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Les premiers lauréats du prix Albert-Londres (1933-1939), des défenseurs du reportage social ? Politiques d’observation d’un journalisme d’enquête entre héritages et métamorphoses

Table des matières

JOHANNA CAPPI

Sur une période de quatre-vingt-dix années, l’ensemble des prix Albert-Londres constitue une intéressante plateforme d’observation des héritages comme des métamorphoses du journalisme d’enquête francophone. Les œuvres des récipiendaires du prix forment un vaste corpus composite en presse écrite, depuis 1933, en journalisme audiovisuel, depuis 1985 ou sous la forme d’ouvrages, depuis 20171. Les lauréats défendent aujourd’hui une pratique polymorphe et souvent engagée de l’enquête de reportage, attelée à des sujets sociaux. La dernière version du site en ligne communiquant sur l’actualité et les activités de l’Association du prix Albert-Londres pose en exergue une des maximes qui ont fait entrer le grand reporter dans la légende : « Notre rôle n’est pas d’être pour ou contre, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie ». Albert Londres s’adresse ainsi, en 1929, au lecteur de l’avant-propos à Terre d’ébène (La traite des Noirs), l’édition en volume, chez Albin Michel, de sa série « Quatre mois parmi nos Noirs d’Afrique » parut dans Le Petit Parisien, l’année précédente. À l’appui d’une autopsie des dysfonctionnements coloniaux en Afrique occidentale française, l’enquête du grand reporter dénonce la traite humaine orchestrée par la société de construction des Batignolles responsable des travaux de la ligne ferroviaire Congo-Océan devant relier Brazzaville à Pointe-Noire. « Porter la plume dans la plaie », pour reprendre les mots de Frédéric Lambert, c’est écrire avec le sang des opprimés2. Chez Albert Londres, l’engagement sur le terrain sociétal au moyen d’une « esthésie de la dénonciation3 » se dessine progressivement, au fur et à mesure d’un apprentissage de l’enquête comme correspondant dans la Grande Guerre et de la pratique d’un journalisme politique, exercé, en 1920, au Moyen-Orient, par exemple, sous le pseudonyme D’Aigues-Mortes4 pour Le Petit Marseillais : « Journal politique quotidien ». Publiés respectivement à la Une les 3 et 5 janvier 1920, les deux premiers articles, « Le Club arabe de Damas sème la terreur parmi 300 000 habitants5 » et « Les difficultés de la France6 » témoignent, sur deux colonnes, des tensions nationalistes qui agitent la capitale de l’émir Fayçal, alors de voyage en Europe (Fig. 1 et 2). Au moyen d’une comparaison des mouvements indépendantistes arabo-musulmans avec le régime soviétique et le bolchévisme, Londres dénonce les méfaits dirigés par « le club arabe » composé, pour reprendre ses termes, de « quarante universitaires illuminés7 » et propose une lecture sacralisant la présence française au Proche-Orient. Le sujet dresse des portraits sociopolitiques des villes de Damas et de Beyrouth. Chacune apparaît aux prises avec les milices du « El Nadi el Arabi », en écho à l’article publié le 29 décembre 1919, qu’il signe dans Excelsior8 (Fig. 3). Londres présente l’émir Fayçal comme une sorte de pantin désabusé et Damas comme une ville plongée dans le chaos et la violence de fanatiques. La rhétorique discursive recourt au régime sémantique de l’angoisse, de la domination par la terreur, des massacres. Le parti-pris du grand reporter s’affirme ouvertement anti-indépendantiste, mais sous pseudonyme9.

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Fig. 1 : Le Petit Marseillais, 3 janvier 1920

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Fig. 2 : Le Petit Marseillais, 5 janvier 1920

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Fig. 3 : Excelsior, 29 décembre 1919

Dans le champ de la théorie littéraire, Georg Lukács édifie le concept d’une praxis du reportage10, dès les années vingt. Son étude sur la mimèsis et l’écriture du réalisme social expertise des récits « anthropocentrés » attachés à rapporter les histoires de luttes de classes, celles des défavorisés, des déclassés, dénonçant des phénomènes sociaux : « Pour l’homme [mais surtout pour l’écrivain], la racine, c’est l’homme-même », affirme-t-il, à l’appui de ses lectures de Karl Marx11. Côtoyant les théories de Georg Lukács, la pratique de l’enquête de grand reportage d’Albert Londres opère un tournant au cours de cette période. Adossée au politique, l’inscription sociale des sujets atteint son champ de force entre 1923 et 1932, d’abord, lors d’enquêtes réquisitoires menées sur l’administration des bagnes civils et militaires qui marquent fortement l’opinion, souligne Dominique Kalifa12, puis sur les asiles français, sur les réseaux internationaux de prostitution, sur la traite des esclaves de l’Afrique13 à la mer Rouge ou sur le terrorisme dans les Balkans.

Entre 1933 et aujourd’hui, les travaux récipiendaires du prix Albert-Londres suivent, en ce sens, un processus d’engagement progressif, similaire à celui qui traverse l’œuvre léguée par le grand reporter. Notre réflexion questionne rétrospectivement les modélisations d’une praxis du reportage, d’une pratique sociale et d’une mise en récit du grand reportage qui porterait « la plume dans la plaie ». Situé de 1933 à 1939, le corpus des sept premiers lauréats permet d’interroger la dynamique et les marqueurs sociopolitiques qui amorcent, ou non, l’histoire du prix Albert-Londres, au lendemain de la disparition du grand reporter et à la veille de la Seconde Guerre mondiale. Nous portons une attention particulière aux sujets des événements rapportés et au positionnement des auteurs sur ceux-ci. Nous éclairons quelques-unes des procédures formelles d’enquête. L’esthésie, « c’est l’inverse de l’anesthésie », précise Frédéric Lambert, c’est l’inscription des sens comme moyen et méthode de perception depuis l’élaboration de l’enquête sur le terrain jusqu’à la mise en forme du récit. Il s’agit d’observer les stratégies d’une écriture du réel à la fois littéraire et médiatique, de questionner les angles politiques et sociaux qui dirigent les récits journalistiques ou ceux qui demeurent en leur marge.

Parmi la société des gens de la mer

De 1927 à 1934, Émile Condroyer, correspondant pour Le Journal et premier lauréat du prix Albert-Londres en 1933, relate autant ses voyages à travers l’Europe14 qu’il partage des critiques culturelles parisiennes15. Dès la fin des années vingt, il mène plusieurs enquêtes sur les peuples du Nord16, sur le quotidien des équipages de marins morutiers, sur des pionniers de la plongée ou sur des trappistes bretons. Dans la revue Voyages… à travers l’actualité mondiale, éditée par Larousse en 1930, Condroyer publie des récits sur la solitude des hommes de l’océan17. L’épisode intitulé « En partant pour Terre-neuve » relate son périple auprès des Terre-neuvas, les marins européens pratiquant la grande pêche à la morue qui, depuis le XVIe siècle, partent pour les côtes du Canada ou les bancs d’Islande18. Un grand reportage mené en Islande, « L’ermite de l’Atlantique19 », publié dans Le Journal du 20 au 26 juin 1930, relate l’actualité de l’île, à l’occasion de la célébration du millénaire de l’Althing qui « fût en 930, le premier parlement d’Europe20 » (Fig. 4). Condroyer y séjourne plusieurs semaines afin de « faire connaître la jeune et très moderne civilisation qui fleurit sur ce sol désolé, dépourvu de végétation, où les volcans fument près des glaciers21 », précise-t-il.

