Jean-Baptiste Léon Dupin, critique et agent dramatique
Table des matières
BENJAMIN FROUIN et PATRICK TAÏEB
L’Agent dramatique du Midi et Le Midi artiste couvrent presque continuellement la période qui s’étend de 1840 à 1870. Cela représente trente années de parution hebdomadaire qui sont exactement contemporaines de périodiques spécialisés en musique tels que la Revue et gazette musicale de Paris et Le Ménestrel. Comme eux, ces journaux sont la partie visible d’un ensemble d’activités productives, coordonnées entre elles suivant la logique du trust qui contrôle les branches d’un secteur. Il s’agit d’une presse qui n’est pas seulement l’écho, la rumeur ou le commentaire du monde, mais aussi un instrument pour agir dans le monde et pour produire un effet sur lui. Maurice Schlesinger, par exemple, articule la publication de la Revue et gazette musicale de Paris avec ses activités d’éditeur de musique et d’organisateur de concerts, trois branches dont les synergies lucratives se comprennent sans longs commentaires. Avec les deux périodiques qui retiennent notre attention ici, nous nous trouvons plutôt à l’intersection de l’entreprise de presse et de l’agence théâtrale. Ils agissent effectivement sur ce que l’on pourrait désigner par le terme de système de production des théâtres : ils parlent peu de la vie théâtrale parisienne et ils ne sont pas non plus limités à une ville de province en particulier ; leur terrain d’action, c’est l’ensemble des théâtres des départements, c’est-à-dire le système global et non seulement Paris ou un département en particulier. L’on peut juger de leur utilité publique, de leur nécessité au sein de la profession, en constatant qu’ils ne sont pas isolés. D’autres feuilles ont paru sous des titres, dans des formes et à des fins semblables : comme Le Monde dramatique (1835-1841) – précurseur –, ou encore L’Agent dramatique : bulletin de Paris, des départements et de l’étranger édités ponctuellement en 1835 et, encore, L’Europe artiste (1853-1904) – certainement le plus pérenne et le plus consulté1. À l’exception de L’Agence dramatique de Bruxelles, publication encore obscure qui est présentée par L’Agent dramatique du Midi comme le pendant belge de ce dernier, ces journaux paraissent tous à Paris.
Les deux périodiques qui nous occupent sont l’œuvre de Jean-Baptiste Léon Dupin (1816-1867)2. Ayant obtenu son brevet d’imprimeur le 2 mai 1839, sous le prénom de son père Pierre Jemmapes3, il inaugure L’Agent dramatique du Midi dès la fin de l’année et demeure actif jusqu’à sa mort en 1867. Déclaré « Imprimeur de la mairie » de Toulouse, il s’installe d’abord au 23 rue du Four-Bastard, c’est-à-dire non loin du théâtre du Capitole, mais déménage dès 1840 à quelques numéros de là, rue de la Pomme, où toutes ses activités sont basées, excepté un rapide retour rue du Four-Bastard, et où elles lui survivront jusqu’à la fin du siècle4. En effet, la publication du Midi artiste se prolonge jusqu’en 1870, au moins, grâce à l’activité de sa fille, Mélanie Dupin, qui tient désormais l’atelier5.
L’Agent dramatique du Midi et Le Midi artiste se succèdent dans le temps sans continuité puisqu’une coupure de trois années sépare la disparition de L’Agent dramatique du Midi (18556) du premier numéro du Midi artiste (1858). L’Artiste méridional du 30 septembre 1855 nous apprend que L’Agent dramatique du Midi « est remplacé par la Presse Dramatique » et qu’il est placé sous la même direction. Il semble néanmoins que Dupin ait reçu l’aide de M. Balech de Lagarde7,le rédacteur en chef du Courrier de Tarn et Garonne, qui est un périodique de province éclairé, spécialisé dans les spectacles et la littérature8. L’Agent dramatique devient donc momentanément la Presse dramatique qui a eu une existence assez courte (août 1854-février 1856 environ), mais suffisamment d’écho pour, à l’instar de son prédécesseur, être utilisée par des journaux parisiens9. Le 30 mars 1856, L’Artiste méridional annonce que ce journal, successeur du « Doyen parmi les publications provinciales » (sous-entendu : L’Agent dramatique du Midi) a été rebaptisé Midi Artistique et que « le 7e numéro vient à peine de paraître ». Ce n’est qu’en 1859 que Le Midi artiste voit le jour en remplacement du Midi Artistique, toujours sous la direction de Dupin, comme le laisse à penser un article de la revue bordelaise La Lorgnette de juillet 1859 : « Le Midi Artiste, de Toulouse s’appelait le Midi Artistique de son nom de baptême – Dupin qui a été le parrain de tant d’autres, l’a rebaptisé Midi Artiste - é sempré bené. »
L’Agent dramatique du Midi et Le Midi artiste s’affichent par leur titre, par leur présentation et par leur contenu, comme les organes principaux d’une activité éminemment politique, intervenant dans l’organisation de la profession dramatique, et ils s’imposent avec une certaine évidence – du moins pour les périodes 1848-1851 et 1858-1864 –, comme les plus perfectionnés des journaux connus couvrant la vie des théâtres de la province pour la Deuxième République et le Second Empire. L’état des collections ne permet pas de les apprécier dans leur globalité puisque nous ne connaissons que les années 1848-1851 pour le premier et, pour les deux titres, on déplore le manque de beaucoup de numéros dans les collections de la Bibliothèque nationale de France où se trouvent les deux ensembles les plus complets connus à ce jour. Les deux titres entretiennent une très grande ressemblance dans leur présentation et dans leur contenu. La publication est hebdomadaire ou quasiment, mais le jour de parution de L’Agent dramatique du Midi est variable : toujours en fin de semaine, la date de parution tombe parfois le jeudi, beaucoup plus systématiquement le vendredi, mais parfois aussi le samedi et le dimanche. Le Midi artiste parvient à une périodicité plus régulière le dimanche. Cependant, sa diffusion par abonnement laisse planer un doute sur la ponctualité de la sortie des presses. Les deux titres ont le même format, composé de quatre pages recto verso permettant l’impression sur quatre colonnes et leur typographie n’a pour ainsi dire pas varié.
On s’en tiendra donc pour l’instant à une présentation globale, pertinente pour les deux titres, en extrapolant les observations à une uniformité supposée sur la longue durée.
Ill. 1 : L’Agent dramatique, 3 novembre 1848, p. 1.
Ill. 2 : Le Midi artiste, 17 novembre 1859, p. 1.
À l’usage des directeurs, des artistes et des gens du monde
La fréquence et l’étendue de certaines rubriques fluctuent au rythme de chaque saison, en fonction de la nécessité, et traduisent en cela cette part de l’activité de presse qui la signale comme un organe actif dans le système de production. Celui-ci est rythmé annuellement par le principe du privilège, sorte de régie intéressée mettant en relation les municipalités, les directeurs-investisseurs et les comédiens, chanteurs et danseurs, auxquels Le Midi artiste renvoie par son sous-titre de 1859 : « Agenda précis à l’usage des Directeurs, des Artistes et des Gens du Monde ».
Chaque année, ou tous les deux ans, beaucoup plus rarement trois, en fonction du succès ou de l’insuccès des directeurs dans la conduite de leurs affaires, les maires de 120 à 150 villes de l’espace francophone (métropole, Belgique, Algérie, Nouvelle-Orléans, Québec…) publient un avis de vacances de la direction entre janvier et mars dans le but de recruter un directeur de théâtre pour la saison suivante qui s’étend de septembre à mai. Le recrutement est accompli suivant une procédure relevant de l’enquête individuelle sur chaque candidat en vue d’établir leur solvabilité, leur moralité et leur compétence respectives. La sélection étant établie par la municipalité, généralement entre mars et mai, les directeurs engagés entrent dans une période d’activité consistant à recruter, à leur tour, la troupe des acteurs, danseurs et chanteurs supérieurs qu’ils engageront à partir de septembre. Par supérieurs on désigne ici, non pas les musiciens des orchestres, les choristes ou les utilités, mais bien les artistes de la troupe, ceux qui contractent pour une saison, plus rarement pour deux ou trois saisons, et occupent les cinq ou six premiers rôles dans chaque genre produit par les théâtres. Tous les théâtres entrent alors dans la période des débuts qui constituent un des phénomènes les plus fascinants de la vie théâtrale du xixe siècle pour l’historien et, pour les contemporains, un moment d’excitation et d’attractivité maximales. Le rituel consiste à présenter chaque artiste au public dans trois soirées au cours desquelles il est tenu de jouer un rôle constitutif de l’emploi pour lequel il a été recruté. Le troisième soir, l’artiste est admis ou rejeté, selon qu’il a plu ou non au public, et lorsqu’il est rejeté, le directeur se met en quête d’un remplaçant pour l’emploi laissé vacant. L’enquête ministérielle de 1858 révèle que les débuts sont aussi un phénomène de société préoccupant pour l’organisation de la vie théâtrale et inquiétant du point de vue de l’ordre public, en raison des troubles qu’ils occasionnent et de la maltraitance exercée à l’égard des artistes10. En d’autres termes, un gigantesque jeu de chaise musicale se produit chaque année à l’échelle nationale entre mai et septembre, souvent prolongé jusqu’en décembre au gré des rejets et des admissions.
