.medias19.org/publications/les-journalistes-identites-et-modernites/les-critiques-musicaux-au-xixe-siecle-approche-prosopographique-et-statistique