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Fig. 4 : Le Journal, 20 juin 1930

L’Islande personnifiée, terre de solitude et de mystères, inscrit le travail du grand reporter dans le sillage des écrits de Pierre Lotti. L’axiome du terrain prime dans la construction du récit, la description topographique est régulièrement ponctuée d’impressions. Émile Condroyer confie qu’« une odeur de poisson fumé, de stout noir et d’océan passe sur ces visions22 ». Il présente divers tableaux d’une Islande poétique, saisie à la manière d’un photographe, dès l’approche de la côte, alors que « des caps cassés d’équerres s’avancent insensiblement, immenses et noires étraves de fabuleux navires déchirant le brouillard et ouvrant la mer23 ». Des paysages islandais aux hommes qui les habitent, chez Condroyer, les procédés factographiques renouent avec le principe d’autopsie (chose vue, vécue, ressentie). La fonction d’enquêteur in situ dynamise la perception subjective, la position auctoriale. Ainsi, dans « Reykjavick, port isolé et cœur de l’Islande24 », il partage le portrait d’« une petite ville sans relief, qui semblait plantée comme un sombre décor au bord d’une baie aux rivages nus. On sentait le vide derrière elle », affirme-t-il. Après un parcours dans le massif de l’Esja, Émile Condroyer longe la digue reliant le port et en propose un portrait animé :

Dans la trépidation des treuils, les élingues hissaient, hors des cales, de blanches mannes de morues salées. Des femmes et des hommes, saupoudrés de sels, édifiaient, sur le quai, des parapets neigeux avec tout ce poisson ou bien le charriaient dans des hangars. Un cargo islandais déchargeait des autos, des balles de farine, des caisses de conserves anglaises. Des maçons sifflaient sur les échafaudages qui emmaillotaient le futur frigorifique. Quelques pêcheurs de Færoë, jeunes gaillards bottés jusqu’à mi-cuisses dans un cuir blanc comme des buffleteries, et le crâne rond surmonté d’un bonnet noir à fines rayures rouges, regardaient, mains aux poches, des bicyclettes brillantes rangées dans des caisses à claires-voies25.

Différemment, le récit témoigne de la modernité à l’œuvre dans l’Austurstroeti et Laugavegur26, de l’acquisition de voitures de luxes, de « limousines étincelantes et capitonnées », de « ce que l’industrie automobile produit de plus luxueux, de plus parfait27 », souligne-t-il, par les familles aisées de Reykjavick. Le rapport de la chose vue se fait sous l’aspect d’une promenade attentive, tandis que l’actualité politique ou économique est circonscrite autour de l’histoire du parlement « vieux de dix siècles28 », berceau de l’Islande — l’édifice est présenté en détail —, ou autour du développement actuel du commerce des pêcheries, depuis 191929, et le projet d’exportation jusqu’en Afrique30 (Fig. 5).

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Fig. 5 : Le Journal, 26 juin 1930

La rhétorique du grand reportage vise un effet d’authenticité par une mise en ordre réaliste des faits, des événements, de l’histoire. Condroyer nourrit le souci de l’efficacité ou de la persuasion discursive. Il entend informer son lecteur, mais aussi le convaincre de la véracité de ses récits. Si, en 1929, Des fjords aux tulipes introduisait, sans préambule, le lecteur in medias res, parmi « le bourdonnement des machines31 », à bord d’un navire naviguant de nuit vers la Norvège, Dans les houles d’Islande s’ouvre par une confidence sur l’impulsion de l’enquête et la volonté du grand reporter de transmettre un message vécu :

Aimant la mer, je me passionne pour tout ce qui vit et meurt par elle. Ainsi, je fus tenté de connaître l’existence des morutiers, car pour eux la mer n’est point l’immensité qui sépare des continents parfumés et que l’on traverse avec l’avant-goût ou le souvenir des voluptés dispensées par les rivages exotiques. […] Pour bien les voir, je songeai à partir en Terre-Neuve. J’entrai en relation avec un armateur. Il me lanterna un peu. Puis il invoqua je ne sais quelle excuse et se montra fort dépité de ne pouvoir me laisser embarquer sur un de ses bateaux. […] Le dernier armateur hésita quelque peu. Pour tout dire, je crus discerner que je ne lui inspirais qu’une confiance relative. Que par simple curiosité un journaliste voulût partager la vie d’un équipage, voilà une singularité. À moins que le danger ne résida, précisément, dans cette curiosité. Enfin, il m’accorda l’autorisation d’embarquer. […] Je suis monté à bord avec des yeux neufs, avec une sensibilité neuve et l’espoir joyeux de vivre libre sur la mer. Je ne devais rien à personne. Je pouvais tout regarder à ma guise32.

Chez Émile Condroyer, le procédé d’autopsie se tresse aux digressions dans lesquelles il confie des impressions, partage des détails, des anecdotes. Confronté à une critique mitigée lors de la réception de son grand reportage dans la presse, il expose la méthode de son enquête dans le préambule à l’édition en volume : 

Avec ces hommes qui n’étaient pas de ma race, j’ai vécu au grand large plus de cinq lentes semaines. Je les ai vus à toute heure du jour et de la nuit. Rien n’a jamais altéré notre mutuelle confiance. Je les ai écoutés longuement, aussi bien lorsqu’ils chantaient, lorsqu’ils se plaignaient. Dans cette intimité de chaque minute, qui est le propre de la vie d’un morutier, j’ai senti leur fatigue, leur rancœur, leurs espoirs. […] J’ai préféré conter sans plus, ce que j’avais vu et entendu. […] Avec la même liberté et la même impartialité que j’avais apportées à écrire les articles, je veux narrer ici et plus amplement la vie des pêcheurs d’Islande. Elle est assez pitoyable pour qu’il soit inutile d’en forcer les couleurs. Je ne ferai jamais l’injure à ces hommes de la déformer dans quelque sens que ce soit. La morale, je l’espère, se dégagera des faits33.

Les grandes enquêtes « maritimes » menées par Condroyer connaîtront plusieurs succès. La même année 1930, il publie de nouveau une courte série, « Gens de mer : pêcheurs, Terre-neuvas, Islandais » et « Mariniers et bateliers », dans la revue La France travaille, aux éditions des Horizons de France. À la fin des années 1930, Condroyer prolonge ses reportages sur les métiers de la mer pour le magazine Vu34. Il mène aussi une enquête en Tchécoslovaquie (l’actuelle République tchèque), dans laquelle il témoigne du congrès des Sokols à Prague, un mouvement philosophique fondé au milieu du XIXe siècle, inspiré du nationalisme romantique, indépendantiste, prônant la discipline et la pratique intensive du sport comme pédagogie35. Des reportages de presse publiés dans les journaux, aux chapitres de ses livres, Émile Condroyer construit une longue fresque sociale sur le voyage, les paysages et les métiers de la mer et de l’océan, attentif aux gestes et à la mémoire des hommes, à leurs difficultés et leurs joies du quotidien. Cependant, les séries de reportages ne soulèvent pas véritablement de problématique politique rencontrée et défendue par les différents corps de métier. A contrario d’Émile Condroyer, les enquêtes filmées par les lauréats Frédéric Tonolli et Patrick Boitet s’inscrivent dans une ligne de dénonciation sociopolitique. En 1994, Les Seigneurs de Behring, produit dans le cadre de l’émission Thalassa (France-Télévision), recueille la mémoire du peuple de pêcheurs tchouktches et vulgarise leur volonté de perpétuer leurs coutumes face à la société soviétique. La facture de l’enquête a valeur de plaidoyer. Le choix des portraits de groupe ou individuel dirige le film et dynamise l’orchestration de voix-témoins. Au cours des années 2000, Frédéric Tonolli retourne régulièrement sur le terrain tchouktche, la caméra au poing. En témoin et dépositaire « d’une histoire qui s’éteint dans les glaces36 », ses films, Les Enfants de la baleine (2008) et La Mort d’un peuple (2009), poursuivent l’historicisation du quotidien et l’enregistrement des mots et des visages d’un peuple en voie d’extinction.