Les rubriques présentes chaque semaine et tout au long de l’année, sont déclinées en « Nouvelles théâtrales » consistant en brèves informations qui couvrent l’espace national. Deux rubriques signalent les journaux de Dupin comme des périodiques toulousains, « Capitole » et « Circo Olimpico », soucieux de rendre compte longuement de la vie théâtrale locale en focalisant le propos sur les deux salles principales de la ville. Celles-ci consistent en annonces et, beaucoup plus souvent, en comptes rendus des représentations de la semaine, et elles sont majoritairement signées par Dupin. L’on trouve aussi une rubrique intitulée « Beaux-Arts » dans laquelle il est question d’architecture, de sculpture, de peinture ou d’aménagements urbains et de manifestations relatives à ces sujets11. D’autres rubriques apparaissent et disparaissent au gré des événements : « Jurisprudence théâtrale », « Nouvelles diverses », « Nécrologie » et « Courrier de Paris » dont l’objet est toujours la vie théâtrale, voire musicale mais plus rarement, même si les titres relèguent cette spécialisation dans l’implicite.
Une dernière rubrique, un peu moins régulière, est intitulée « Mouvement théâtral ». Elle annonce le placement des artistes ou des directeurs dans les troupes des départements et offre par là un point de vue privilégié sur un très grand nombre de phénomènes relatifs à la population et au métier des directeurs et des artistes dramatiques supérieurs. On peut en évaluer le nombre dans une fourchette comprise entre 1 500 et 3 000 actifs chaque année et leur recensement entre 1840 et 1870, s’il était possible, s’élèverait à plus de 12 000. Elle est complétée en automne par la publication en quatrième page de la plus remarquable des rubriques soumises au rythme saisonnier qui est intitulée « Personnels officiels des théâtres de province » et consiste en tableaux de troupe.
À l’automne, Dupin rend publique la composition des troupes de ces nombreuses villes en s’efforçant de les tenir à jour aussi longtemps que se prolongent les débuts. Ils disposent pour cela d’un réseau de correspondants que l’on devine assez dense et dont certains alimentent la rubrique des comptes rendus de spectacles. On devine aussi que ces tableaux sont communiqués au journal de Dupin via les « prospectus » publiés par les directeurs dans le courant du mois de septembre pour annoncer au public et aux autorités les règles de l’abonnement et les ambitions de la saison, et pour fournir un état précis de leur personnel artistique et administratif. Des centaines de ces artistes sont répertoriés, localisés et accompagnés d’un qualificatif sur l’emploi occupé. En 1848, on en compte 32 en l’espace de cinq mois, et entre septembre 1859 et décembre 1861, on relève 100 tableaux de troupe couvrant un espace géographique francophone considérable, incluant Blidah, Constantine, New York et Bruxelles, en sus de plus de 100 villes de la métropole.
Ill. 3 : Tableaux de troupe, Le Midi artiste, 4 décembre 1859, p. 4.
Cette collecte d’informations inspirée par un penchant assumé pour la statistique l’est aussi par la volonté de servir et de contrôler l’ensemble du système de production. Elle est complétée, mais plus rarement, par les tableaux intitulés « Artistes en disponibilité » dont l’intérêt, pour l’historien, est considérable. Elle recense un nombre élevé d’artistes dont on sait qu’ils ont fait appel au service de Dupin pour leur placement saisonnier12. Elle offre en outre un état particulièrement à jour, et complémentaire des tableaux de troupe, sur la situation de chaque artiste et elle renseigne également sur le fonctionnement des débuts au cours des mois de septembre à décembre. Les deux rubriques s’adressent avec évidence aux artistes autant qu’aux directeurs et c’est la raison pour laquelle on trouve des numéros de cette publication dans les archives des théâtres et des municipalités.
La rareté de ces deux journaux dans les fonds publics, et par conséquent de ces tableaux eux-mêmes, ne permet pas de saisir en totalité l’activité de Dupin comme agent, mais ils jettent un peu de lumière sur celle-ci et sur son articulation avec le lectorat.
Deux et demi pour cent sur la totalité des appointements
La vocation de L’Agent dramatique du Midi est professionnelle au sens où il s’adresse à la profession pour proposer ses services à chacun et globalement au système dont il se fait acteur, c’est-à-dire, tant aux directeurs qu’aux artistes ou aux autorités (maires et conseils municipaux). Cette vocation s’affiche sans fard dans la partie supérieure de la première page. L’Agent dramatique du Midi est vendu 35 centimes par numéro, mais en dehors de la localité de Toulouse, on ne sache pas qu’il ait connu une diffusion au numéro. Il propose deux régimes d’abonnement d’un an ou de six mois aux tarifs de 17 et 9 fr, ou bien de 20 et 11 fr, suivant que l’on s’abonne à Toulouse ou dans un autre département. Il se déclare « correspondant des théâtres » et se présente comme l’organe d’une « Association des agences théâtrales de France et de l’étranger : Toulouse, Bruxelles et Milan ». Dupin représente la première, Hubert et Rossi-Galiano les deux suivantes. Une mention publicitaire en rapport avec l’activité de l’agence, portée à droite de la page de titre, indique qu’un droit de 2 % – puis 2,5 % à l’époque du Midi artiste, ou 5 % pour le placement de représentations particulières, sans doute plus ponctuelles dans le cadre d’une tournée –, est perçu à l’avance sur les traitements des artistes qui feraient appel à Dupin pour leur placement. Un pourcentage qui, sans doute, donne lieu à une évaluation préalable, puisque la moitié est restituée en cas d’échec. Cette mention, parfois redoublée par des annonces insérées au sein du périodique, et récapitulant les services offerts et les conditions proposées, fait pendant à la rubrique « renseignements » du chapeau où il est indiqué qu’un « tableau des artistes en disponibilité est envoyé à tous les directeurs de théâtre » et que les « acteurs souhaitant y figurer doivent payer 5 frcs par an ». Le Midi artiste perpétue ces rubriques et ces pratiques ; les tarifs de l’abonnement évoluent et intègrent l’étranger : pour un an, il est de 18, 20 et 25 fr (Toulouse, « Départ.[ement] », Étranger) et pour six mois, de 10, 12 et 15 fr ; un tarif est proposé également pour des « insertions » suivant qu’elles figurent en « Annonces, la ligne ordinaire », en « Avis Divers aux Annonces » ou en « Réclames dans le corps du J.[ournal] ».
L’activité de l’agence peut être complétée par le papier à lettre pré-imprimé dont on trouve des exemplaires adressés aux maires de Montpellier et de Carcassonne13. Il fournit des éléments sur le réseau professionnel dans lequel Dupin s’insère et qui justifie le sous-titre de L’Agent dramatique du Midi : « Correspondant des théâtres ». Dupin est lié à d’autres agents localisés à Marseille, Paris et Bordeaux. Il se pose en intermédiaire en annonçant que les « tableaux d’artistes en disponibilité » sont envoyés à tous les directeurs de théâtre et en déclarant que tous les abonnés du journal peuvent y figurer. Cela décrit deux cercles concentriques d’artistes : les abonnés du journal et ceux qui, de surcroît, recourent à l’agence pour leur placement en échange d’un pourcentage « sur la totalité des appointements14 ». Son courrier affiche au grand jour les critères qui régissent la profession (emploi, répertoire) et complète la liste des services par la circulation des « Brochures de musique » (partitions) en pratiquant l’achat, la vente et la location.
Peut-on évaluer l’ampleur du réseau tissé par le périodique de Dupin, au sein duquel son activité d’agent a pu se déployer ? Il n’est pas certain que l’ensemble du territoire traité dans le journal ait été recoupé par une activité de placement. Cette dernière est avérée de diverses manières dans le Sud (Montpellier, Perpignan, Béziers, Nîmes, Bordeaux et, peut-être, Toulouse), mais la diffusion effective des deux journaux est mal connue. Les tableaux de troupe consultés pour la période allant d’août à décembre 1848 (32 villes ; voir tableau 1) couvrent un espace métropolitain incluant Liège et Turin, et parcourant tout le territoire du nord au sud et d’est en ouest.
Douze ans plus tard, le réseau s’est élargi vers l’étranger et s’est densifié dans l’espace métropolitain (voir tableau 2). L’on remarque l’Afrique du Nord (Algérie et Égypte), l’Amérique du Nord (Nlle-Orléans et New York) et, plus surprenant, Ostende ou Hambourg, qui montrent l’ambition du journal et, peut-être, de l’agence, de couvrir le réseau des troupes francophones sans limitation géographique. Le détail des directions pour la ville de Bruxelles montre jusqu’à quel point la matière du journal repose sur une correspondance qui vise à renseigner le professionnel avec précision15. Le réseau laisse croire à l’existence de plusieurs dizaines de correspondants.
Tableau 1 : Villes dont L’Agent dramatique du Midi procure des tableaux de troupe (août-décembre 1848)
Tableau 2 : Villes dont Le Midi artiste procure des tableaux de troupe (septembre 1859-décembre 1861)16.
Il se peut que ces correspondants soient les mêmes que les observateurs loquaces dont Le Midi artiste publiait régulièrement les comptes rendus de représentations. Il est fort probable que des directeurs informaient directement le journal au sujet de la composition de leur troupe et de leurs nécessités. L’ampleur de ce réseau montre par ailleurs que Dupin s’était acquis une notoriété dans le système de production nationale, une notoriété dont nous ne connaissons aucun équivalent pour cette profession à la même époque. Elle explique la présence dans ce second périodique d’une rubrique que sa richesse informative et sa réactivité désignent comme un outil de gestion hors pair pour les directeurs et les artistes.
L’Agenda dramatique occupe quatre à six colonnes des pages 2 et 3 de chaque numéro du Midi artiste. Dans le numéro du dimanche 9 octobre 1859, c’est-à-dire au commencement de la saison, il est introduit par un chapeau qui établit le lien entre les informations publiées et l’activité de l’agence :
Au moment où tous les théâtres de province s’ouvrent, nous invitons les artistes libres d’engagement et ceux auxquels l’épreuve des débuts ne serait pas favorable, de nous aviser immédiatement en nous donnant les renseignements les plus précis : prétentions et répertoires. Plusieurs demandes nous sont faites, et la correspondance en pareille occasion ne saurait, on le sait, souffrir le moindre retard. Nous sommes à la recherche de divers emplois.
La rubrique est vouée à la publication d’annonces qui peuvent émaner de directeurs, de municipalités ou d’artistes. Dans le numéro du 27 novembre 1859, on lit, par exemple :
Nous composons en ce moment une nouvelle troupe dramatique pour Castelnaudary et les autres villes du privilège qui en dépendent où on jouera le drame, le vaudeville et l’opérette. Les artistes encore libres d’engagement sont invités à nous donner sans retard le communiqué de leurs répertoires et prétentions. Le début de la troupe est fixé aux premiers jours de décembre. La durée de l’exploitation est de 5 mois.
Elle est déclinée en catégories (« Mutations, Engagements », « Artistes en représentation », « Artistes libres d’engagement », « En représentation ») servant à classer les informations brèves et précises du type : « M. Alexis, première basse en tous genres, est engagé à Perpignan : nous parlerons prochainement de ses débuts » ; « M. Desbau, premier rôle au théâtre de Limoges, vient de résilier avec M. Joset. Il est libre d’engagement. ». La liste des « Artistes libres d’engagement », très fournie, est classée par qualificatif d’emploi : « TÉNORS DE GRAND OPÉRA : – MM. Bovier-Lapierre, – Chemont, – Chambon, – Gabriel Arnaud. TÉNORS LÉGERS : etc. »
Enfin, l’Agenda dramatique finit avec un texte narratif d’une certaine étendue. Intitulé « Débuts et rentrée », il raconte le déroulement de ce rituel sur tout le territoire couvert, un rituel décliné en centaines d’épreuves, et il diffuse largement ses jugements sur les artistes et leur prestation ; comme dans l’extrait suivant, du 3 novembre 1859 :
Le second ténor double qui débute à Marseille, M. Altavila, a joué deux fois Lucie [de Lamermoor] ; après M. Armandi, c’est deux fois de trop. M. Altavila qui débute dans le répertoire français, semble un peu embarrassé dans son jeu, sa tenue, son accent et sa prononciation surtout, laissent beaucoup à désirer ; il a de l’âme, de l’intelligence et beaucoup de bonne volonté ; mais sa voix, presque toujours gutturale, ne manque ni de force, ni d’étendue. On dit que son répertoire est excessivement restreint. Mademoiselle Listchner, chanteuse légère de grand opéra, et Mademoiselle Olivier, première dugazon, ont été reçues.
À la lecture de cette rubrique, on mesure le pouvoir d’une telle publication sur la carrière des artistes et les risques de clientélisme qui résultent de la proximité des diverses activités de Dupin. On comprend aussi où l’agent se situe dans le système. Dupin n’est pas un Joseph Schürmann, pur produit et, en même temps, bénéficiaire du vedettariat, qui définissait sa tâche en se déclarant promeneur de célébrités et débutait dans la carrière en promenant Sarah Bernhardt17. Dupin ne s’occupe pas des idoles, d’une Adelina Patti, par exemple, au revenu annuel évalué à 800 000 francs et dont le moindre pourcentage constituait une rente pour son impresario, mais d’une population nombreuse constituant un corps de métier aux salaires modérés et faiblement différenciés. Ses périodiques sont un instrument de gestion efficace au service de l’agent dramatique et, sans doute, il était fatal qu’ils ne se bornent pas à ces fonctions d’illustration, de communication et de gestion : leur qualité assure à l’agent et critique une audience dont il tire parti pour d’autres fins, littéraires et politiques.
République : décentralisation ou libéralisation ? (1848-1864)
Au cours des quatre années incomplètes dont nous disposons, L’Agent dramatique du Midi a maintenu avec constance plusieurs rubriques dont l’existence et le contenu le situent dans les usages courants de la presse théâtrale de son temps.
En pied de page, dans un bandeau réparti en quatre colonnes et débordant parfois sur la page 2, se trouve un « feuilleton » littéraire qui est parfois remplacé par un article généraliste ou fantaisiste sur un sujet plus ou moins relatif à la vie théâtrale. Pendant plusieurs mois18, un certain Ch. Ribeyrolles19 alimente le pied des pages 1, 2 et 3, avec un roman historique intitulé La Compagnie de la mort. Révolution de Naples (1647), aux accents dumasiens. « M. G. » prend la relève en novembre en fournissant la matière du feuilleton des trois journaux suivants, intitulé Les Paysans du Midi de la France où, après un préambule déplorant la préoccupation dominante des écrivains et des penseurs tournés vers la vie parisienne, il décrit le mode de vie des montagnards du Sud. Sa rhétorique se situe à mi-chemin entre le récit de voyage, à la manière de Mérimée, et la nouvelle sandienne, sans que l’on décèle toutefois un talent supérieur. Il semble que le journal ait éprouvé quelque difficulté à attirer de grandes plumes, peut-être en raison de son ostracisme déclaré à l’égard de la capitale. Par la suite, de l’hiver 1848 à 1851, la matière du feuilleton est livrée à une telle variété de sujets et de formes qu’il est difficile d’en définir la ligne, si ce n’est dans le choix des auteurs qui sont principalement provinciaux et plutôt républicains. Le feuilleton consiste en une succession d’articles pillés et ponctuels au contenu plus ou moins fantaisiste comme on peut en juger par un échantillon de leur titre : Une veille de noce par Victor Joly20 (01/12/1848) ; Faut-il battre sa maîtresse ? Question de droit galant par J. B.21 (08/12/1848) ; La Fontaine de Nîmes, par Pradier par Eugène Bresson22 (17/01/1851) ; Lettres parisiennes par un Allemand. La Musique à Paris par H. Seuffert (26/01/1851) ; Les Progrès du langage industriel par Plumichet (22/02/1851) ; Une partie d’écartée. Souvenir de Madrid par Maximilien Banul (29/06/1851). Les titres aussi dissimulent parfois la préoccupation récurrente et commune des contributeurs. Celui de Fernand Cortez ou la Conquête du Mexique, Tragédie en cinq actes et en vers, Par M. Paul Barbe, d’Avignon, cache un éloge des auteurs dramatiques des départements servant d’argument à la décentralisation littéraire de la France. Ils annoncent le sous-titre adopté en 1861 par Le Midi artiste, « Association des écrivains du Midi », et alimentent une ligne politique constante de revendications en faveur des théâtres des départements. Ces feuilletons permettent encore à Dupin, par un jeu d’allusions discrètes et par le choix des auteurs, d’afficher une orientation politique et sociale conforme à son credo : l’amélioration des conditions de vie d’une classe professionnelle modeste, voire très modeste23.
Au cours des mois d’août à octobre 1848, Dupin publie régulièrement en première page une rubrique intitulée « Toulouse ». Le nom de la ville ne désigne pas le sujet de la rubrique ; l’actualité de la ville est couverte à l’intérieur du journal dans les rubriques « Capitole » et « Circo Olimpico », ou « Théâtre des Variétés » dans Le Midi artiste. Toulouse désigne ici le lieu depuis lequel se fait entendre la voix de l’éditorialiste. Un lieu décentré, c’est-à-dire loin du centre parisien, et parlant pour toute la périphérie. L’article est en première page et il couvre l’actualité des théâtres de tout le territoire sur un ton politique particulièrement aiguisé en 1848 et au début des années 1860. Son objet principal, décliné sous des angles variés dans chacun des numéros, c’est la centralisation du système français de production. L’éditorial portera même le titre de « bulletin de la décentralisation » dans certains numéros du Midi artiste. Pour son rédacteur, la centralisation du système comporte une injustice dénoncée âprement de numéro en numéro. Elle tient dans le fait que l’État subventionne les théâtres parisiens en utilisant la contribution des Français, de tous les Français, sans aider les théâtres des départements.
Lors d’une implication individuelle, Dupin avait expérimenté la difficulté de réformer un système caractérisé par la modicité des subventions municipales et par le nombre élevé des candidats à la direction théâtrale. Le 12 octobre 1844, le maire de Toulouse faisait imprimer une affiche pour la mise en concours de la direction théâtrale à la suite de la faillite du dernier directeur24. Dupin envoyait alors une lettre pour postuler au nom d’une « société anonyme sous la gérance de M. J. Dupin » et placer comme administrateur de la troupe un certain M. Girel. Mais au lieu de se plier aux conditions indiquées par l’affiche, celui-ci tenta d’imposer ses conditions et, outre une subvention de 20 000 fr. pour l’année qui se terminait25, il demanda une subvention de 30 000 fr. pour les années suivantes. Il ne fut pas retenu et c’est M. Lafeuillade, moins exigeant et recommandé par le directeur en faillite, qui obtint la place.
En août 1848, Dupin se fait le porte-voix acerbe de remarques publiées dans plusieurs autres périodiques commentant la subvention de 680 000 fr votée par la Chambre en faveur des théâtres parisiens, exclusivement, en compensation des difficultés occasionnées par les troubles insurrectionnels de février et de juin. Outre la discrimination opérée par la destination de cette manne nationale vers Paris, Dupin souligne l’effet cumulé qui résulte de la contribution des villes à la prospérité parisienne : c’est qu’elles ne soutiennent par leur théâtre local, estimant qu’elles ont déjà contribué au soutien de l’art dramatique via l’impôt. Cette concentration, d’après son analyse, serait la cause principale de la misère des théâtres des départements.