L’aventure des colonies

Second lauréat du prix Albert-Londres en 1934 pour le reportage Sur la piste de l’or, Stéphane Faugier, reporter au Matin, évoque, dès 1928, son quotidien de recruteur des travailleurs africains dans Quand j’étais négrier37. Le récit, aux tonalités aventureuses et fardé d’exotisme, véhicule un regard procolonialiste dont le ton tranche avec « Quatre mois parmi nos Noirs d’Afrique », rédigé par Albert Londres pour les pages du Petit Parisien, la même année. Faugier, qui cultive le goût des figures aventurières, enquête au début des années trente sur la vie de descendants des prospecteurs et chercheurs d’or de Guyane38. Son reportage, illustré par de nombreuses photographies, est d’abord publié en six épisodes dans les pages du magazine Vu de mai à juillet 1931, sous le titre « Au pays de l’or et du crime39 ». Le récit s’ouvre par une référence au problème de la déportation et du bagne, pour rappeler aussitôt au lecteur qu’au XIXe siècle, l’histoire guyanaise connaît un « second fléau40 », celui de la ruée vers l’or. Stéphane Faugier précise au lecteur les objectifs et les circonstances de son enquête :

J’ai voulu visiter les exploitations de l’intérieur, me rendre compte si l’or que l’on retire de la Guyane peut compenser le manque à gagner d’une colonie dont les autres ressources sont presque inexploitées. Mais, chasseur d’images aussi, j’ai voulu voir surtout ces étranges coureurs de brousse dont on ne parle guère, dans les villes de la côte, qu’avec un frisson de crainte.

Pendant deux mois, le fusil à l’épaule et la batée du prospecteur à la main, j’ai parcouru la région des placers. Pendant deux mois, dans le haut Maroni, d’abord, puis, remontant la vallée de Sparwine, dans les collines de la moyenne Mana, où se réfugient les forçats évadés, j’ai mené la vie aventureuse des chercheurs d’or. J’ai partagé leurs espoirs et leurs craintes… Dévoré par les moustiques, déchiré par les herbes coupantes, brûlant parfois de fièvre, j’ai rêvé, moi aussi, du panier d’oranges, de la poche de pépites énormes et rutilantes, qui vous fait riche pour toute votre vie.

De l’or, j’en ai trouvé. Pas beaucoup, à vrai dire, juste de quoi payer, à la cantine où je me ravitaillais, le couac suret et la morue salée qui composèrent pendant ce temps ma nourriture quotidienne41.

Le mode d’énonciation historique adoptée articule régulièrement la subjectivité, la multiplication des points de vue et des discours, ainsi que les paroles exprimées par des acteurs et des témoins. Le récit de grand reportage développe une histoire « vivante » portée par l’inscription de dialogues. Sur la piste de l’or s’ouvre in medias res par une mise en dialogue. La parole est offerte à l’un de ses interlocuteurs :

« Voyez-vous, Monsieur, le premier mal dont souffre la Guyane, c’est la déportation — la déportation qui jette le discrédit sur la colonie toute entière. Parlez de nous, en France, on vous répondra :

— Ah ! oui… le bagne...... »

« Or, en Guyane, il ne pousse pas seulement des forçats. Nous produisons aussi de la canne à sucre, de l’essence de rose, du batala. Nous exportons des bois précieux. On trouve dans nos forêts, qui s’étendent sur vingt mille kilomètres carrés, l’acajou, le bois violet, le ouapa imputrescible, le mao, le teck, le ouakapou moiré, le satiné-rubané, le matouchi aux vives couleurs d’aquarelle… »

Un serviteur apportait l’apéritif. Par les baies du bungalow, largement ouvertes, on apercevait le Maroni, majestueux comme une mer. Un canot y glissait sans bruit, découpé à contre-jour comme une ombre chinoise.

Mon hôte leva son verre :

« Le second fléau qui s’est abattu sur nous, c’est l’or…42 »

En 1931, l’enquêteur partage surtout sur le ton de la nostalgie des portraits de « la dernière race des derniers aventuriers du monde43 », précise-t-il. Sur le plan de l’histoire sociale, le grand reporter témoigne de la disparition progressive des orpailleurs indépendants au profit de l’industrialisation des exploitations par de grandes sociétés. En 2008, l’écrivain-voyageur, grand reporter et membre permanent du jury du prix Albert-Londres, Olivier Weber enquête, à la suite de Stéphane Faugier, sur la piste de l’or en Guyane. Son enquête est publiée en volume, chez Robert Laffont, sous le titre En Amazonie, dans les ténèbres de l’Eldorado.

Le travail de Stéphane Faugier s’inscrit davantage dans le sillage des récits d’aventures et d’explorations britanniques des années vingt, tels que Les chasseurs de têtes de l’Amazone par Fritz W. Up de Graff44, que dans le sillage de ceux légués par Albert Londres, notamment sur la Guyane. L’été 1932, Faugier signe une série de grands reportages qui paraît à la Une, du 31 juillet au 30 août, en vingt-deux épisodes et sous le double titre : « Le Matin à Bornéo », « Les coupeurs de têtes45 » (Fig. 6). Subséquemment, les sujets, la facture exotique et le discours sur l’altérité des récits de « La grande chasse46 », de « La vie de brousse47 » ou du « Sorcier au crâne48 » tissent des correspondances avec certains épisodes du récit d’Albert Londres en 1921, en Indochine, pour Excelsior, ou ceux du grand reportage africain de 1928.

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Fig. : 6 :  Le Matin, 15 août 1932

Selon le même modus operandi, en septembre 1933, Stéphane Faugier signe, dans les pages du Matin, une nouvelle série de voyage et d’aventure au long cours intitulée « L’Île aux lézards géants : caoutchouc, sucre, riz, touristes49 » (Fig. 7), dont le récit orientaliste dévoile, entre autres, les mystères modernes du « syndicat des sorciers ». Il partage aussi divers portraits exotiques, comme celui de « Nicodemus, chasseur de serpents50 » (Fig. 8) à Bima, sur l’île de Sumbawa. La même année, du 10 au 20 août 1933, Le Matin publie sa série d’enquêtes menées en Europe septentrionale, « Chez les derniers moines russes », tandis que d’autres de ses séries paraissent dans la catégorie « Tourisme et navigation » du journal, comme celle que le grand reporter consacre aux jeux de sports d’hiver51. Plus loin, sous l’Occupation, en 1943, Stéphane Faugier propose un dernier récit, aux affirmations propétainistes, de son voyage en Guyane pour le magazine Actu, sous le titre « La Guyane, terre de l’or et du bois précieux, entend demeurer fidèle à la France et au maréchal52 ».