Dupin exploite la rubrique dans un sens ouvertement partisan soit en l’alimentant lui-même, soit en donnant la parole à des correspondants. En août 1848, toujours, il publie une lettre anonyme adressée à lui, le priant de produire un « projet d’organisation des théâtres » et lui déclarant : « Mieux que personne, vous êtes en position de prendre l’initiative à ce sujet. » Un autre correspondant lance un appel à la paix civile, indispensable au bon fonctionnement de l’art dramatique, en reprenant à son compte le discours pacificateur de la bourgeoisie parisienne de plus en plus inquiétée par les mesures sociales de la IIe République. L’appel s’adresse aux « spéculateurs, entrepreneurs, commerçants, marchands de toute espèce, capitalistes, rentiers et propriétaires » dont l’implication financière garantit le fonctionnement des théâtres sur tout le territoire, et il précise le projet en plaidant pour l’« Association », celle des théâtres des départements, entendue comme la nécessité de constituer un groupe de pression et de coordonner l’activité pour garantir le bon fonctionnement du système global. Et il mentionne la tenue prochaine d’un « congrès artistique en vue d’une association générale de toutes les scènes autres que celles de Paris », ébauchant une stratégie d’encerclement du centre par une périphérie unifiée26.
La discussion entre Dupin et les correspondants dont il publie les contributions porte sur le rôle de l’État et sur la libéralisation versus la décentralisation. Au point qu’en octobre, Dupin, qui fait mention de son amitié avec Gustave Laissac, procureur général près la cour d’appel de Montpellier et oncle du maire républicain Alexandre Laissac, lance un appel personnel à ceux qu’il appelle « les hommes compétents et dévoués à la sainte cause de l’art dramatique27 ». Il entend élaborer collectivement une réforme théâtrale28 qui tranchera des questions touchant à l’ouverture à la concurrence (à laquelle Dupin s’oppose), à l’abolition des privilèges, à la liberté des répertoires, à la fiscalité (notamment au droit des pauvres) et à la censure. En somme, dès 1848, Dupin utilise son audience auprès de la profession pour alimenter un débat hautement politique auquel l’Empire mettra un terme par le décret de libéralisation des spectacles de 186429. Et sa contribution relève autant de la liberté d’exprimer une opinion intéressée – celle d’un agent dont la prospérité est en rapport avec celle des théâtres des départements –, que de l’expertise argumentée et fondée sur une enquête. Au cours des mois suivants, il publie les comptes rendus de sa « Tournée » d’inspection dans les théâtres du Sud. Ceux-ci consistent en rapports financiers et historiques (rétrospectifs sur vingt ou trente ans) sur les théâtres de Béziers, Perpignan et Carcassonne dans lesquels il souligne les difficultés de fonctionnement et incrimine l’insuffisance de l’implication des municipalités.
La direction habile de M. Dupin (Carcassonne et Montauban, 1850)
Peu après cette enquête, Dupin entreprend à nouveau de « mettre en pratique » ce qu’il appelle son « système d’association » ou sa « théorie30 ». Fort de ses rôles de journaliste et d’agent, et même de commentateur politique, Dupin tente de passer à l’expérience de la direction. Il s’adresse aux maires de Carcassonne et de Montauban pour se mettre sur les rangs à partir de la rentrée de septembre 185031. La proposition est une direction en association avec les artistes d’une durée de deux mois et demi qui serait prolongée en cas de succès. L’offre est ambitieuse : avec une trentaine d’artistes, il se fait fort de donner l’opéra-comique, le drame, la comédie, le vaudeville « et peut-être aussi le grand opéra ». À Montauban, il demande une aide a priori de 4 000 francs pour l’année, sans l’obtenir ; à Carcassonne, épaulé par Émile Petit, il réclame une aide de 500 francs en novembre pour venir au secours de sa troupe qui a peu joué, et sans profit, pendant le mois d’octobre. Finalement, Dupin paraît en difficulté à travers cette expérience de l’automne 1850, mais il est remarquable pour nous que sa position de journaliste ait joué favorablement en sa faveur. Devant renseigner son confrère sur la moralité, la solvabilité et la compétence de Dupin, le maire de Montauban exprime sa confiance, fondée sur le fait, écrit-il, qu’il « est à la tête d’un journal (L’Agent dramatique) ». Cette considération a donc suffi pour crédibiliser la candidature de l’agent-journaliste et pour donner de la vraisemblance à sa prétention de « dépasser […] toutes les promesses [faites] par d’autres directeurs avec lesquels il est en concurrence » car sa position dans la presse garantit, aux yeux du maire, sa faculté de recruter de « bons artistes ».
Cependant, il semble qu’il ait eu quelques difficultés à Montauban aussi, car il n’ouvre le théâtre qu’un mois après son départ de Carcassonne (début novembre) au lieu de l’ouvrir le 15 novembre, comme prévu. Ce retard peut être dû à celui de la réfection de la salle qui est inaugurée par la troupe de Dupin début décembre 185032. Le Daguerréotype théâtral (journal parisien) annonce l’événement avec enthousiasme dans son numéro du 11 décembre :
Montauban – Le théâtre de Montauban vient de faire une brillante ouverture, sous la direction de M. J. Dupin, directeur gérant de l’Agent Dramatique, journal artistique de Toulouse. [...] Les ouvrages ont été bien interprétés ; les costumes et les décors étaient irréprochables. Tout présage un heureux avenir à ce théâtre tant qu’il sera sous la direction habile de M. Dupin.
Ce soir-là, le programme est ambitieux. Il comporte l’ouverture de Zampa, un prologue récité de M. Ferrand Mazères, La Mémoire du diable (comédie-vaudeville en 5 actes), Le Maître de chapelle (opéra-comique en deux actes de Paër et Gay) et Le Lait d’ânesse (comédie-vaudeville en un acte de Dupaty et Lurieu). Mais l’affaire tourne mal assez vite pour Dupin qui voit quelques-uns de ses artistes, et en premier chef son administrateur Émile Petit, se retourner contre lui et le mettre en procès le 30 décembre 1850. Les artistes ont profité du départ de Dupin, parti en quête de costumes nécessaires à la représentation des Mousquetaires de la Reine, pour manigancer contre lui, puis pour refuser de jouer et lui demander 57 000 fr. Dupin gagne la faveur des juges, mais la société des artistes est dissoute. Le procès est retranscrit, comme on s’en doute, dans le premier article de L’Agent dramatique du 3 janvier 1851. Sa substance provient pour une grande part d’un article rédigé auparavant par M. Balech de Lagarde, dont nous avons déjà parlé comme d’un proche de Dupin, et publié dans le Courrier de Tarn et Garonne.
Ill. 4 : Carte du réseau ferré reliant les villes des « huit départements de la région du sud-est de la France33 »
L’opiniâtreté de Dupin se mesure à la persistance avec laquelle il alimente encore le débat au cours des années qui conduisent au décret impérial sur la libéralisation de la vie théâtrale, en 1864. Dans les années 1860, sa position au sein du système le désigne comme le principal diffuseur d’une brochure d’un homme du Midi, Rédarez Saint-Rémy, qui, spéculant sur les commodités offertes par le réseau ferré du Sud de la France, propose au ministère des Beaux-Arts un projet utopique d’organisation des spectacles – un projet inspiré, peut-être, par le système d’association de Dupin. Les deux idées fortes de la proposition tiennent dans l’augmentation de la subvention municipale et dans la mutualisation des moyens humains. Cette dernière consiste à centraliser l’organisation au sein d’une direction régionale unique desservant les villes du Sud, grandes, petites et moyennes, de Toulouse à Toulon et d’Orange à Perpignan. Le périmètre envisagé inclut, outre les villes déjà citées : Marseille, Aix, Arles, Tarascon, Avignon, Nîmes, Alès, Montpellier, Sète, Clermont-L’Hérault, Béziers, Narbonne, Carcassonne, Castelnaudry et Villefranche.
Compétence et autorité critique de Dupin (Galli-Marié à Toulouse, 1859)
Quelle compétence et quelle autorité Dupin avait-il ? A-t-il été influent de quelque manière sur la vie théâtrale de son temps ? Il est toujours hasardeux de prétendre évaluer à distance les compétences d’un critique en matière d’interprétation. Les voix et les personnalités artistiques passées par le théâtre du Capitole qui inspirent une chronique hebdomadaire nous sont, naturellement, inconnues. Cependant, le vocabulaire et le style argumenté de Dupin trahissent une maîtrise des termes techniques, une finesse de l’analyse et, parfois, une fermeté d’opinion. Un incident d’une certaine gravité dans le registre de la critique d’interprète fournit les éléments de cette évaluation parce qu’il concerne Célestine Galli-Marié, cantatrice devenue immortelle au cours des quinze années suivantes par le fait d’avoir créé les rôles-titres dans Mignon (Ambroise Thomas, 1866) et Carmen (Georges Bizet, 1875).
Le Capitole la recrute pour occuper l’emploi de « forte chanteuse » au cours de la saison 1859-1860. On dirait désormais mezzo-soprano pour qualifier la tessiture. Mais le terme employé désigne à l’époque un profil plus général, élargi à la physionomie et au jeu. Surtout, il désigne un répertoire, celui des héroïnes romantiques créées par Rosine Stoltz ou Cornélie Falcon au cours des années 1830-1840 dans le genre du grand opéra. Les trois épreuves de débuts ont lieu avec les rôles de Catarina (La Reine de Chypre, Halévy), Léonor (La Favorite, Donizetti) et Fidès (Le Prophète, Meyerbeer), les 14 et 18 octobre, et le 30 novembre. Dès le 20 octobre, Dupin exprime ouvertement son insatisfaction :
Madame Galli-Marié sait chanter, sa voix est même fort agréable ; mais, pas la moindre étincelle du feu sacré que nous avons applaudie chez son père ne se révèle, ni dans la physionomie, ni dans le jeu de l’artiste34. Elle a chanté l’air du deuxième acte dans la Reine de Chypre avec une froideur désespérante. C’est une statue de marbre.