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Fig. 7 : Le Matin, 1er septembre 1933

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Fig. 8 : Le Matin, 3 septembre 1933

Société américaine et National-socialisme en Europe

Claude Blanchard, troisième lauréat du prix en 1935 pour l’ensemble de ses reportages, travaille, tour à tour, pour Le Crapouillot, Voilà, Le Petit Parisien ou Paris-Soir. Chez Claude Blanchard, la dynamique du déplacement et la traçabilité du voyage constituent l’un des arcanes majeurs du récit, allant jusqu’à instaurer parfois la ligne directrice de la narration. Dans « Pour mieux comprendre les États-Unis53 » (Fig. 9, 10 et 11), Blanchard rythme et reconstitue les vingt-huit étapes, chacune restituée au travers d’un article publié à la Une du Petit Parisien entre le 22 juillet et le 24 août 1930. L’avancée du lecteur sur le chemin du grand reportage américain se fait via un processus de signalétique viatique qui, de titre en titre et en intertitre, l’invite à la découverte du parcours sociogéographique. Nous relevons, par exemple : « Coup d’œil sur New York54 » et « Le Cinéma à New York55 » ; « Le “bifteck” standard des abattoirs de Chicago56 » ; « À travers l’Ouest américain : San Francisco et Los Angeles57 » ; « La ville chinoise et les “Jaunes” de San Francisco58 » ; « Le pétrole, richesse de l’Ouest59 » ; « Hollywood, cité du cinéma60 » et « Les plaisirs du dimanche : les distractions balnéaires de Coney Island61 ». Le grand reporter s’applique à palper le pouls et à dresser différents portraits de la société américaine des années trente, du temps de la prohibition, des bootleggers, des élans de la standardisation, de la publicité et de la société marchande qui observe le lancement des magazines par correspondance. Chez Claude Blanchard, le recours à la signalétique du parcours géographique est tout autant probant dans l’enquête publiée du 4 au 16 octobre 1931 par le Petit Parisien, sous le titre « Paris ! Mon Paris62 ! ». À chaque livraison, le lecteur suit ses déambulations sur le « marché aux fleurs de la Madeleine63 », au « Musée Grévin sur les Grands boulevards64 », au cœur de « L’âme du Sentier65 » ou « Tout là-haut sur la Butte66 ! », vers la « Gare Saint-Lazare et ses environs67 », dans le « Square du Temple68 », dans les « Abattoirs de la Villette69 » et le long du « Canal Saint-Martin70 ». Ainsi indexée au moyen d’un découpage des titres et des sous-titres des articles, la topographie du grand reportage inscrite dans la poétique journalistique soutient une construction stratégique dont la fonction est d’abord de transporter le lecteur de lieu en lieu. Une méthode narrative que poursuivent à leur tour les grands reporters contemporains.

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Fig. 9, 10 et 11 : extraits de Claude Blanchard, « Pour mieux comprendre les Etats-Unis », publié dans Le Petit Parisien du 22 juillet au 24 août 1930

Entre 1975 et 1980, Jean-Claude Guillebaud, lauréat du Prix Albert Londres en 1972 pour le quotidien Sud-Ouest, se réapproprie le procédé de l’écriture viatique dans des enquêtes menées au large de l’Océan Pacifique pour le quotidien Le Monde. Sur le plan formel comme sur celui du traitement du sujet, les séries « Les Confettis de l’empire71 » et « Un voyage en Océanie72 » témoignent du désir de découverte de l’enquêteur, ponctué d’île en île, d’archipel en archipel, formulent une invitation au voyage, mais témoignent aussi de la volonté d’observer les populations insulaires, de raconter les individus, de rapporter les dialogues, d’éclairer des réalités postcoloniales chargées d’inquiétudes et de tensions sociales73

De janvier à mars 1934, Claude Blanchard enquête pour Le Petit Parisien et témoigne de la propagande des organismes hitlériens, de la montée de l’idéologie nazie et de la mainmise politique du parti national-socialiste en Allemagne (Fig. 12 et 13). Il relate son parcours des provinces hollandaises, en 1934, à partir d’un regard aiguisé et d’une vision claire, portée par l’allégorie du fabuliste, confiant au lecteur français : « Quelle proie tout de même pour le loup allemand que cet agneau hollandais qui se désaltère dans le courant d’eaux si pures ! ». Claude Blanchard, dont Pierre Lazareff disait qu’il était un « mousquetaire de l’information [qui] avait bon cœur, mais mauvais caractère74 », porte une première plume dans la plaie. Les mois suivants, Blanchard enquête en Arabie, d’abord au royaume d’Ibn Séoud, à la suite d’Albert Londres75, au travers de portraits de villes, de l’émir Fayçal ou de ses soldats76, le grand reporter prend le pouls de la paix ambiante à Hodeidah, puis témoigne du quotidien des populations juives « revenues en terre promise77 ». Entre-temps, en juillet 1934, Blanchard est sollicité par plusieurs de ses confrères, dont certains membres du prix Albert-Londres, pour la constitution d’un syndicat du grand reportage de la presse quotidienne « dans le but de défendre les intérêts moraux et matériels des journalistes professionnels régulièrement chargés de missions à l’étranger78 ». Parmi les seize membres fondateurs annoncés dans la presse, l’on compte Andrée Viollis, Emmanuel Bourcier, Henri Clérisse, Émile Condroyer, Stéphane Faugier, Georges Ferré, Léo Gerville-Réache, Édouard Helsey, Pierre Humbourg, Maurice Laporte, Guy Mounereau, Jean Pédron, Jean Perrigault, Louis Roubaud, mais aussi les deux prochains lauréats du prix Albert-Londres : Jean Botrot et Max Massot.

Fig12Fig13

Fig. 12 et 13 : extraits de reportages de Paul Blanchard dans Le Petit Parisien, 1934

En effet, Jean Botrot, chroniqueur et grand reporter pour Le Journal, devient le quatrième lauréat du prix Albert-Londres, en 1936, pour une enquête sur le sujet d’une « Europe inquiète », menée, en avril 1935, en Pologne, en Hongrie, en Tchécoslovaquie et en Roumanie où il évoque — au côté de Didier Poulain, de Vidal-Lablache, de Géo London, d’Émile Condroyer et d’Edouard Helsey — la montée du nazisme en Europe79 (Fig. 14). Le récit offre un exemple significatif de l’importance accordée au recueil de témoignages multiples, auprès d’interlocuteurs variés. Dans le premier article, « Calme et résolue, la Tchécoslovaquie fait front à la menace allemande80 », Botrot informe le lecteur du mode opératoire établi avec son intermédiaire sur le terrain : « Il s’était ingénié à réunir […], pour que je prisse contact avec l’opinion de ce pays, les personnages les plus divers, des Tchèques et des Slovaques81 ». Dans un second temps, le grand reporter précise l’orientation politique de son enquête : « je tentais de leur faire préciser quelles sont les réactions du peuple tchécoslovaque en présence d’une Europe inquiète et divisée82 ». Chez Botrot, le grand reportage est construit sur un échange de dialogues mis en scène où les propos des interlocuteurs tiennent la majeure partie de la publication, mais sont également rapportés au travers de quatre des titres, tels que : « Un peuple bien résolu à ne pas mourir ne meurt jamais83 » ; « Qu’on nous rende la terre hongroise84 » ; « Nous nous tiendrons aux côtés des nations qui veulent les révisions85 » et « Nos regards sont tournés vers la France86 ». Donnant un écho aux multiples points de vue rencontrés, souvent jusque dans la conclusion de l’article, le processus d’écriture permet au grand reporter à la fois d’exposer la manière dont il se forge une opinion et d’inviter à la réflexion le lecteur du Journal :

Un des jeunes gens parla le dernier :

— Monsieur, me dit-il, on vous a beaucoup entretenu du pacifisme des Tchécoslovaques. N’oubliez pas leur bravoure. Rappelez-vous le rôle joué par nos légionnaires au sein des armées alliées. Et si vous reconnaissez notre histoire, souvenez-vous des guerres hussites. Toute l’Europe était contre nous ; nous avons vaincu l’Europe.

Nous nous quittâmes au soir tombant. La place Venceslas, comme de coutume, regorgeait de foule et ruisselait de lumière. Rien ne décelait le malaise que venait de révéler notre conversation. Seule, à la devanture d’un libraire, une couverture illustrée me rappela à la dure réalité. On y voyait une carte de l’Europe centrale et, en surimpression, une tête de mort au front marqué de la croix gammée. Or la Tchécoslovaquie se trouvait placée, sur la carte, entre les deux hideuses mâchoires.

Lugubre présage ou simple cauchemar87 ?

Jean Botrot porte une deuxième « plume dans la plaie » que son enquête suivante, « Comment s’en sortir ? », publiée dans Le Journal du 5 au 11 avril 1936, prolonge en interrogeant la « montée du nazisme » vue de France. Le grand reporter se fait le porte-voix des régions et de leurs habitants : les vignerons de Nuits-Saint-Georges se montrent « en faveur d’un rapprochement franco-allemand88 », précise le grand reporter, tandis qu’en Savoie, « on craint le conflit, mais on espère une entente et on reste fidèle à ses amitiés89 » et qu’une demande de « negotium » émane de Marseille90.

Fig14

Fig. 14 : Extrait de « Six grands reporters à travers l’Europe inquiète », publié dans Le Journal, 16 - 22 avril 1935

Esclavage en Afrique du Sud, Pègre, gangsters new-yorkais et Espagne franquiste

En mai 1937, Max Massot, prolixe collaborateur au Journal depuis 1911, obtient le cinquième prix Albert-Londres pour l’ensemble de ses reportages menés entre autres en Corse, dans la Sarre, en Afghanistan, dans la province du Transvaal en Afrique du Sud et en Abyssinie91. En mai 1930, Massot accompagne l’aviateur Rabatel en Éthiopie. Ils partagent « leurs impressions » de voyage, dans une série en trois volets, publiée en une du Journal92. Le récit introduit le lecteur au sein du palais impérial et propose un portrait du Négus Taffari, « entre traditions ancestrales et civilisation moderne93 », qui fait écho au grand reportage d’Albert Londres en Annam, en 1922, et rend aussi hommage à l’impératrice défunte94. Quelques mois plus loin, du 23 octobre au 5 novembre 1930, Le Journal publie sept longs articles dans lesquels Massot revient sur les différentes étapes du périple en Abyssinie. Il présente différents portraits sociohistoriques : Addis-Abeba en effervescence avant le couronnement de l’empereur, les fêtes du sacre, le festin offert aux soldats par Hailé Sélassié. Dans un registre différent qui renoue avec le récit de crimes, du 9 au 21 janvier 1931, Max Massot campe des portraits de bandits corses dans « Les maîtres du maquis » et relate leurs histoires de vendetta au travers d’une grande série de dix articles95.

L’année suivante, les 17 et 18 février 1932, Massot partage les aventures au Sahara des aviateurs Jean Réginensi, Joseph Touge et Roger Lénier, il retrace leur périple héroïque dans le désert du Hoggar96, tandis que son enquête « Chez les chercheurs d’or et de diamants » est éditée en volume, sous le titre : Au pays de l’or et du diamant97. Dans le sillage d’Albert Londres, Massot compose un sensible pamphlet contre l’esclavage en Afrique du Sud. Il est intéressant de souligner que si la création de la section « du livre de grand reportage » au sein du prix Albert-Londres est officialisée en 2017, l’ensemble des récipiendaires participent de cette pratique éditoriale dès le début des années vingt. Mélodie Simard-Houdé rappelle que, dans le sillage des recueils de chroniques, « l’édition de reportages en volume s’observe dès les années 1870 » au travers des recueils d’articles courts, d’abord, puis avec l’essor des enquêtes de longue haleine, jusqu’en dans les années 193098. En août 1932, envoyé spécial en Espagne, Max Massot raconte le déroulement de « l’Assomption à Séville en état de siège » et témoigne des procès de Madrid à la suite de la récente insurrection.

En août 1933, Massot renoue avec l’actualité du banditisme et retrace les étapes qui l’ont mené des bureaux du 36 quai des Orfèvres à Barcelone « cité des sourires et du crime99 », dans le milieu de la pègre. Le sujet, s’il est directement inspiré par le travail d’Albert Londres sur la traite des blanches dans Chemin de Buenos-Aires (1926), voir s’il l’imite100, est affublé de préjugés qui l’en distinguent :

Le soir, le Catalan laisse sa femme à la maison. Et sa vraie journée commence. À vous ses pesetas, valets de cœur français ! La concurrence ? Qu’importe, pourvu que vous soyez servi ! Qu’importe si le Napolitain, éclectique et voleur, affranchi subtil et fantaisiste, trouve une pitance égale. Qu’importe si le Polak, surveillant dur sa jolie juive, fraîche émoulue du ghetto balkanique, fait aussi de petites affaires reluisantes ? Qu’importe même le dru bataillon des concurrents indigènes, bons élèves d’ailleurs et maintenant doublés d’Argentins, de Philippins, de Cubains, empressés de rendre à l’Europe la politesse de ses leçons ! Qu’importe, le foirail est immense, ses amateurs ont des facultés inépuisables. Les préférés de ces dames seront toujours nantis101.

Néanmoins, le lecteur, introduit sur les lieux de débauche, y découvre les coulisses de l’enquête et Max Massot confronté à des situations criminelles, dont la prostitution de mineurs :

Tout à coup, l’huis s’ouvre devant une gamine impétueuse, les tresses au vent, avec une drôle de figure espiègle et indécise. Treize ans, bon poids. Je pourrai dire, hypocritement, que j’ai pris la fuite, épouvanté. Mais je ne suis pas tout à fait à l’âge où les physiologistes expliquent, sans l’absoudre, le goût irréductible des contrastes. Le reporter a fait taire l’homme, et l’on s’est expliqué. La fillette était l’enfant légitime de la respectable locataire, qui fait aussi le métier que vous pensez102.

Sur le fond comme sur la forme, les épisodes rejouent les codes de l’enquête d’Albert Londres, soulignant les contrastes de l’emprise psychologique, « l’optique du loup et du berger103 », « le miroir aux alouettes104 », proposant une topographie du milieu, « un soir au Barrio Chino105 », et portraiturant une galerie de protagonistes, mais Massot tente aussi d’imprimer sa marque et propose un « bréviaire du fripon » élaboré à partir de l’examen de lettres de correspondance d’escrocs, en compagnie d’un commissaire espagnol106.

En février 1934, Le Journal publie le récit d’actualité du voyage de Massot en Afghanistan. Ce dernier témoigne du « grand procès à Kaboul107 » des meurtriers du roi Nadir Shah, assassiné le 8 novembre 1933. Puis, dans le cadre de l’affaire Stavisky, de l’assassinat du conseiller Albert Prince, chargé de l’enquête auprès du parquet de Paris, le grand reporter poursuit les portraits de criminels. Au mois de mars, il relate « l’arrestation et l’interrogatoire à Marseille de François-Paul Spirito108 », surnommé dans le milieu de la pègre « François Caponi ». Les années trente sont aussi celles de la prohibition en Amérique, terreau du banditisme de contrebande. En septembre 1934, la rédaction du Journal annonce dans un encadré à la Une : « Gangsters, 1934109 » (Fig. 15), une série inédite menée par Max Massot dans les bas-fonds new-yorkais, parmi les affranchis. Dans six longs articles, Massot met en lumière les sombres exploits de « gangsters, tueurs et millionnaires110 » (Fig. 16), dont les films noirs hollywoodiens, dirigés par John Huston ou Otto Preminger, feront leur manne, la décennie suivante.