La charge est très inhabituelle pour un organe de presse de province dont le rôle convenu, lorsque la salle exprime un avis contradictoire, est plus souvent d’apaiser les oppositions en raison des débordements très violents auxquels celles-ci donnent parfois lieu35. Le Journal de Toulouse, organe que l’on dira officiel parce qu’il est une déclinaison locale d’un journalisme modéré dont toutes les grandes villes sont pourvues, joue ce rôle. Il publie le 19 octobre une lettre du directeur du théâtre de Nîmes à seule fin d’avertir des dangers d’une trop grande sévérité et d’inciter le public toulousain à l’indulgence à la suite du rejet d’un chanteur, le soir même de la première épreuve de Galli-Marié36. Le lendemain de cette soirée, il se borne à mentionner dans la plus grande neutralité l’admission de deux artistes et le rejet d’un troisième, sans évoquer la prestation de Galli-Marié : « Hier, quelques débuts ont eu lieu dans la Reine de Chypre. À la fin du spectacle, le régisseur a annoncé l’admission de MM. Vincent et Bolzaguet, danseurs. M. Vincent, baryton, n’a pas été admis. »
Au cours des semaines suivantes, Dupin traque les apparitions de la chanteuse et les commente avec une âpreté croissante au travers de laquelle s’exprime, à n’en pas douter, bien plus qu’un jugement sur sa prestation. Rendant compte des débuts, le journaliste-agent mène un combat en faveur d’une réforme de la composition des troupes lyriques qui concerne l’emploi qu’elle tient. En effet, l’on sait par ailleurs que Dupin agit en faveur d’un dédoublement des emplois de « forte chanteuse » et de baryton dans les grands théâtres. Il s’agit d’imposer l’idée, peut-être pertinente au regard du répertoire de l’époque, que la Falcon et la Stoltz sont deux voix distinctes, l’une étant plutôt contralto et l’autre mezzo – pour reprendre une terminologie qui s’insinue alors dans le jugement et qui prévaut depuis. Des lignes acerbes – le mot n’est pas trop fort – sont écrites par Dupin durant plus de deux mois, au point que la chanteuse, qui pour être débutante n’en est pas moins avisée et dotée d’une belle fermeté de caractère, fait intervenir un huissier pour rappeler au journaliste les limites de son droit d’expression. Dupin ne faiblit pas, au contraire ; il utilise l’incident contre la chanteuse auprès de son lectorat, dont on se souvient qu’il est composé de directeurs et de concurrentes, en publiant le compte rendu suivant :
Madame Galli-Marié nous a fait signifier par ministère d’huissier qu’il y avait un juge au-dessus de nous deux. Nous n’en avons jamais douté. […] Nous savons fort bien qu’au public appartient le droit de juger en dernier ressort les bons et les mauvais artistes ; nous n’avons pas attendu à ce jour pour l’apprendre ; mais ce que Madame Galli-Marié semble ignorer, elle presque novice au théâtre, c’est le devoir de l’écrivain qui apprécie avec impartialité. […] Oui, Madame, vous êtes comédienne, ni cantatrice assez exercée pour avoir été irréprochable dans les rôles de la Favorite et de la Reine de Chypre qui ont servi à vos premiers débuts. Soit émotion ou incapacité, vous avez commis des infractions que le bon goût repousse et que nous avons signalé[es]. Nous avons dit encore nos appréciations sur l’insuffisance de vos moyens pour les rôles qui vous sont dévolus par droit d’engagement37.
Les analyses critiques de la voix et du jeu de Galli-Marié, pour être exagérées, recourent à des critères précis. Le 27 octobre, il écrit que « sa voix est agréable et juste, insuffisante dans les cordes élevées et les tons graves », en conséquence de quoi, elle « n’est donc ni une Falcon, ni une Stoltz. – emploi pour lequel elle est engagée ; – c’est tout simplement un mezzo-soprano limité ». Sûr de son jugement, Dupin persiste et signe, y compris le 4 décembre, dans le numéro du Midi artiste qui suit la proclamation publique de l’admission de la chanteuse par le public toulousain :
Théâtre du Capitole. […] Mercredi. Le Prophète, pour le troisième début de Madame Galli-Marié, forte chanteuse (Stoltz). […]
Ah vous dirai-je, maman,
Ce qui cause mon tourment.
Ce n’est pas mon embarras pour vous apprendre l’admission de Madame Galli-Marié, ce sont les éloges que je voudrais pouvoir lui adresser ; ne l’ayant point applaudie, comme j’espérais être dans l’obligation de le faire, je ne sais plus maintenant quelle formule employer à son égard. Engagée comme première forte chanteuse contralto, j’ai vainement cherché à découvrir les notes graves qui caractérisent les termes de son emploi respectif et de ses obligations vocales, je n’ai entendu qu’une voix fraîche, dont le médium constitue toute la beauté. C’est sans doute quelque chose qu’une mezzo soprano, comme qui dirait, composition préparée qui n’est ni chair, ni poisson ; mais un entre-mets quelque succulent qu’il soit, a-t-il jamais suffi au service d’un dîner ? Le bouilli et le rôti sont toujours indispensables. Il en est de même pour Madame Galli-Marié, elle n’a qu’une seule corde à sa chanterelle et elle la fait vibrer tant qu’elle peut ; ne lui demandez pas autre chose, la plus belle fille du monde ne peut donner que ce qu’elle a.
L’épreuve que Madame Galli-Marié a subie, mercredi soir, dans Le Prophète et par le rôle de Fidès, n’a donc pas complètement satisfait ; mais elle a été parfaitement secondée par Bovier-La-pierre et Madame Rauïs, qui a donné au personnage de Berthe, quelque effacé qu’il soit, une véritable importance. La scène de reconnaissance, dans l’église de Munster, scène qui a elle seule est tout un rôle, n’a été favorable ni à la chanteuse, ni à la comédienne. Nous n’avons à constater qu’insuffisance et inexpérience. Pas une main n’a battu ; la plus complète indifférence a accueilli le plus intéressant tableau de l’opéra de Meyerbeer ; et pourtant, Madame Galli-Marié a été admise. Une considération a sans doute prévalu en sa faveur. Est-ce à cause de l’époque avancée de l’année théâtrale et la crainte de ne pas la remplacer avantageusement ? Est-ce pour les espérances que sa jeunesse peut faire concevoir ? Toujours est-il qu’on a fait preuve d’une grande indulgence à son égard. Puisse-t-elle, maintenant, par le travail et l’étude prouver de sa reconnaissance et justifier l’opinion de ses bienveillants protecteurs. Nous serons des premiers à encourager ses efforts.
Il y aurait beaucoup à dire sur les partis pris de cette critique qui encense Bovier-Lapierre, un artiste que l’on retrouve sur les listes de protégés de l’agence. Mais ce sont les suites de la carrière qui offrent un éclairage fin sur le jugement du journaliste. Les remarques péjoratives adressées à ses qualités d’actrice ne doivent pas être admises globalement, in abstracto, pas plus que celles concernant sa voix – même si, il est vrai, celle-ci n’a pas toujours été encensée sans réserve, y compris dans les temps de sa plus grande renommée. Car ces remarques jugent Galli-Marié par rapport à un emploi qui n’est pas celui dans lequel elle fait carrière. Les rôles de grand opéra relèvent du genre tragique et les deux qualités vocales exigées de l’interprète sont les extrêmes de la tessiture et la force. Or, si au cours de ses débuts successifs à Strasbourg (1858), Toulouse (1859) et Rouen (1861), la chanteuse postule pour cet emploi de « forte chanteuse », elle le complète à Toulouse et à Rouen par des incursions dans le répertoire de l’opéra-comique en tenant le rôle de Rose Friquet (Les Dragons de Villars, Aimé Maillart)38. Or, c’est pour ce talent, précisément, de comédienne et chanteuse expressive, mais pas tragique, qu’elle est repérée par Émile Perrin qui la destine à la deuxième institution parisienne39. Elle créera à l’Opéra-Comique des rôles et, finalement, un emploi parlé/chanté, caractérisé par une psychologie un peu sombre et une expressivité puissante. Dupin pourrait bien être celui qui, ayant parlé crûment, a aidé ou forcé l’artiste à renoncer à un emploi qui lui convenait imparfaitement et à développer un talent personnel auquel nous devons, au moins, deux rôles de premier plan et vocalement inclassables.
« Une combinaison plus avantageuse qu’onéreuse » (Montpellier, 1862)
L’influence de Dupin sur le fonctionnement du système est difficile à évaluer dans sa globalité. En évoquant, pour finir, l’implication de l’agence dans le recrutement du directeur du théâtre de Montpellier Delmary, l’on ambitionne modestement de cerner les formes et les motivations d’une intervention de l’agent dans la vie théâtrale de la ville. On ne saurait en tirer des conclusions fermes et précises car le bilan du mandat de direction de Delmary est négatif, comme la plupart des mandats des années 1850-1860, et nous ne disposons pas des éléments nécessaires pour juger la part de responsabilité des uns et des autres dans ce résultat 40.