Fig15

Fig. 15 : Le Journal, 6 septembre 1934

Fig.16

Fig. 16 : Le Journal, 9 septembre 1934

« Ancien combattant de Verdun, croix de guerre, médaillé militaire, Max Massot a couru le monde », souligne la rédaction du Journal, le 17 août 1935, lorsque le grand reporter, désormais chef de l’information, est promu au rang de chevalier de la Légion d’honneur111. L’année suivante, le 9 mai 1936, en une et en pleine page, Le Journal magazine publie un grand portrait posthume, « Haïlon la ras grâcié », dans lequel Max Massot partage ses souvenirs sur le dernier chef éthiopien « à qui le Négus confia la reddition de sa capitale aux Italiens112 ». Le grand reporter couvre la guerre civile comme envoyé spécial en Espagne et il adopte le parti-pris franquiste dans les dépêches qui précèdent son prix en 1937. Le 29 avril, Massot peint par exemple la déroute du Front populaire en Biscaye : « Promenade dans les routes fumantes d’Eibar incendiée par les miliciens rouges113 ». Le 4 mai, son article intitulé « Salut de l’Islam à l’Espagne nouvelle114 » prend ouvertement le parti du vainqueur, « la main plongée dans une corbeille de pétales de roses115 », pour reprendre l’expression d’Albert Londres. Le 14 mai, Le Journal annonce sous la plume de son collaborateur : « Cinq jours de batailles, cinq jours de victoires pour les troupes nationalistes116 ».

Alerte Rouge en Russie

Jean-Gérard Fleury, collaborateur au journal Le Jour et à Gringoire, est passionné d’aviation, son premier recueil de reportages Les chemins du ciel, paraît aux Nouvelles éditions Latines en 1933. Fleury signe régulièrement des portraits d’aviateurs, « Wiley Post117 », d’aviatrices, « Maryse Hilzs118 », ou s’exprime sur l’actualité aéronautique, « Air-France ne deviendra pas Air-Allemagne119 » dans les pages de l’hebdomadaire. En 1936, il se rend en URSS et alerte, à la suite d’Albert Londres au début des années vingt, sur la misère des masses ouvrières et sur les ressorts du communisme stalinien, au travers d’une longue enquête, « Un homme libre chez les Soviets », publiée en 10 épisodes dans Gringoire d’abord, du 15 mai au 17 juillet 1936 (Fig. 17), puis en volume sous le titre éponyme120, et dédicacé à Jean Mermoz. Le 30 octobre 1936, la rédaction de Gringoire annonce la parution du livre de son collaborateur, « un esprit lucide et courageux121 », soulignant « la richesse de la documentation et la sobriété du ton » du reporter, précisant que « sa condamnation des Soviets est étayée sur mille observations, mille témoignages122 ». Jean-Gérard Fleury portraiture une police soviétique omniprésente, raconte « la condition des ouvriers et des paysans, du stakhanovisme ou de l’organisation des loisirs123 ». Concluant que plus encore qu’un homme libre, son collaborateur incarne « un esprit lucide et courageux124 ». L’année suivante, mandaté par l’hebdomadaire, Fleury effectue un long parcourt à travers le continent brésilien, sur les traces de Fawcette, l’explorateur disparu. Sous le titre : « Les aventuriers du Brésil », le grand reportage est publié dans Gringoire, en onze épisodes, du 25 juin au 3 septembre 1937. Fleury suit la piste des « cangaceiros, bandits d’un autre âge » et « pénètre dans leur repaire125 ». À Bahia, « ancienne capitale du Brésil colonial », Jean-Gérard Fleury campe les portraits de marchands d’esclaves, s’initie aux rites occultes vaudous, raconte le mystère des « zombis, morts-vivants » et le labeur des missionnaires « bottés et barbus » : des chercheurs d’or, des chercheurs de diamants et de chercheurs d’âmes126. C’est pour l’ensemble de ses grands reportages, mêlant l’esprit d’aventure à une facture sociopolitique, que Jean-Gérard Fleury obtient le sixième prix Albert-Londres, en 1938, au second tour qui l’opposait à Jacques Audiberti127.

Fig17

Fig. 17 : extrait de « Un homme libre chez les Soviets », publié en 10 épisodes dans Gringoire, du 15 mai au 17 juillet 1936

L’aventure patriote du grand reportage

En mars 1937, Joseph Kessel, qui a rejoint le petit cercle des membres du jury du prix Albert-Londres, signe pour Paris-Soir une série de quinze articles intitulée « Mes hommes d’aventure ». Dans le cinquième épisode, il relate sa rencontre, en 1926, avec Jacques Zimmermann, un jeune caporal français et baroudeur, devenu méhariste et ayant vécu en nomade dans le Sahara. En 1939, c’est ce même Jacques Zimmermann qui obtient le prix Albert-Londres pour un ensemble de trois reportages publiés entre novembre 1937 et avril 1939 dans Paris-Soir. Zimmermann relate son « Service au Sahara128 », les formes de l’esclavage moderne dans « Tu seras esclave129 » et les exploits héroïques des « Tcherkesses du Lt-colonel Collet130 » (Fig. 18). La rédaction de Paris-Soir qualifie tour à tour les récits de Zimmermann de « belle enquête à la gloire des héros vivants et méconnus de la France coloniale131 » ou annonce une histoire de « Héros au service de la France ». Chez Jacques Zimmermann, les grands reportages conjuguent aussi les ingrédients de l’aventure exotique, du pittoresque, de l’épopée, dans un style ciselé, magnifiant la description des guerriers du désert, par exemple. Cependant, les récits des coutumes des tribus nomades, comme celui du vol de femmes de tribus à une autre, conservent un ton paternaliste et traduisent une vision eurocentrée.

Fig18

Fig. 18 : Paris-Soir, 8 avril 1939

La rupture de la Seconde Guerre mondiale 

Si les sujets des premiers lauréats témoignent, de 1933 à 1939, de thèmes sociaux ou politiques, ils ne défendent pas nécessairement une cause, ils ne dénoncent pas systématiquement des injustices sociales, ils ne portent pas toujours « la plume dans la plaie ». Dans le sillage d’Albert Londres, les grands reporters récipiendaires partagent une perception d’événements historiques et sociaux dont ils tentent de rendre intelligibles les enjeux. La facture des enquêtes est celle du réalisme social. L’entrée de la France dans les turbulences de la Seconde Guerre mondiale stoppe temporairement, pour six années, la remise du prix Albert-Londres, et quelques-uns des lauréats comptent parmi les envoyés spéciaux aux Armées. Max Massot132, envoyé spécial pour Le Journal, par exemple, mais surtout Claude Blanchard. En 1940, alors qu’il ne peut exercer son métier sous l’Occupation, Claude Blanchard rejoint le mouvement Défense de la France et œuvre clandestinement à l’élaboration de France-Soir. Il reprend sa fonction de correspondant de guerre, en août 1944, au moment de l’entrée des troupes du Général Leclerc dans Paris ; il parcourt l’Allemagne occupée, puis, avant de se défaire de son uniforme, il choisit de partir pour l’URSS afin d’enquêter sur le quotidien des familles sous le régime soviétique133. Le 14 septembre 1945, il câble depuis Le Caire à la rédaction de France-Soir : « Fatigué voyage, ai hâte vous rapporter reportage sur comment vivent les Russes dans l’après-guerre. Prendrai avion militaire ». Trois jours plus tard, l’avion se crache près de Malte, englouti dans la Méditerranée134. Le 21 septembre, le journal de Lazareff titre à la Une : « Claude Blanchard meurt, victime du devoir professionnel135 » (Fig. 19).