L’implication de l’agence Dupin est avérée en amont de l’ouverture de la saison 1861-1862. C’est à elle que Delmary, recruté par le maire de Montpellier au printemps de 1861 pour diriger le théâtre de septembre à mai, confie le soin de composer sa troupe. Delmary venait de diriger le théâtre de Carcassonne que l’agence Dupin observe et dessert depuis 15 ans au moins. Entre les deux parties, il existait une connivence importante dont on peut prendre pleinement la mesure en lisant le « prospectus » adressé au public montpelliérain avant l’ouverture de la saison, le jeudi 26 septembre 1861. On reconnaît, par exemple, la doctrine défendue deux ans auparavant par Dupin journaliste dans le passage suivant :
Vous trouverez dans mon tableau de la troupe quelques heureuses innovations sur lesquelles je me permettrai d’attirer votre attention. J’ai remplacé par une forte chanteuse Stoltz et une Falcon la forte chanteuse en tous genres ; de même pour la première basse en tous genres que j’ai aussi remplacée par une basse de grand opéra et une basse chantante d’opéra-comique. Si je me suis imposé un sacrifice pour ces premiers emplois, j’espère en être amplement dédommagé, Messieurs, par votre approbation et la satisfaction que vous éprouverez. Au moyen de ces doubles emplois, il n’y a plus d’indispositions possibles qui puissent entraver vos plaisirs en même temps que le répertoire41.
L’application de cette doctrine au théâtre de Montpellier est aventureuse. Elle a déjà cours dans les grands théâtres de Rouen, Marseille, Bordeaux ou Toulouse, c’est-à-dire dans des villes pourvues d’un théâtre lyrique et d’un théâtre parlé distincts. Ces grandes maisons d’opéra ont des moyens supérieurs et elles n’ont pas toutes à entretenir une troupe mixte nombreuse. Dans la situation de Montpellier, où les théâtres lyrique et parlé sont réunis à la Comédie, et où la subvention est modique, le dédoublement des emplois augmente le coût salarial de deux emplois qui se situent au second rang des hauts salaires d’artistes42. De surcroît, Delmary affronte une préoccupation récurrente des directeurs de théâtre : l’implication scénique du chœur, généralement composé de chanteurs de second rang dont la situation est permanente et pérenne au sein du théâtre. Le paragraphe dans lequel Delmary présente une petite réforme du fonctionnement interne franchit les limites de l’élégance :
Au moyen d’une combinaison plus avantageuse qu’onéreuse, j’ai apporté un changement sensible dans la composition des chœurs : j’ai fondé une classe de choristes auxiliaires, qui chaque soir viendront renforcer le nombre ordinaire des choristes. J’ai aussi apporté un changement notable dans l’ensemble de la physionomie du corps des choristes femmes ; en un mot, Messieurs, j’ai fait tous mes efforts pour que vos yeux ne soient pas plus maltraités que vos oreilles.
En d’autres termes, la troupe que Delmary présente dans son prospectus au début du mois de septembre 1861 est énorme. Elle est une fois et demi supérieure à celle des trois années précédentes et, pour le lyrique, elle est équivalente à celles des théâtres de Toulouse et de Rouen la même année. Elle est excessive pour Montpellier. Et simultanément, il impose une réforme à une population qui voit défiler des directeurs de saison en saison, en recourant à un argumentaire péjoratif. Or, il semble qu’avant même le début de la campagne des débuts, Delmary se déclare en difficulté auprès de l’agence et la prie de bien vouloir lui venir en aide. Il s’entend avec Dupin par contrat devant huissier pour que celle-ci lui prête un capital de 15 000 francs qui seront remboursés avec la subvention municipale.
La somme est importante. Le Cahier des charges édité par la ville en 1858 indique que le conseil municipal verse une subvention de 14 000 francs pour l’année, déclinée de la manière suivante : 1 200 francs chaque mois échu pendant les huit mois d’exploitation et une somme supplémentaire facultative de 4 000 francs
à la demande du Directeur et lorsque le Maire le jugera convenable, après toutefois qu’un matériel déposé dans les magasins du théâtre, ou toute autre garantie acceptée par l’Administration, assurera la ville contre tous risques de perte43.
Certes, la ville paie en outre le droit des pauvres, l’éclairage des représentations, « à raison de cinquante francs par représentation et jusqu’à concurrence de la somme de sept mille francs pour l’année théâtrale », et elle « dépense[ra] annuellement une somme de deux mille francs en décors, costumes, réparations à la salle et à la scène, et d’autres dépenses utiles à l’entreprise théâtrale44 ». Toutefois les 15 000 francs avancés par Dupin juste avant l’ouverture de la saison dépassent la subvention municipale. Et comme celle-ci est mentionnée comme la source du remboursement par Delmary dans le contrat passé entre eux, Dupin écrit au maire le 12 septembre 1861 pour l’avertir qu’il s’est « acquitté du devoir » de composer la troupe « le plus consciencieusement possible et de manière à ne pas faire regretter les artistes qui ont précédé ceux qu[’il a] engagé ». Il le prie, en conséquence, de bien vouloir le rassurer sur ce point :
Puis-je compter, M. le Maire, sur votre bienveillant appui et votre protection dans le cas où des éventualités malheureuses me mettraient dans la dure nécessité de m’adresser à vous pour disposer en ma faveur, de tout ou partie, des sommes acquises sur la subvention ?
Il paraît essentiel de fournir sur ce sujet quelques détails supplémentaires : ce n’est pas Dupin en personne qui fournit le capital, mais un certain Antonin Royé, « Propriétaire bourgeois » toulousain, auquel l’agence sert d’intermédiaire entre lui et Delmary. Le contrat notarié passé entre Delmary, Dupin et Royé mentionne l’obligation pour le directeur d’engager le fils Royé comme comptable pour la saison et fixe très précisément l’obligation de verser la subvention municipale au prêteur. On ne saurait exprimer plus clairement le faisceau des intérêts liant les parties.
Le contrat est établi dans la première quinzaine de septembre 1861. L’ouverture de la saison, « ce grand jour, objet de tant d’impatiences pour le public montpelliérain, est enfin arrivé jeudi [26 septembre] », écrit le Journal de Montpellier dans sa revue hebdomadaire. Dès le premier soir, la distribution du Barbier de Séville de Rossini est l’occasion d’un jugement tranché du public à l’encontre de deux artistes : Bertrand, le premier ténor léger jouant Almaviva, et Alzieu, basse comique jouant Don Basile. Ils seront refusés tous les deux un mois plus tard et sur trente artistes présentés, neuf sont rejetés au cours des premières semaines, ce qui oblige la direction à prolonger les débuts jusqu’au 10 janvier 1862 et à fonctionner dans l’incertitude pendant trois mois 45. Le bilan financier de l’année sera finalement déficitaire et il semble que le bilan humain de la direction Delmary n’ait pas été positif non plus si l’on considère sa relation avec le personnel fixe, car il laisse un souvenir amer aux permanents du théâtre qui, l’année suivante, reporteront leur rancœur, via le successeur de Delmary, sur Julie Delmary (fille) qui aura à se plaindre de mauvais traitement au maire de Montpellier.
Conclusion
Considérés du point de vue des métiers du spectacle exclusivement, les périodiques de Dupin assument avec une efficacité certaine la fonction de réunir les membres d’une corporation dispersée, ce qui est le propre de la presse professionnelle, pour reprendre les termes d’Arnaud Houte46. Le profil de Dupin, celui d’agent dramatique au service de toute une profession, creuse un fossé avec l’impresario qui s’occupe de l’organisation matérielle d’un spectacle, d’un concert ou d’une tournée pour le compte d’un artiste côté. Dupin remplit une fonction civique auprès d’une population d’artistes qui vivent de contrats annuels compris entre 500 et 1 500 francs par mois, et il mène un combat en faveur d’une libéralisation relative. Cette dernière ressemble davantage à une décentralisation, comprise comme l’extension au territoire culturel français de l’engagement de l’État, dans le but d’augmenter l’efficacité du système de production. Il se peut que Dupin soit un spécimen assez rare, unique même, de collusion étroite entre diverses formes d’implication dans la vie théâtrale du Second Empire car la richesse et la concentration des informations de ses deux périodiques n’ont pas d’équivalent connu à ce jour. Au contraire même, les synergies entre ses activités de journaliste, d’agent, de directeur et d’homme de lettres lui ont valu d’occuper une place éminente dans un réseau de notabilité qu’il définit lui-même comme une classe censitaire impliquée, au travers de la gestion théâtrale, dans la prospérité des arts et animée par le souci du bien public autant que par le profit individuel.
(Université Paul Valéry Montpellier 3 – UMR 5186 IRCL)
Notes
1 À ce sujet, nous renvoyons à l’article de Jean-Claude Yon, « La presse théâtrale » et plus précisément aux pages concernant « La presse professionnelle de spectacle », dans La Civilisation du Journal, Histoire culturelle et Littéraire de la presse Française au xixe siècle, Dominique Kalifa, Philippe Régnier, Marie Ève Thérenty, Alain Vaillant (dir.), Paris, éd. Nouveau Monde, 2011, p. 375-382.
2 Jean-Baptiste Léon Dupin est né à Montpellier le 26 novembre 1816, fils légitime de Pierre Jemmapes Dupin, commis, et de Camomille Léonard (archives départementales de l’Hérault [désormais ADH], 5MI 1/70) et il est mort à Toulouse le 19 juin 1867 (archives municipales de Toulouse [désormais AMT], 1E427/La Semaine musicale du 27 juin 1867). Il se marie le 7 mai 1839, à Toulouse, avec Françoise Suzette Roques (AMT 1E338). Ils auront un premier fils, Pierre Jemmapes Dupin, dès l’année suivante, suivi d’au moins trois autres enfants : François Raymond Henri Dupin (1843), Frédéric Joseph Dupin (1846) et Marguerite Josephine Mélanie Dupin (?) (AMT 1E340/349/358).
3 Archives départementales de la Haute-Garonne (désormais ADHG), 6T1, État statistique des imprimeurs. Malgré une enquête poussée, nous ne comprenons pas pourquoi l’imprimerie est sous le nom de Jemmapes Dupin jusqu’au 27 février 1865, date à laquelle le brevet est cédé à Jean-Baptiste Léon Dupin qui décède en 1867. L’imprimeur est probablement une seule et même personne de 1839 à 1867 car le père de J.-B. L. Dupin était « commis et conducteur de Diligence » sur l’acte de mariage de son fils en 1840. La confusion est d’autant plus difficile à éviter que J.-B. L. Dupin signe souvent J. Dupin et qu’il est fréquemment appelé Jemmapes, comme son père (Pierre Jemmapes) et comme son propre fils ainé. La Presse du 4 septembre 1841 associe ce prénom familial à l’âge de J.-B. L., ce qui laisse penser que c’est bien ce dernier qui dirige les deux organes que nous étudions. Une chose est sûre, le 25 novembre 1867, Marguerite Joséphine Mélanie Dupin, sa fille, récupère le brevet. Le changement de sexe empêche toute confusion.
4 Dans les divers documents le concernant, dans les chapeaux de ses périodiques, et surtout dans les annuaires de la ville de Toulouse (AMT), nous relevons plusieurs adresses (23 et 39 rue Four-Bastard ; 14, 23 et 28 rue de la Pomme), toutes très proches les unes des autres.
5 En 1879, lors de la reprise de l’imprimerie des Dupin par Jacques Roux (typographe, dit successeur de Mélanie Dupin), un second Midi artiste voit le jour à la même adresse rue de la Pomme et paraît jusqu’en 1882. Il est cependant sensiblement différent du précédent. Nous savons que Jacques Roux est un ami de la famille car il est témoin lorsqu’il est fait acte du décès de J.-B. L. Dupin (AMT 1E427). Typographe et « Imprimeur de la mairie » (Midi artiste du 9 mars 1879), il a bien repris le même titre et les presses de Jean-Baptiste Léon Dupin après l’exploitation qui en a été faite par la fille de ce dernier. On peut résumer l’histoire de ce nouveau Midi artiste : en 1879, un journal dirigé par M. St-Joly, gérant, d’abord baptisé Programme devient Midi artiste dès son quatrième numéro (9 février 1879). Ce Midi artiste est imprimé, rédigé et administré depuis le 28 rue de la Pomme, comme l’ancien. La mention précise « Typ. Mélanie Dupin – Roux, succr, rue de la Pomme, 28. », en bas du journal, et son changement de nom quasi-immédiat prouve le désir de rattacher ce journal au précédent ; Jacques Roux a pu peser sur ce choix. Cependant, même s’il repose sur un réseau qu’il a pu recevoir en héritage, le périodique n’est plus moniteur d’une agence dramatique. En juin 1882, la publication du journal est suspendue. Le dernier numéro datant de la semaine du 28 mai au 4 juin 1882, est alors géré par M. Cléder. Puis la publication reprend en novembre, mais le gérant est alors J. Boé, « typographe », rue des Gestes. La rédaction demeure quelques semaines encore au 28 rue de la Pomme, mais à la mi-décembre, alors que le gérant change encore, l’administration déménage rue Dutemps où depuis peu le périodique est imprimé par J. Fournier. Déraciné, ce dernier Midi artiste, qui paraît jusqu’en 1887, n’a définitivement plus aucun lien apparent avec les Dupin, journalistes et imprimeurs à Toulouse, rue de la Pomme. La reprise du titre s’adresse, tout au plus, à la mémoire des lecteurs.
6 C’est L’Artiste méridional, journal marseillais, du 30 septembre 1855, qui l’annonce : « L’Agent dramatique de Toulouse […] a cessé de paraître après seize années d’existence. »
7 L’Artiste méridional, 30 mars 1856.
8 Balech de Lagarde est également le fondateur de L’Athénée du Midi en 1853 et il est qualifié de « confrère » dans un article de Midi artiste du 3 janvier 1851 qui insère l’un de ces articles du Courrier de Tarn et Garonne venant au secours de J. Dupin. Le site médias19 lui consacre une notice complémentaire.
9 Par exemple, on peut lire dans L’Appel du 21 octobre 1855 : « les journaux se livrent aux commentaires les plus extravagants sur la tournée de Mme Ristori ; [...] aujourd’hui la Presse dramatique de Toulouse va jusqu’à nous donner l’heure à laquelle Mme Ristori est partie de cette ville [Toulouse] pour l’Italie. »
10 Malincha Gershin, « Les spectacles à Lyon sous le Second Empire : stabilisation locale et débat national sur les “débuts” », dans Les Spectacles sous le Second Empire, Jean-Claude Yon (dir.), Paris, Armand Colin, 2010, p. 290-316 ; Patrick Taïeb, « Mortel début à Caen en 1861 : qui a tué Madame Faugeras ? », dans Les Scènes musicales et leurs publics en France (xviiie-xxie siècles), Caroline Giron-Panel, Solveig Serre et Jean-Claude Yon (dir.), Paris, Classiques Garnier, à paraître.
11 Dupin se veut protecteur de tous les arts, il ouvre en 1864 une galerie d’exposition où peintres, musiciens et compositeurs peuvent librement exposer ou faire entendre leurs œuvres, et les amateurs acheter. L’« Union des Arts de Toulouse » est le nom de cette « exposition permanente » (L’Univers musical, 14 janvier 1864).
12 Un « Tableau des artistes lyriques et dramatiques libres d’engagement pour l’année théâtrale 1848-1849 » publié dans L’Agent dramatique du Midi peut recenser jusqu’à 100 artistes classés par emploi.
13 Texte pré-imprimé du papier à lettres utilisé par Dupin de 1850 à 1861 : « Agence théâtrale / à l’usage / des Directeurs et des Artistes / correspondant avec Mme Clérisseau, A Marseille / Et l’Agence Italienne / Giacomelli, à Paris. / Succursale de l’Agence / Roques, r. Ste-Cath., 45, à Bordeaux. // Renseignements / Envoyer / la dénomination précise des emplois / les répertoires signés / et le minimum de prétentions. // On se charge d’organiser les / Concerts et tournées / D’artistes en représentation. // Achat, ventes et Locations de Brochures et Musique. // Droit d’Agence / frais de bureau et correspondance / Deux et demi pour cent. / Sur la totalité des Appointements. / Pour les représentations / cinq pour cent. // Publication / Tableau d’artistes en disponibilité / Pour y être inscrit, 5 fr. / Les Abonnés au Journal y figurent sans rétribution. / Ces tableaux paraissent deux fois par mois. / Envoi en est fait / À tous les Directeurs de Théâtre. // Condition d’abonnement au / MIDI ARTISTE / Moniteur des Théâtres. / Toute demande devra être consentie. // Pour un An ou six Mois : / Toulouse. [en colonne :] Un an 18fr / Six mois 10 // Départemens [sic] [en colonne :] Un an 20 fr / Six mois 12 / [sur une ligne :] un an 25 fr / Six mois, 15 fr. // Les abonnements / Sont payables d’avance / et en souscrivant. / Siège de l’administration / rue de la Pomme, 28, Toulouse. // Tout Envoi non affranchi sera refusé. / La réponse aux dépêches télégraphiques doit / être payée d’avance. »
14 En considérant le salaire mensuel d’un fort ténor, de 1 200 fr par mois pendant huit mois, le placement d’un seul artiste rapporterait 480 fr.
15 En 1859 et 1861, Le Midi artiste fournit le nom de chaque directeur pour les trois théâtres : théâtre royal des Galeries Saint-Hubert : Rey, Isidore (1859) ; théâtre national du Cirque : Boligny aîné (1859) ; théâtre royal de la Monnaie : Quélus (1860) et théâtre royal des Galeries Saint-Hubert : Rey, Isidore (1860) ; théâtre national [du Cirque] : Petit E. et Gourdon E. (1860) ; théâtre royal de la Monnaie : Letellier, Th. (1861).
16 Les chiffres entre parenthèses désignent le nombre d’occurrences du tableau de troupe d’une ville dans l’intervalle considéré. Dans le cas d’Agen, nous distinguons trois troupes de saison d’une « Troupe d’été ».
17 Joseph J. Schürmann, Les Étoiles en voyage. La Patti – Sarah Bernhardt – Coquelin, Paris, Tresse & Stock, 1893.
18 Les collections ne permettent pas de préciser la date du commencement de ce feuilleton avant le 3 août où son titre est accompagné du mot « suite » ; puis il paraît dans chaque numéro jusqu’à la « fin », publiée le 3 novembre 1848.
19 Il s’agit de Charles Ribeyrolles (1820-1861), journaliste (rédacteur en chef de L’Homme et de La Réforme) et homme politique (républicain) originaire du Lot, ami intime de Victor Hugo, il s’est exilé en 1849 pour éviter la déportation. Les Compagnons de la mort, révolte de Masaniello en 1647, édité avec une notice sur l’auteur par F. Dabadie, Paris, F. Santorius, en 1863, est un de ses ouvrages consacrés aux révolutions. Sa publication dans L’Agent dramatique en 1848 n’a rien d’anodin.