Fig19

Fig. 19 : France-Soir, 21 septembre 1945

À travers les enjeux d’une « science et d’une conscience de l’histoire », le corpus des œuvres du prix Albert-Londres dessine aujourd’hui les relations complexes « de l’écriture au présent de l’histoire et sa mémoire », telles que les pensait Marc Ferro136. Henri Amouroux, qui présida le prix Albert-Londres pendant vingt et un ans, de 1984 à 2006, considérait qu’à une époque où le voyage s’est banalisé, le rôle du grand reporter consiste à se glisser derrière la façade afin de faire comprendre « l’Inde, le Népal ou les États-Unis137 ». Quelques-uns d’entre eux s’efforcent d’atteindre plus loin. Dans des enquêtes en contrepoint, ils dénoncent des situations d’urgence politiques et portent nos regards dans les plaies de l’histoire sociale. Récemment, dans le film Tous surveillés, sept milliards de suspects, Sylvain Louvet, lauréat de la catégorie audiovisuelle du prix Albert-Londres en 2020, enquête en territoire chinois, sur les traces des camps Ouïgours.

Notes

1 Si, en 2017, le prix ouvre officiellement une voie aux enquêtes et grands reportages publiées en volume, nombre de récipiendaires, dès la création du prix en 1933, sont récompensés pour l’ensemble de leurs articles et publications de grand reportage.

2 Frédéric Lambert, « Esthésie de la dénonciation : Albert Londres en terre d’ébène », Nouveau Monde éd., « Le temps des médias » 2016/1 n°26, p. 75-92.

3 Ibid.

4 Albert Londres remploie son pseudonyme D’Aigues-Mortes dans le prologue à la Chine en folie, publiée par Albin Michel en 1923.

5 Le Petit Marseillais, Une du 3 janvier 1920, colonnes 3 et 4.

6 Le Petit Marseillais, Une du 5 janvier 1920, colonne 4.

7 Le Petit Marseillais, Une du 3 janvier 1920, op. cit.

8 Excelsior, 29 décembre 1919, page 2, colonnes 1 et 2.

9 Notre thèse de doctorat présente une analyse de la série d’articles politiques, publiée dans les pages du Petit Marseillais, sous le pseudonyme D’Aigues-Mortes.

10 Georg Lukács, « Reportage oder Gestaltung ? », Essays über Realismus., Werke. Problem de Realismus I., Band 4., Luchterhand, 1971, pp. 35-68.

11 Ibid.

12 Dominique Kalifa, Les bas-fonds. Histoire d’un imaginaire, Paris, Seuil, 2013, p. 306.

13 Johanna Cappi, « Albert Londres, grand reporter et photographe en terre d’ébène. Sur le colonialisme, la traite humaine et la construction du chemin de fer Congo-Océan (Le Petit Parisien, 1928) », dans Patrick Mathieu (dir.), Voyage et Scandale, Paris, Classiques Garnier, 2022.

14 Émile Condroyer, « L’Institut français à Madrid », Une du Journal, 12 mars 1927.

15 Émile Condroyer, « Georges Carpentier va jouer un sketch au music-hall », Une du Journal, 8 janvier 1927.

16 Émile Condroyer, Des fjords aux tulipes, Paris, éd. Baudinière, 1929, 222 p.

17 Émile Condroyer, « Les prisonniers de l’océan », Voyages… à travers l’actualité mondiale, Paris, Larousse, n°2, 15 janvier 1930.

18 Émile Condroyer, « En partant pour Terre-neuve », Voyages… à travers l’actualité mondiale, Paris, Larousse, n°2, 15 mars 1930.

19 Émile Condroyer, « L’ermite de l’Atlantique : Islande, île morte », Le Journal, 20 juin 1930, Une et page 2.

20 Ibid.

21 Ibid.

22 Ibid.

23 Ibid.

24 « Reykjavick, port isolé », Le Journal, 21 juin 1930, Une et page 2.

25 Ibid.

26 « Une fringale de modernisme », Le Journal, 2 juin 1930, Une et page 2.

27 Le Journal, 21 juin 1930, op. cit., page 2.

28 Le Journal, 22 juin 1930, Une et page 2.

29 « Commerce », Le Journal, 25 juin 1930, une et page 2.

30 « Une future république », Le Journal, Une du 26 juin 1930.

31 Émile Condroyer, Des fjords aux tulipes, op. cit. p. 8.

32 Émile Condroyer, Dans les houles d’Islande, op. cit., pp. 10-14.

33 Émile Condroyer, Dans les houles d’Islande, op. cit., p. 14, 15.

34 Émile Condroyer, « Quand partent les Terre-neuvas », magazine Vu, n°517, 9 février 1938

35 Émile Condroyer, « Le congrès des Sokols à Prague », magazine Vu, n°539, 1939.

36 Frédéric Tonolli, Les Enfants de la baleine, Paris, La Martinière, 2007, p. 5.

37 Stéphane Faugier, Quand j’étais négrier, Paris, Librairie Gallimard, 1930, 138 p.

38 Stéphane Faugier, Sur la piste de l’or, Paris, Librairie de la revue française-Alexis Redier, 1931, 262 p.

39 Stéphane Faugier, « Au pays de l’or et du crime », Vu, magazine du 20 mai 1931, n°166, p. 694-696.

40 Stéphane Faugier, Sur la piste de l’or, op. cit., p. 8.

41 Ibid., p. 13, 14.

42 Ibid., p. 7.

43 Ibid., p. 15.

44 Fritz W. Up de Graff, Head-Hunters of the Amazon: seven years of exploration and adventure, New York:Duffield and Compagny. 1923. 337 p. Voir : Les chasseurs de têtes de l’Amazone, traduit de l’anglais par Pierre Belperron, Paris, Plon, 1950, 353 p.

45 Voir par exemple, Stéphane Faugier, Le Matin du 15 août 1932, Une, colonne 7 et page 5, colonnes 5 et 6.

46 Le Matin du 20 août 1932, Une, colonnes 6, 7 et page 2, colonnes 1-3.

47 Le Matin du 21 août 1932, Une, colonnes 5, 6 et page 2, colonnes 1, 2.

48 Le Matin du 23 août 1932, Une, colonne 7 et page 2, colonnes 1, 2.

49 Le Matin du 1er septembre 1933, Une, colonne 7 et page 2, 1ère colonne.

50 Le Matin, 3 septembre 1933, page 5, colonnes 4 et 5.

51 Voir Le Matin du 9 décembre 1933, page 4, colonnes 3-5.

52 Stéphane Faugier, « La Guyane, terre de l’or et du bois précieux, entend demeurer fidèle à la France et au maréchal », Actu, magazine n°53 du 9 mai 1943, p. 6, 7.

53 Claude Blanchard, « Pour mieux comprendre les Etats-Unis », Le Petit Parisien du 22 juillet au 24 août 1930. Les articles du grand reportage ont été réuni et publié en volume sous le titre : Voilà l’Amérique !, Paris, Baudinière, 1931, 237 p.

54 Le Petit Parisien, 23 juillet 1930.

55 Le Petit Parisien, 25 juillet 1930.

56 Le Petit Parisien, 3 août 1930.

57 Le Petit Parisien, 11 août 1930.

58 Le Petit Parisien, 12 août 1930.

59 Le Petit Parisien, 13 août 1930.

60 Le Petit Parisien, 14 août 1930.

61 Le Petit Parisien, 17 août 1930.

62 Claude Blanchard, « Paris ! Mon Paris ! », Le Petit Parisien du 4 au 16 octobre 1931.

63 Le Petit Parisien, 4 octobre 1931.

64 Le Petit Parisien, 5 octobre 1931.

65 Le Petit Parisien, 8 octobre 1931.

66 Le Petit Parisien, 9 octobre 1931.

67 Le Petit Parisien, 10 octobre 1931.

68 Le Petit Parisien, 11 octobre 1931.

69 Le Petit Parisien, 13 octobre 1931.

70 Le Petit Parisien, 15 octobre 1931.

71 Jean-Claude Guillebaud, « Les Confettis de l’empire ou les petites Frances d’Outre-mer », Le Monde, 1976.

72 Jean-Claude Guillebaud, « Un voyage en Océanie », Le Monde du 16 juillet au 15 août 1980.

73 Johanna Cappi, « Îles vues, îles vécues au large du Pacifique. Les Confettis de l’empire (1976) et Un voyage en Océanie (1980) : deux enquêtes de Jean-Claude Guillebaud pour le journal Le Monde », dans Vanezia Pârlea (dir.), Îles réelles, îles fictionnelles, Clermont-Ferrand, Presses Universitaires Blaise-Pascal, coll. « Littératures », 2019, pp. 141-153.

74 Pierre Lazareff, avant-propos à Claude Blanchard, De notre envoyé spécial, Paris, éditions Défense de la France, 1948, p. 16.

75 « Aux pays torrides des pêcheurs de perles », Le Petit Parisien, 19 octobre - 16 novembre 1930. Lire l’édition du grand reportage en volume : Albert Londres, Pécheurs de perles, Paris, Albin Michel, 1ère éd. 1931.

76 Le Petit Parisien, 10 -17 juillet 1934.

77 Le Petit Parisien, 13 août - 3 septembre 1934.

78 « Un syndicat du grand reportage », Le Petit Parisien, 10 juillet 1934, page 5, colonne 4.

79 « Six grands reporters à travers l’Europe inquiète », Le Journal, 16 - 22 avril 1935.

80 Jean Botrot, « Calme et résolue la Tchécoslovaquie fait front à la menace », dans « Notre enquête à travers l’Europe inquiète », Le Journal, 16 avril 1935, page 6.

81 Ibid.

82 Ibid.

83 Le Journal, 18 avril 1935, page 6.

84 Le Journal, 1 avril 1935.

85 Le Journal, 20 avril 1935, page 6.

86 Le Journal, 22 avril 1935.

87 Le Journal, 16 avril 1935, op. cit.

88 Le Journal, 5 avril 1936, page 3.

89 Le Journal, 7 avril 1936, page 3.

90 Le Journal, 10 avril 1936, page 3.

91 Le Journal, 20 mai 1937, page 2 et Le Grand écho du Nord de la France, 20 mai 1937, page 4.

92 Le Journal, Une du 24 mai 1930.

93 Le Journal, 25 mai 1930, Une et page 2.

94 « La victoire du Négus et la mort de l’impératrice », Le Journal, 26 mai 1930, Une et page 4.

95 « Les maîtres du maquis », Le Journal, 9 janvier 1931, Une et page 2 ; « Comment la Corse pourra guérir le banditisme », Le Journal, 20 janvier 1931, Une et page 2.

96 « L’aventure saharienne de Réginensi, Touge et Rénier », Le Journal, 18 février 1932, Une et page 2.

97 Max Massot, Au Pays de l’or et du diamant, Paris, Éditions des portiques, 1932, 253 p.

98 Mélodie Simard-Houdé, « Le reporter devient un auteur. L’édition du reportage en France (1870-1930) », Mémoire du livre/Studies in Book culture (6/2), 2015.

99 Le Journal, 7 août 1933, Une et page 2.

100 Le troisième épisode de la série est intitulé : « Les difficultés imprévues de la traite des blanches », Le Journal, 9 août 1933, Une et page 2.

101 « La débauche aux cent visages », Le Journal, 8 août 1933, Une et page 2.

102 Ibid.

103 Le Journal, 11 août 1933, Une et page 2.

104 Le Journal, 12 août 1933, Une et page 2.

105 Le Journal, 13 août 1933, Une et page 2.

106 Le Journal, 15 août 1933, Une et page 2.

107 Le Journal, 26 février 1934, page 4.

108 Le Journal, 30 mars 1934, page 4.

109 Le Journal, 6 septembre 1934, Une.

110 Le Journal, 9 septembre 1934, Une et page 4.

111 Le Journal, 17 août 1935, page 6. Voir aussi Le Journal, 26 avril 1935, page 2.

112 Le Journal magazine, Une du 9 mai 1936.

113 Le Journal, 29 avril 1937, page 5.

114 Le Journal, Une du 4 mai 1937.

115 Albert Londres, Avant-propos à Terre d’ébène, Paris, Albin Michel, 1929, p. 7.

116 Le Journal, 14 mai 1937, page 5.

117 Gringoire, 23 août 1935, page 3.

118 Gringoire, 5 juillet 1935, page 3.

119 Gringoire, 20 avril 1934, page 10.

120 Jean-Gérard Fleury, Un homme libre chez les soviets, Paris, Les éditions de France, 1937, 257 p.

121 Ibid.

122 Gringoire, 30 octobre 1936, page 4.

123 Ibid.

124 Ibid.

125 Gringoire, 25 juin 1937, page 17.

126 Ibid.

127 Le Journal, 17 mai 1938, Une et page 2.

128 Paris-Soir, 23 au 29 novembre 1937.

129 Paris-Soir, juin-juillet 1938.

130 Paris-Soir, 8 avril 1939, page 6.

131 Paris-Soir, Une du 23 novembre 1937.

132 « Le Journal sur le front de combat : une nouvelle dépêche de notre envoyé spécial Max Massot », Une du Journal, 18 mai 1940.

133 Pierre Lazareff, op. cit., p. 17.

134 Ibid., p. 15.

135 France-Soir, 21 septembre 1945, Une et page 2.

136 Marc Ferro, L’Histoire sous surveillance, Paris, Calmann-Lévy, 1985.

137 Henri Amouroux, préface à Grands reportages : 43 prix Albert-Londres 1946-1989, Paris, Arléa, op. cit., p. 9, 10.

Pour citer ce document

Johanna Cappi, « Les premiers lauréats du prix Albert-Londres (1933-1939), des défenseurs du reportage social ? Politiques d’observation d’un journalisme d’enquête entre héritages et métamorphoses », Presses anciennes et modernes à l'ère du numérique, actes du congrès Médias 19 - Numapresse (Paris, 30 mai-3 juin 2022), sous la direction de Guillaume Pinson et Marie-Eve Thérenty Médias 19 [En ligne], Dossier publié en 2024, Mise à jour le : , URL: https://www.medias19.org/publications/presses-anciennes-et-modernes-lere-du-numerique/les-premiers-laureats-du-prix-albert-londres-1933-1939-des-defenseurs-du-reportage-social-politiques-dobservation-dun-journalisme-denquete-entre-heritages-et-metamorphoses