20 Ce texte a été publié en 1842 dans Victor Joly, S. Henri Berthoud, Marc Perrin, Extrait de l’Écho des feuilletons - recueil de nouvelles, contes, anecdotes, épisodes, etc. - deuxième année, Paris, 1842.
21 J. Béliard est rédacteur en chef du Journal de St-Étienne, journal républicain voire fouriériste. Cet article est déjà paru en 1841 dans la Revue du Lyonnais, vol. 14.
22 Eugène Bresson est un journaliste et écrivain toulousain et le rédacteur en chef de La Réforme, journal toulousain des années 1870 dont le titre nous rappelle celui du fameux journal républicain, La Réforme, fondé par Ledru-Rollin en 1843.
23 Dupin a eu quelques ennuis avec les autorités à la fin de l’année 1841, alors qu’il imprime pour le compte d’un certain Laurent Dupin un journal éphémère intitulé L’Aspic (environ 1840-1842). Le journal est accusé d’avoir envenimé la situation pendant l’émeute provoquée au mois de juillet par l’arrivée à Toulouse du nouveau préfet. L. Dupin et J. Dupin sont tous deux jugés à Toulouse et à Marseille puis incarcérés à Pau. En 1854, Dupin est de nouveau en cause dans une affaire politique. C’est L’Éventail : échos des coulisses (journal parisien) du 13 août 1854 qui le précise : « M. Dupin, directeur du journal l’Agent dramatique, a été condamné le 1er août courant [...] à un mois de prison, 200 fr. d’amende et à la suppression de son journal, pour s’être livré à des discussions appartenant au domaine de la politique. » N’ayant pas payé de cautionnement (ou timbre) lui permettant d’écrire sur des sujets politiques, Dupin essuie les foudres de la censure qui est très sensible à cette époque. Cette incarcération pourrait expliquer le recours provisoire à Balech de Lagarde pour la direction de la Presse dramatique (voir la note 8).
24 ADHG 8T1. Affiche imprimée par J. Dupin puisqu’il est imprimeur de la mairie.
25 Cette subvention de 20 000 fr. est destinée à compenser l’impossibilité d’exploiter le théâtre des Variétés qui est alors en démolition. À Toulouse, il y a deux théâtres avec des répertoires distincts jusqu’en 1864 mais qui sont exploités par le directeur privilégié, le théâtre des Variétés (ou Cirque olympique) n’étant qu’une succursale du théâtre du Capitole. Il n’y a donc qu’une seule troupe composée d’acteurs qui tiennent parfois des emplois sur les deux théâtres à la fois. Voir l’article de Marie Odile Jubert, « Le théâtre à Toulouse au milieu du xixe siècle », Annales du Midi : revue archéologique, historique et philologique de la France méridionale, t. 109, no 217 (1997), p. 53-69 (consulté sur www.persee.fr).
26 Cela fait écho à un texte que nous trouvons aux archives municipales de Toulouse (2 R 171 théâtre), déclaré « en commandite anonyme » et imprimé à Bordeaux (impr. P. Faye) en 1847. Envoyé « à M. le Ministre de l’Intérieur et à M. le Directeur des Beaux-Arts, […] distribué à tous les Artistes, à MM. les Maires, Conseillers Municipaux, à MM. les Préfets, Secrétaires-Généraux, à MM. les Chefs de bureau de ces deux Administrations, et à tous les Journalistes des huit villes de deuxième classe [Lyon, Marseille, Bordeaux, Toulouse, Nantes, Rouen, Lille, Strasbourg] », il propose, sous le titre éloquent de Renaissance de l’art théâtral en province, « la Centralisation de l’Exploitation théâtrale des Privilèges de deuxième classe ». Cette centralisation décentralisée serait généralisée ensuite à tous les théâtres de province et siègerait à Bordeaux sous le nom d’« Administration Théâtrale » ou « Administration générale ».
27 L’Agent dramatique du Midi, 18 août 1848.
28 L’Agent dramatique du Midi, 6 octobre 1848.
29 Rappelons que l’année 1848 est marquée par la question d’une réforme théâtrale. Le 15 juillet puis le 20 septembre 1848, le ministre de l’Intérieur adresse à tous les « Citoyen[s] Préfet[s] » deux circulaires leur posant plusieurs questions au sujet du théâtre relatives à la « préparation d’un nouveau projet de loi sur les théâtres » par une « Commission nationale des Théâtres » créée pour l’occasion. (AD Aveyron 15T3-1 et 15T3-2). L’instabilité politique fait avorter le projet qui a cependant eu l’intérêt de produire de précieux documents pour les historiens. Par ailleurs, il n’est nullement question dans ces circulaires de décentralisation ou de libéralisation.
30 Les expressions citées entre guillemets dans ce paragraphe sont extraites de la correspondance conservée aux archives départementales de l’Aude sous la cote 4E 69 R58 (archives communales de Carcassonne, théâtre).
31 De septembre à mi-novembre 1850 pour Carcassonne et du 15 novembre 1850 au début de l’année 1851 pour Montauban. Voir : AD de l’Aude, 4E69R55, Diverses correspondances, Dupin/maire de Carcassonne et maire de Montauban/maire de Carcassonne.
32 Argument du maire qui permet de justifier le refus d’octroyer à Dupin une subvention de 4 000 fr. Voir : AD de l’Aude 4E69R55, Lettre du maire de Montauban au maire de Carcassonne – maire qui est par ailleurs prêt à aider Dupin dans ses affaires s’il remplit ses engagements.
33 Mémoire à son excellence M. le ministre d’État. Théâtres, Toulouse, Imprimerie de J. Dupin, rue de la Pomme, 26, 1861, p. [46]. Le Mémoire de Rédarez est conservé dans plusieurs fonds d’archives (AN : F21 1171 ; AM de Montpellier) sous la forme d’une brochure de 44 pages. Sa plus large diffusion est assurée par sa publication dans Le Midi artiste du 17 mars 1861 dans une version amputée de la carte du réseau ferré.
34 Marie Célestine Laurence Marié de l’Isle (Paris, 15 mars 1837-Vence, 21 septembre 1905), épouse de Jean Victor Gally, est la fille de Claude Marie Mécène Marié de l’Isle, chanteur à l’Opéra et à l’Opéra-Comique. Elle adopte le nom de scène « Galli-Marié » en 1859, lors de ses premières apparitions publiques à Strasbourg (Courrier du Bas-Rhin du jeudi 17 février).
35 Ce n’est cependant pas la première fois qu’il se montre acerbe dans une critique. En 1853, il est molesté par des agents du directeur du théâtre de Toulouse, M. Rhoné – si l’on en croit la lettre ouverte qu’il publie dans l’Argus et le Vert-Vert réunis (journal lyonnais) du 18 juillet 1853.
36 Journal de Toulouse, 19 octobre 1859 : « Nîmes, 18 octobre. Nous avons reçu de M. Defrenne, directeur privilégié du théâtre, la lettre suivante que nous nous empressons de publier : Nîmes, le 15 octobre. Monsieur, J’ai l’honneur de vous informer, que, par suite du renvoi d’une majeure partie de mon personnel lyrique et dramatique, je me vois forcé de faire relâche pendant quelques jours, afin de recomposer ma troupe. J’espère cette fois être plus heureux dans le choix de mes sujets. Pour être agréable au public nîmois, je me suis mis en mesure d’engager une forte chanteuse, afin de représenter le grand opéra. La réouverture du théâtre aura lieu très probablement jeudi, 20 courant. F[loris] Defrenne. Nous nous associons volontiers aux espérances de M. le directeur et nous lui souhaitons de terminer l’année théâtrale sous de plus heureux auspices. »
37 Le Midi artiste, 27 novembre 1859.
38 C’est à Galli-Marié que l’on doit l’introduction des Dragons de Villars, créé au Théâtre-Lyrique en 1856, au répertoire de l’Opéra-Comique en 1868.
39 Patrick Taïeb, « Les “débuts” à Rouen sous le Second-Empire : l’exemple de Célestine Galli-Marié (1861-1862) », dans Nouvelles perspectives sur les spectacles en province, Joann Élart et Yannick Simon (dir.), Rouen, PURH, coll. « Changer d’époque », à paraître.
40 D’après Coralie Grandjean, Monsieur Delmary cède la direction du théâtre à Monsieur Chapelo-Gaubert avant la fin de l’année 1861. Ce dernier sera poursuivi par le public, dès avril 1862, car son répertoire n’était pas assez varié. Ayant signé pour deux saisons, il est contraint de démissionner et de céder la direction à Monsieur Betout (voir « Analyse artistique et financière du théâtre de Montpellier, influences des débuts de 1859 à 1865 », mémoire de master 2, université Paul Valéry-Montpellier 3, département de Musicologie, dir. P. Taïeb, p. 119 et 128-129.)
41 Dossier Delmary, série R2/8, Archives Municipales de Montpellier. Les citations utilisées dans cette discussion proviennent toutes de ce dossier, sauf avis contraire.
42 Les emplois de première chanteuse légère et de premier ténor léger ont les salaires les plus élevés. Il s’agit de voix rares et travaillées que l’on utilise dans tous les répertoires. Les emplois de fort ténor et de forte chanteuse ont cours dans le grand opéra exclusivement.
43 Cahier des charges relatif à l’entreprise théâtrale de Montpellier, Montpellier, Imprimerie de Gras, 1858, art. 20, p. 17.
44 Ibid.
45 Coralie Grandjean signale que les débuts n’étaient toujours pas achevés en mars 1862 (id., Analyse artistique, op. cit., p. 127-128).
46 Arnaud Houte, « La presse professionnelle », dans La Civilisation du journal, op. cit., Paris, Nouveau Monde éditions, 2011, p. 558.